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Problèmes et évolution de la formation des publics illettrés

Extrait d'un mémoire de Marie Liesse Nimier  

             Le 3 janvier 2008, une circulaire de la Délégation Générale à l'Emploi et à la Formation Professionnelle (DGEFP) a été transmise aux Préfets de région et aux Directions Régionales du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle (DRTEFP). Cette circulaire a pour objet de définir les orientations générales de la politique du Ministère de l'économie, des finances et de l'emploi en faveur de l'accès aux compétences clés pour une insertion durable dans l'emploi. L'action du Ministère se recentre donc sur les individus dont le projet d'activité professionnelle rend nécessaire la maîtrise de ces compétences, en l'occurrence les personnes particulièrement fragilisées et notamment celles en situation d'illettrisme.

 

             En effet, c'est parce que les entreprises font face à une concurrence de plus en plus forte pour répondre aux objectifs de compétitivité mondiale que le marché de l'emploi devient de plus en plus sélectif. En conséquence, le niveau général de formation s'élève et accentue davantage les inégalités d'accès à l'emploi pour les publics ne possédant pas la maîtrise des savoirs de base. Le risque alors, est une forte augmentation de l'exclusion.

             La circulaire indique : " La maîtrise des savoirs de base et l'acquisition des compétences clés constituent donc un enjeu majeur en termes de sécurisation des parcours professionnels, d'insertion ou de maintien dans l'emploi et d'accès à une formation qualifiante ".

             Il s'agit pour le ministère en charge de l'emploi, dans le cadre d'une définition des orientations nationales en faveur de l'accès aux compétences clés pour une meilleure insertion professionnelle, de rendre plus lisibles et plus efficients les outils existants, notamment au travers de trois axes :

1 La délimitation du champ des bénéficiaires au profit des personnes inscrites dans un projet d'insertion professionnelle, ne maîtrisant pas les compétences clés et désirant accéder à un emploi de premier niveau de qualification.

2 Le recentrage sur les formations visant la maîtrise des compétences clés et accompagnant le projet d'insertion professionnelle.

3 La rénovation de l'offre de services en faveur de la maîtrise des compétences clés .

 

             L'orientation de cette circulaire met en avant certaines préoccupations qui rejoignent celles issues d'un groupe de travail constitué à la demande de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Ce groupe, qui rassemblait l'Etat, les régions et les partenaires sociaux, s'est réuni de mars à juin 2008 sous la présidence de Pierre Ferracci, avec pour mission l'étude du système français de formation professionnelle. Les débats du groupe ont favorisé progressivement l'émergence d'un point de vue collectif sur les principes qui doivent guider une réforme de la formation professionnelle.

             Sans retracer l'exhaustivité du travail de ce groupe, nous retiendrons du rapport Ferracci, les constats et réflexions qui nous paraissent aller dans le même sens que la circulaire ou qui en approfondissent son contenu et notamment :

 

L'impact de la mondialisation

" …la structure économique nationale a changé ces trente dernières années, en réponse aux modes d'ouverture à la concurrence internationale en impactant les contenus du travail… "

 

La défaillance de la formation actuelle pour certains publics

" … si le système actuel prenait en charge de façon relativement efficace les personnes les mieux formées, il semblait en revanche défaillant pour celles sorties du système éducatif sans diplôme, sans connaissances de base suffisantes ou ayant rencontré des incidents de parcours… "

 

Le manque de qualité et de lisibilité sur l'offre de formation

" … nécessitait de s'interroger sur les moyens d'améliorer l'efficacité et l'efficience de l'offre de formation, qui apparaît très dispersée, multiple, segmentée… "

 

L'inégalité d'accès à la formation et de sécurisation des parcours

" … une approche de la formation professionnelle par les " statuts " du " formé " a mis en évidence ses limites. Si certaines personnes relèvent de cibles clairement identifiées… d'autres personnes peuvent ne pas bénéficier de l'accompagnement ou de l'offre de formation qui leur permettrait une entrée, un maintien ou un retour dans l'emploi… "

 

             A ces premiers éléments contextuels autour de la formation professionnelle vient s'ajouter, dans une situation de crise financière mondiale, une Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) qui doit permettre, tout en réformant l'Etat, la baisse des dépenses publiques. Cette révision générale des politiques publiques " …vise également à documenter des pistes d'évolution pour six grandes politiques d'intervention, ne relevant pas uniquement de l'État. Il s'agit, entre autres, de l'emploi et de la formation professionnelle... "

             La recherche d'une meilleure efficacité en formation et les restrictions budgétaires actuellement en cours sont peut être les indicateurs de l'arrivée, sur le devant de la scène, de la notion d'efficience dans le champ de la formation professionnelle.

