Dossier
sur le "Silence"
Le silence dans la
classe n'est-il pas le souhait de bien des
enseignants? Ne nous parait-il pas la condition
d'un travail efficace? N'est-il pas ce qui nous
demande le plus d'énergie à obtenir?
Et pourtant nous savons qu'il n'assure pas
l'apprentissage de connaissances!
Ce silence bien
rarement traité est pourtant bien
présent dans nos expressions comme me l'a
signalé Robert Berghe:
<<"Silence !",
demande d'absence de son. "Silence ! On
tourne !", variante
cinématographique. "Silence dans
les rangs !", variante militaire,
souvent réutilisée dans d'autres
situations. "Si la parole est d'argent,
le silence est d'or" : ce proverbe
indique que souvent il vaut mieux se taire que de
parler inconsidérément. "Un
silence éloquent" : c'est un
oxymore. Cela indique que le silence d'une personne
sur un sujet en dit déjà long sur la
vérité. "Silence
radio" : c'est une tactique militaire
consistant à ne rien émettre pour
éviter la détection. Au sens
figuré, cela se dit d'une personne qui ne
donne plus de nouvelles. "Silence de
mort", silence qui annonce ou suit une
catastrophe quelconque. Cette expression souligne
le malaise de ceux qui sont soumis à ce
silence. "Minute(s) de
silence", acte commémoratif
collectif dédié à une personne
disparue ou à un événement
tragique...>>
Le silence d'un groupe
(d'une classe)
est un écran blanc sur lequel chacun va
pouvoir projeter ce qu'il a dans sa tête.
Autrement dit il va demander à être
interprété par
l'enseignant. C'est le principe même de
la psychanalyse dans laquelle le psychanalyste
silencieux s'accepte "objet de projection" pour
permettre au patient de découvrir ce qu'il a
dans ses pensées.
<<Je
suis un écran blanc sur
lequel des personnes de tous les
bords peuvent projeter leurs
convictions
politiques>>
Barack Obama in "L'audace
d'espérer" Presses de la
Cité
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Je me
souviens de cet enseignant qui me disait
<<Quand ma classe est silencieuse
j'ai l'impression qu'elle est
"morte">> Alors il s'efforcait
<<de les exciter pour les faire
sortir de leurs gonds
>>. C'est ainsi qu'il
aboutissait à se faire chahuter! et
il en était heureux:
<<Alors j'ai l'impression que les
élèves sont
"vivants">>!
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Des yeux qui nous
regardent en silence ne correspondent pas toujours
à des oreilles qui nous
écoutent! Ces
élèves sont peut-être en train
de penser à leur prochain W.E, à leur
petit(e) ami(e), à Internet... Leur silence
facilitateur peut être également
déstabilisant .
Le silence d'une
classe peut aussi être le symptôme d'un
fantasme collectif: par exemple, un désir
d'union autour d'un projet que tous attendent (voir
le texte Les
secrets du silence
de Lucette Turbet) ou d'un désir
insatisfait...
Il peut
également résulter de choix
pédagogiques comme le montre Jeanne Moll
dans un
texte fort
intéressant sur les rapports de la
littérature et du silence.( voir
également le
texte
envoyé)
L'enseignant devant
le silence de sa classe, que cela lui plaise ou
non, aura toujours à se demander "Qu'est-ce
qu'ils veulent me dire?"
"Le bruit"
d'une classe est lui aussi à
interpréter:
- est-il signe
d'une intense activité d'échanges
entre élèves sur le travail
demandé? La notion de "bruit supportable"
est alors différente pour chaque enseignant;
ce qui est signe de travail pour l'un devient
insupportable et gêne pour un
autre.
- est-il signe
d'une angoisse diffuse dans la classe? Pourquoi?
Absence de cadre? Ou sentiment que le cadre ne sera
pas défendu solidement?
- est-il symptome
d'un fantasme collectif de la classe? désir
de détruire l'enseignant, le cadre? fantasme
de toute-puissance, tout est possible dans cette
classe? (Voir: L'écoute
d'un groupe
)
Le silence de
l'élève
Est-il l'expression
d'une parole muette? (Voir le
texte de Chantal
Constantini).
Il a certainement des raisons bien diverses et dans
tous les cas il est lu par nous de façon
bien personnelle comme le montrent les entretiens
faits avec
Marie,
Ariane,
Françoise
et Nadine.
