Jean
Piaget
le
15 décembre
1919
La
psychanalyse dans ses rapports avec la psychologie
de l'enfant.
Assemblée
générale de la société
Alfred Binet. (p.3)
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Préliminaire
<<La
limite entre la psychanalyse et la psychologie
courante semble donc
nette.
En
réalité il n'en est
rien.
La
conscience et l'inconscience sont partout
mêlées, souvent d'une manière
inextricable,
et
si l'on a violemment opposé ces deux aspects
de la vie de l'esprit,
et
par conséquent la psychanalyse à la
psychologie de l'intelligence, c'est par une
simplification du réel, sans doute utile au
début des
recherches,
mais
qu'il est superflu de conserver
aujourd'hui.
Bien
plus, les essais tendant au rapprochement de ces
deux disciplines
ont
sans doute un certain avenir, comme nous essaierons
de le montrer.
Les
mécanismes spéciaux que la
psychanalyse a découverts dans
l'étude des
sentiments
ont
en effet leur importance dans le
développement de la
raison>>.
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<<C'est
après de lentes et difficiles
évolutions qu'est apparu le concept de
nombre. Au cours de cette recherche d'une pratique
et d'un savoir arithmétique l'homme s'est
servi de son propre corps physique comme objet
concret facilitant le dénombrement. Cette
relation privilégiée avec le corps
humain a eu comme conséquences de modeler
d'une certaine façon les pratiques et les
savoirs. Le choix des bases de numération :
cinq, dix, vingt ou soixante n'est-il pas en
relation avec le nombre des doigts de la main ?
Dans ce rapport les différentes parties du
corps sont devenues "objets numériques"
évoluant en se différenciant
lentement vers la suite des nombres
entiers.
Comment des civilisations
éloignées ont adopté des
pratiques très proches les unes des autres ?
Comment les noms des éléments du
corps humain sont devenus les noms de nombres et
ont permis la numération ordinale ?
Ayant constitué une suite numérique
les hommes furent peu à peu contraints de
réaliser des opérations avec les
nombres.
Comment les mains sont-elles devenues de
véritables machines à calculer
?
Ce
procédé de calcul manuel existait
déjà chez les égyptiens de
l'ancien empire.>>(p.9)
<<C'est
à travers l'analyse des pratiques
anthropomorphiques que nous souhaitons observer les
premières manifestations d'une dynamique
affective en relation avec les
nombres.>>(p.9)
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<<Nous
ferons les hypothèses
suivantes
a) Il existe une
composante affective mise en jeu par
l'élève dans l'apprentissage et
l'utilisation des chiffres et des
nombres.
b) L'inconscient
participe dans les représentations et les
comportements des élèves à
l'égard des nombres et en particulier
à l'égard des
chiffres.
c) Les
élèves dont l'affectivité dans
la relation aux chiffres est ni trop importante ni
trop faible, obtiennent en moyenne de meilleurs
résultats à un test comportant des
activités
numériques.>>(p.126)
<<Pour
obtenir une meilleure observation de la
manifestation de conduites affectives dans
la relation aux chiffres nous avons
suivi:
trois
approches différentes et
complémentaires.
Ainsi nous souhaitions analyser le
plus large éventail possible des
conduites conscientes et inconscientes
chez un élève, dans le cadre
de notre
problématique.>>(p.127)
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1)
Test projectif avec des
élèves de 4 ème de
L.E.P.
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(Test projectif selon la méthode de Louisa
Duss)
<<Description
de l'échantillon.
Nous avons choisi d'observer un
échantillon de 45 élèves
appartenant à deux classes distinctes de
4ème préparatoire dans un
lycée d'enseignement
professionnel.
Pour les deux classes, la section suivie est
: employés techniques de
collectivités (E.T.C).
Passation du
test.
Cette
recherche a pour objectif de faire apparaître
les composantes fantasmatiques de l'objet
nombre.
Nous pourrons également observer
l'expression symbolique et les mécanismes de
défense mis en jeu ainsi que les
différentes stratégies pour lutter
contre la prise de conscience de mobiles
inconscients, avec les frustrations et les
angoisses qui peuvent en
résulter.
Il
s'agissait d'une rédaction faite en classe
pendant une durée d'une heure.