 

Dans un bref rappel historique, rappelons que dans les années 1950, la question de la formation était vue davantage sous l'angle du " recyclage " notamment dans cette période de reconstruction d'après guerre et de pénurie de main d'œuvre. La concurrence entre organismes de formation était faible et on prétendait pouvoir faire si on avait suffisamment de moyens. Ainsi, les moyens contraignaient l'atteinte des objectifs. A partir des années 1970, la contribution des entreprises à l'effort de formation a développé l'idée de formation professionnelle continue et la concurrence entre organismes s'est accentuée au fil du temps. Les résultats obtenus définissaient le degré d'efficacité d'une formation. On cherchait à obtenir des résultats conformes ou supérieurs aux objectifs fixés. Dans un avenir très proche, comme le témoignent les différents éléments du contexte cités ci-avant et dans un environnement concurrentiel très fort, les résultats d'une formation avec des moyens réduits témoigneront de son efficience. On parlera alors d'optimisation des résultats.

 

Cette tendance et les évolutions qu'elle entraîne nécessairement vont avoir un impact certain sur les associations et organismes de formation.

             En effet, depuis plusieurs années, l'intervention du Ministère chargé de l'emploi et de la formation professionnelle repose en partie sur le dispositif APP (Atelier de Pédagogie Personnalisée qui propose des formations de type remise à niveau dans différentes disciplines) et sur le programme IRILL (Insertion, RéInsertion, Lutte contre L'illettrisme) ; programme qui finance le dispositif de formation de base en direction des personnes en situation d'illettrisme. En Champagne-Ardenne, ce dispositif est l'AFB (Atelier de Formation de Base). Dans cette région, les GRETA et plusieurs autres associations se sont vu régulièrement confier la mise en œuvre de ces dispositifs sur les différents territoires avec une reconduction sous la forme de conventionnement annuel ou tri-annuel.

Aujourd'hui, il est question de la disparition de ces deux dispositifs, l'AFB et l'APP, au profit d'un dispositif de formations aux compétences clés , celui dont il est fait mention dans la circulaire DGEFP. De plus, un marché public sous la forme d'un appel d'offres se profile à l'horizon (fin de l'année 2009). C'est peu dire que de mentionner les nombreuses inquiétudes qui s'expriment chez l'ensemble des acteurs concernés.

 

             On peut citer, à cet égard, les enjeux pour certaines associations. En effet, la perte d'une action (l'AFB) représente une perte de financement. C'est une source d'insécurité étroitement liée à la question des postes de travail et donc au maintien des emplois. Se positionner sur un marché concurrentiel et répondre au prochain appel d'offres qui vise la mise en place, sur les territoires de la région d'un nouveau dispositif de formation dont l'objectif s'oriente vers l'acquisition de compétences clés représentent, par conséquent, un enjeu stratégique.

 

De surcroît, c'est une démarche qui ne va pas de soi car elle provoque des interrogations.

             Par exemple, de quoi s'agit-il quand on parle de lutte contre l'illettrisme et de développement des compétences clés ? D'une nouvelle terminologie ou d'un nouveau paradigme ? En effet, différentes catégories de publics dits " en difficulté " coexistent depuis plusieurs années et ont amené les organismes de formation à construire des réponses formation en termes de cours de " FLE " (Français Langue Etrangère), de " FLS " (Français Langue Seconde) , d' " alphabétisation " , de " postalphabétisation ", de " lutte contre l'illettrisme ", de " RAN " (Remise à Niveau) et d'autres encore.

Malgré cette catégorisation des actions, la distinction entre les publics est restée floue et les groupes en formation avaient tendance à rassembler, en même temps, des personnes aux profils et aux besoins différents. Là où les objectifs de formation et les pédagogies mises en œuvre auraient mérité d'être différenciés, c'est davantage leur standardisation qui a pris le dessus.

 

             Est-il possible finalement, de s'éloigner progressivement de ce cloisonnement d'actions ou de publics pour entrer dans une démarche de développement des compétences ? Existe-t-il une ingénierie pédagogique plus favorable qu'une autre au développement de compétences clés pour les publics en situation d'illettrisme ?

             La question n'est pas anodine car dans le milieu de la formation subsistent encore de nombreux dispositifs et pratiques pédagogiques qui mettent l'accent sur une approche disciplinaire des contenus de formation.

Or, penser la formation en termes de compétences nécessite de transversaliser les contenus de formation, de créer du lien, et non de les découper en éléments de savoirs isolés.

 

 

Voir également:

Dossier illettrisme

http://www.illettrisme-ressources.com/index.html

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<< Je cite : "c'est parce que les entreprises font face à une concurrence de plus en plus forte pour répondre aux objectifs de compétitivité mondiale que le marché de l'emploi devient de plus en plus sélectif. En conséquence, le niveau général de formation s'élève et accentue davantage les inégalités d'accès à l'emploi pour les publics ne possédant pas la maîtrise des savoirs de base. Le risque alors, est une forte augmentation de l'exclusion." Ce n'est pas sans poser plusieurs questions. Doit-on former les gens à ce que désirent les chefs d'entreprise ou à ce dont les entreprises ont besoin ? Doit-on former les gens pour les entreprises ou pour la société ? Entreprise et société, qui devrait être au service de l'autre ? L'une peut-elle aller sans l'autre ? Est-ce une servitude ou une symbiose ? L'entreprise est-elle une société en miniature ? La société est-elle une humanité en miniature ? Peut-on penser à un modèle pour les entreprises qui repose sur des conceptions opposées à celles que l'on souhaite pour l'humanité ?>>

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