Ce silence nous renvoie, comme on peut le voir dans
ces entretiens, à nous-mêmes, à
la structure de notre psychisme que nous projetons
sur lui.
Il peut
également nous renvoyer à des
"secrets" (Voir le
texte de Martine
Lani-Bayle).
Silence et secrets ont partie liée parfois!
Les contes, on le
sait, sont une façon d'aborder avec une
classe ou un enfant des sujets difficiles et
permettent une parole sur ce qui n'était que
silence.. Le conte
de la petite
sirène
en est un exemple.
Le silence de
l'enseignant
Nous enseignants
avons souvent envie de parler, d'expliquer, de
donner immédiatement la solution (de montrer
en quelque sorte que "nous savons") et nous
avons bien du mal à "garder le
silence" devant l'élève qui ne
sait pas!
Et pourtant
l'élève:
- a besoin
de temps pour réfléchir, nous
l'oublions souvent , nous qui savons.
- a besoin de
calme pour penser et nos explications risquent
parfois d'être vécues comme un
harcellement.
L'enseignant a
besoin:
-
d'écouter l'élève pour
comprendre ce qui a provoqué son erreur
ou son ignorance.
- de temps pour
réfléchir aux différentes
causes possibles, à ce qu'il serait
judicieux de dire à cet
élève-là, dans ce
contexte-là. Nous avons à
réapprendre le silence comme le dit
Lucette Turbet dans son texte "Réapprende
le silence"
On voit que le
silence de l'enseignant est paradoxalement aussi
important que son discours.
Le silence du
formateur
C'est lui qui
provoque souvent le transfert du stagiaire;
transfert positif moteur de la recherche du savoir
:" il sait, il nous laisse le temps de
réfléchir, il nous invite à
parler") ou du transfert négatif ("il
nous manipule, il veut nous forcer à
parler") qui est à entendre, si on veut
sortir d'un blocage du groupe.
Comment chaque
formateur vit-il ces silences dans un groupe de
formation? Veut-il les "combler" de suite pour les
éviter à tout prix? les entretient-il
avec complaisance pour montrer sa position? Les
laisse t-il mûrir pour permettre un
approfondissement de la réflexion ? Il y a,
en quelque sorte, une "éthique" du silence
dans la formation. (voir le
texte
envoyé)
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Sur
le silence
Jeanne
Moll
L'incitation
à écrire sur le
silence a fait tout de suite
émerger en moi un souvenir
très ancien.
C'était tout à la
fin de l'année de
quatrième à
l'école primaire
supérieure, comme le
collège se nommait
à l'époque. Notre
professeur d'anglais, une femme
qui avait quelque chose de sec,
de pointu que je n'aimais
guère , se mit à
nous lire, au lieu de faire
cours, Le silence de la mer, de
Vercors ...
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Comment
des enseignantes
décole
maternelle
«entendent»
le silence de
lélève
?
Extraits de
la Thèse
de
Chantal
COSTANTINI
sous la direction de Claudine
BLANCHARD-LAVILLE
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Lentretien
avec Nadine
et
ses élèves: Pierre,
Camille, Antoine, Jimmy qui ne
parlent
pas
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L'entretien
avec Marie
et
le sirop qui « calme
lasthme et le domine
»
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Lentretien
avec
Françoise
et
la toile daraignée
pour pouvoir contenir et retenir
les éléments en jeu
dans sa pratique professionnelle
: les élèves, le
savoir, la pédagogie, ses
conceptions
éducatives
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Lentretien
avec Ariane
et
sa passion envers son
métier, ses
compétences
professionnelles qui
résultent de ses
qualités psychiques
particulières à
conjuguer fantaisie et rigueur,
souplesse et
fermeté
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Réapprendre
le silence
Lucette
Turbet
Notre
monde occidental survolté
file à la vitesse de
l'éclair en vomissant des
sons par tous ses orifices. Il a
bien changé depuis les
années soixante : la ville
remplace la campagne et les
voitures, le cheval. Les
immeubles n'isolent pas comme
pouvaient le faire les maisons
individuelles ; les trains et les
avions ont allongé la
liste des moyens de locomotion et
grignotent notre capital de
silence.
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Des
textes et
témoignages
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