Une autre vision
des disciplines
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Pour
approfondir
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La réalité n'est pas
discipllnaire, c'est notre esprit qui
crée ce découpage. Edgar
Morin nous invite constamment à
relier les connaissances entre elles,
à les "tisser"
ensemble.
Sructurés
par nos études disciplinaires,
celles-ci constituent souvent notre
identité et nous risquons de nous
enfermer en elles (Voir :Rosine),
alors que dans nos cours, il serait
profitable de montrer à nos
élèves les liens qui
existent entre les disciplines, entre les
divers aspects d'une même question
:.
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<<Les
disciplines devraient par ailleurs
être inscrites dans des «
objets » à la fois naturels et
culturels, comme le monde, la Terre, la
vie, l'humanité. Ils sont naturels
car ils sont perçus par chacun dans
leur globalité, et nous semblent
évidents. Or ces objets naturels
ont disparu de l'enseignement ; ils sont
actuellement morcelés et dissous
par les disciplines non seulement
physiques et chimiques, mais aussi
biologiques (puisque les disciplines
biologiques traitent de molécules,
de gènes, de comportements, etc.,
et rejettent comme inutile la notion
même de vie) ; de même, les
sciences humaines ont morcelé et
occulté l'humain en tant que tel,
et les théoriciens du
structuralisme ont même pensé
présomptueusement qu'il fallait
dissoudre la notion d'homme.Ces objets
naturels sont immédiatement
identifiables par tout adolescent.
>> E.M.p.14
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Une autre
approche des processus d'explication et de
compréhension
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Pour
approfondir
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Notre enseignement, en France, est
souvent déductif,
démonstratif et nous sommes souvent
étonnés par certaines
incompréhensions des
élèves. Nous avons
peut-être à repenser avec
Edgar Morin les notions d'explication et
de compréhension en faisant une
place plus grande à l'induction,
aux associations
d'idées,
à l'imaginaire,
à la créativité, en
créant des aller-retour
(boucles)
entre ce qui peut favoriser la
compréhension et ce qui
nécessite la démonstration.
Nous nous accrochons à la logique
classique mathématique qui pourtant
a aussi évolué (voir:
Une
nouvelle vision de la
logique
).
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<<L'explication
est un processus abstrait de
démonstrations logiquement
effectuées, à partir de
données objectives, en vertu de
nécessités causales
matérielles ou formelles et/ou en
vertu d'une adéquation à des
structures ou
modèles.
La compréhension se meut
principalement dans les sphères du
concret, de l'analogique, de l'intuition
globale, du subjectif. L'explication se
meut principalement dans les
sphères de l'abstrait, du logique,
de l'analytique, de
l'objectif.
La
compréhension comprend en vertu de
transferts projectifs/identificatifs.
L'explication explique en vertu de la
pertinence Iogico-empirique de ses
démonstrations.
Alors que comprendre est saisir
les significations existentielles d'une
situation ou d'un phénomène,
"expliquer, c'est situer un objet ou un
événement par rapport
à son origine ou mode de
production, ses parties ou composants
constitutifs, sa constitution, son
utilité, sa
finalité."(J. Schlanger)>>.
E.M. p. 149
Une
attention à la notion d'erreur et
d'illusion
Un enseignant qui s'efforce de
déconstruire les
représentations erronées des
élèves avant de faire un
cours tient compte du fait que
l'élève n'est pas une page
blanche sur laquelle il suffirait
d'inscrire des savoirs nouveaux, mais
qu'il a des "représentations" sur
toutes choses dans ce monde psychique
interne à l'élève:
(Voir: la
représentation selon Edgar
Morin)
<<L'éducation
doit donc se vouer à la
détection des sources d'erreur,
d'illusion et
d'aveuglements...L'importance du fantasme
et de l'imaginaire chez l'être
humain est inouïe ; étant
donné que les voies d'entrée
et de sortie du système
neuro-cérébral, qui mettent
en connexion l'organisme et le monde
extérieur, ne représentent
que 2 % de l'ensemble, alors que 98 %
concernent le fonctionnement
intérieur, il s'est
constitué un monde psychique
relativement indépendant, où
fermentent besoins, rêves,
désirs, idées, images,
fantasmes, et ce monde imprègne
notre vision ou conception du monde
extérieur... Ce qui permet la
distinction entre veille et rêve,
imaginaire et réel, subjectif et
objectif, c'est l'activité
rationnelle de l'esprit qui fait appel au
contrôle de l'environnement
(résistance physique du milieu au
désir et à l'imaginaire), au
contrôle de la pratique
(activité vérificatrice), au
contrôle de la culture
(référence au savoir
commun), au contrôle d'autrui
(est-ce que vous voyez la même chose
que moi ?), au contrôle cortical
(mémoire, opérations
logiques). Autrement dit, c'est la
rationalité qui est
correctrice.