Les élèves ne connaissaient
pas la finalité du test et ont
participé avec le seul souci de
réaliser une rédaction. Le texte
proposé était le suivant :
"Après
avoir parcouru des plaines et
traversé des montagnes vous arrivez
au pays des chiffres. Racontez ce que vous
observez et ce que vous
ressentez.">>
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(p.127-129)
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2)
Entretiens cliniques avec les
élèves de
L.E.P.
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<<L'analyse
du test précédent a permis de mettre
en évidence une dynamique fantasmatique
dans la relation d'un élève à
l'objet nombre.
Nous avons observé comment se
construisent des mécanismes de
défense afin de rétablir des
équilibres pulsionnels.
L'analyse de cas cliniques facilitera
l'approche de représentations
spécifiques autour des nombres et permettra
d'approfondir certains mécanismes
pulsionnels.
Avant de constituer une grille
définitive nous avons réalisé
une dizaine d'entretiens libres avec les
élèves.
Suite à ces différents
entretiens il est apparu des thèmes
privilégiés et des
représentations fortement chargées
d'affectivité. La méthodologie
employée consistait à faire parler
librement les élèves sur les
nombres. La passation des entretiens s'est
réalisée durant le temps scolaire (au
moment d'une heure d'étude). Pendant 45
minutes à une heure les élèves
pouvaient s'exprimer sur leur vécu dans la
relation avec les
nombres.>>(p.161)
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3)
Test projectif en relation avec les
signifiants "chiffres"
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<<A l'aide de
ce test projectif nous souhaitons analyser les
relations affectives dominantes que les
élèves établissent, à
un moment donné, avec un chiffre
particulier.
Nous avons observé combien le
graphisme d'un chiffre pouvait se modifier d'un
élève à l'autre. Les
déformations d'un graphisme manuel ou
l'aspect stéréotypé des
caractères mécaniques pourraient
entraîner des variations pour les effets
projectifs. Afin de remédier à ces
variables parasites nous avons fait le choix que le
signifiant chiffre soit dessiné par
l'élève lui-même et non
proposé par
l'expérimentateur.
A partir de son
graphisme l'élève évoquera des
représentations plus personnelles et plus
pertinentes.
Le procédé du test est
tiré du modèle de Rorschach.
De la même façon que l'on
présente aux élèves
différentes planches, dans ce test le
signifiant permettant l'effet projectif se limite
aux graphismes successifs des différents
caractères de la numération : 0, 1,
2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9.>>(p.219)
Échantillon
<<Nous avons
réalisé la passation de ce test dans
différentes classes de 4ème
préparatoires de L.E.P. Il s'agit de la
section E.T.C. (employé technique de
collectivité) pour l'échantillon des
filles avec un effectif de 45 élèves,
et de la section menuiserie pour
l'échantillon des garçons comportant
également un effectif de 45
élèves.
Dans une
deuxième expérimentation nous avons
fait passer le même test à des
élèves de CM2 pour des
échantillons également de 45
élèves filles et 45
élèves garçons.
Ainsi nous avons
travaillé sur 180 élèves avec
un total de 1800 représentations
différentes.>>(p.219-220)
3
ème partie
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Approche
de l'intrication de l'affectif et du
cognitif
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<<Suite aux
observations réalisées dans notre
recherche expérimentale nous essaierons
de construire une approche possible de
l'intrication de l'affectif et du cognitif.
Dans la partie théorique nous avions
montré l'intérêt d'une
confrontation entre les travaux de Freud et Piaget.
Il apparaissait de nombreuses difficultés
dues à la subordination respective
entre les évolutions cognitives et
affectives. Si Piaget a beaucoup travaillé
pour la construction d'une synthèse entre
les deux théories, ses conclusions se sont
surtout orientées vers la
prédominance du cognitif (structural) sur
l'affectif (énergétique).
Tous les travaux plus récents
s'orientent désormais vers la
participation active des deux composantes mais
leurs analyses demeurent le plus souvent
descriptives. Pour obtenir une approche plus
fonctionnaliste nous partirons des travaux de
Vergnaud sur la
représentation.
Nous considérerons son analyse de la
notion de schème et de concept comme
particulièrement intéressante pour
constituer les bases de notre propre construction
théorique.>>(p.400)
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