La rationalité est le
meilleur garde-fou contre l'erreur et
l'illusion. D'une part, il y a la
rationalité constructive, qui
élabore des théories
cohérentes en vérifiant le
caractère logique de l'organisation
théorique, la compatibilité
entre les idées composant la
théorie, l'accord entre ses
assertions et les données
empiriques auxquelles elle s'applique; une
telle rationalité doit demeurer
ouverte à ce qui la conteste, sinon
elle se referme en doctrine et devient
rationalisation; d'autre part, il y a la
rationalité critique qui s'exerce
particulièrement sur les erreurs et
illusions des croyances, doctrines et
théories.
Mais la rationalité porte
aussi en son sein une possibilité
d'erreur et d'illusion quand elle se
pervertit, nous venons de l'indiquer, en
rationalisation. La rationalisation se
croit rationnelle parce qu'elle constitue
un système logique parfait,
fondé sur déduction ou
induction, mais elle se fonde sur des
bases mutilées ou fausses, et elle
se ferme à la contestation
d'arguments et à la
vérification empirique. La
rationalisation est close, la
rationalité est ouverte. La
rationalisation puise aux mêmes
sources que la rationalité, mais
elle constitue une des plus puissantes
sources d'erreurs et d'illusions. Ainsi,
une doctrine obéissant à un
modèle mécaniste et
déterministe pour considérer
le monde n'est pas rationnelle mais
rationalisatrice.>>Les 7 savoirs
p. 20, ss
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Un "cadre" dans
lequel insérer nos enseignements
(Les 7 savoirs
nécessaires...)
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Pour
approfondir
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1) Les
cécités de la connaissance
(les erreurs, la normalisation,
l'inattendu, l'incertitude...)
2) Les
principes d'une connaissance pertinente
(le contexte, le global, le
multidimentionel, le
complexe...)
3)
Enseigner la condition humaine
(enracinement, déracinement,
les boucles:
cerveau/esprit/culture...)
4)
Enseigner l'identité terrienne
(le legs du XX e
siécle, les nouveaux
périls, la conscience
terrienne...)
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5)
Affronter les incertitudes (
incertitudes historiques, de la
connaissance, du réél,..
boucles
risque/précaution...)
6)
Enseigner la compréhension
(obstacles à la
compréhension, l'esprit
réducteur, conscience de la
complexité humaine...)
7)
L'Ethique du genre humain
(démocratie et
complexité, la citoyenneté
terrestre, le destin planétaire...
)
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Une autre vision
de l'intelligence (L'intelligence de la
complexité)
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Pour
approfondir
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Notre vision de l'intelligence est
souvent simplificatrice, morcelée,
découpée. Les 'tests
d'intelligence" en sont un
exemple. Que voulons-nous dire quand
nous proclamons cet élève
"intelligent"? A-t-il de bons
résultats? A-t-il de nombreuses
compétences? Est-il apte à
"réussir" dans la vie? Ou ...nous
apporte-t-il des satisfactions?
Une autre façon de voir
serait de regarder son aptitude à
saisir la complexité des questions,
sa capacité à faire face
à l'imprévu, à mettre
en relation des aspects
éloignés. L'intelligence de
la complexité est une autre vision
de ce que nous pratiquons souvent dans
l'enseignement
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<<Complexité
: Définition usuelle
Ce n'est pas tant la
multiplicité des composants, ni
même la diversité de leurs
interrelations, qui caractérisent
la complexité d'un système :
tant qu'ils sont pratiquement et
exhaustivement dénombrables on sera
en présence d'un système
compliqué (ou
hypercompliqué), dont un
dénombrement combinatoire pourrait
permettre de décrire tous les
comportements possibles (et par là
de prédire son comportement
effectif à chaque instant
dès que la règle ou le
programme qui les régit est connue)
: en termes
mathématico-informatiques on dit
alors qu'on est en présence d'un
"problème
polynomial"...
C'est
l'imprévisibilité
potentielle (non calculable a priori) des
comportements de ce système,
liée en particulier à la
récursivité qui affecte le
fonctionnement de ses composants ("en
fonctionnant ils se transforment"),
suscitant des phénomènes
d'émergence certes intelligibles,
mais non toujours prévisibles. Les
comportements observés des
systèmes vivants et des
systèmes sociaux fournissent
d'innombrables exemples de cette
complexité. Pendant deux
siècles, la science positive a
semblé "baisser les bras" devant
ces phénomènes,
préférant ne vouloir
connaître que le "scientifiquement
prévisible" ou calculable, avant
que G. Bachelard ne lui rappelle "son
idéal de complexité" qui est
de rendre le merveilleux intelligible sans
le détruire. ... Edgar Morin,
à partir de 1977 ("La
Méthode", T. I) établira le
"Paradigme de la complexité" qui
assure désormais le cadre
conceptuel dans lequel peuvent se
développer nos exercices de
modélisation des
phénomènes que nous
percevons complexes ("point de vue") : une
complexité à la fois
organisée et, récursivement,
organisante. >> Petit
lexique des termes de la complexité
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Une façon
nouvelle d'aborder les problèmes de
l'enseignement
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Pour
approfondir
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La vision systémique de
l'enseignement que propose Edgar Morin
modifie considérablement notre
façon d'envisager
l'enseignement. Qu'il s'agisse de
l'élève vu dans sa
globalité comme un système
mais également en interaction avec
les autres systèmes l'entourant
(voir: Nouvelle
conception de la
personne)
. Qu'il s'agisse de l'établissement
où on constate que c'est le
sous-système le plus souple qui
exerce le plus d'influence sur le
système établissement. Qu'il
s'agisse des disciplines et des programmes
non plus vus comme un découpage
artificiel mais comme un complexe
c'est-à-dire comme un ensemble
d'éléments tissés les
uns avec les autres, entrelacés,
interférant les uns avec les
autres. L'interdisciplinarité
et les TPE prennent alors tout leur sens
et ne restent pas quelque chose en plus ou
à part. Ils sont centraux . Ce qui
est à apprendre c'est alors une
méthode et non un
programme:
|
<<Rien
n'est plus éloigné de notre
conception de la méthode que cette
vision composée d'un ensemble de
recettes efficaces pour la
réalisation d'un résultat
prévu. Cette idée-là
de la méthode présuppose son
résultat depuis le début ;
dans cette acception, méthode et
programme sont équivalents. Il se
peut que dans certaines situations il ne
soit pas utile d'aller au-delà de
l'exécution d'un programme, dont le
succès ne pourra pas être
exempt d'un relatif conditionnement par le
contexte dans lequel il se déroule.
Mais en réalité, les choses
ne sont pas aussi simples, pas même
lors de la préparation d'une
recette de cuisine, plus proche d'un
effort de recréation que de
l'application mécanique de
mélanges d'ingrédients et de
modes de cuisson.... Cependant, si nous
sommes dans le vrai lorsque nous affirmons
que la réalité change et se
transforme, une conception de la
méthode comme programme est plus
qu'insuffisante, car si face à des
situations changeantes et incertaines les
programmes ne sont pas très utiles,
la présence d'un sujet pensant et
stratège est en revanche
indispensable. Nous pouvons affirmer ceci
: dans des situations complexes,
c'est-à-dire là où
dans un même espace et dans un
même temps il y a non seulement de
l'ordre mais aussi du désordre,
là où il y a non seulement
des déterminismes mais aussi des
hasards, là où émerge
l'incertitude, il faut l'attitude
stratégique d'un sujet ; face
à l'ignorance et à la
confusion sa perplexité et sa
lucidité sont
indispensables.>>
p.16
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Une
éthique laïque
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Pour
approfondir
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A l'époque où les
religions reprennent une place importante
créant, parfois, des divisions et
oppositions Edgar Morin propose une
éthique laïque qui peut
rassembler. Pour lui "Tout regard sur
l'éthique doit percevoir que l'acte
moral est un acte individuel de reliance :
reliance avec un autrui, reliance avec une
communauté, reliance avec une
société et, à la
limite, reliance avec l'espèce
humaine." p. 16.
|
Mais pour lui nous avons ici comme
ailleurs dans tout ce qui est humain
à supporter l'incertitude dans la
relation entre intention et acte
"Même si l'intention morale
essaie d'envisager les conséquences
de ses actes, la difficulté de les
prévoir demeure. Comme tout ce qui
est humain, l'éthique doit
affronter des incertitudes. La devise
« L'enfer est pavé de bonnes
intentions » porte en elle la
conscience que les conséquences
d'un acte d'intention morale peuvent
être immorales. À l'inverse,
les conséquences d'un acte immoral
peuvent être morales.>>p.
40
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Une vision du
monde et de la mondialisation (Une
politique de civilisation)
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Pour
approfondir
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Enfin dans les questions que nous
nous posons au sujet de la mondialisation,
Edgar Morin apporte une vision qui n'est
pas entièrement négative ni
d'un positif euphorique. Il attire notre
attention sur le fait, qui devient de plus
en plus évident à beaucoup,
de savoir que nous sommes tous dans le
même bateau sur la même
planète Terre et que cela
entraîne des conséquences sur
nos attitudes. C'est encore à faire
découvrir, sentir à nos
élèves.
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<<Aujourd'hui,
on isole les problèmes du
chômage, de l'emploi, de l'exclusion
hors de leur contexte et on prétend
les traiter à partir d'une logique
économique close. Il faut au
contraire les considérer au sein
d'une grande problématique de
société et partir des
besoins de civilisation qui,
d'eux-mêmes, exigent de nouveaux
emplois. Il ne suffit pas de partir d'un
« social » qui mettrait entre
parenthèse le
civilisationnel....Enfin, si nous partons
des problèmes français, nous
ne devons oublier ni leur
singularité, ni leur
généralité : les
problèmes fondamentaux de
civilisation qui affectent la France sont
aussi ceux de l'Europe et, plus largement,
ce sont les problèmes qui, dans le
monde, se trouvent posés partout
où il y a eu «
développement »
c'est-à-dire développement
de notre civilisation , et ils se
poseront tôt ou tard partout
où on est « en cours de
développement ». p.
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