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Le facteur humain

Billet d'humeur

             Une convention de l'U.M.P. sur l'école propose de construire une école sur les principes d'autonomie et de liberté. Qui ne pourrait souscrire à de pareils principes? Qui n'a pas envie d'être autonome et d'être libre? N'est-ce pas ce que nous cherchons à faire avec nos élèves: les rendre autonomes et libres?                         Seulement voilà on pourrait aussi bien proposer une école sur les principes de solidarité et de travail d'équipe. Solidarité des enseignants dans l'établissement, dans le travail d'éducation entre parents et enseignants; travail d'équipe dans les classes, entre enseignants.

             Autrement dit la difficulté n'est pas dans les principes, on peut toujours en trouver, ...et au besoin s'appuyer dessus jusqu'à ce qu'ils cèdent!

             La difficulté est dans la complexité de la réalité et dans la conciliation des principes. S'appuyer sur un seul principe c'est aller vers l'homme unidimensionnel, (la médicalisation des phénomènes psychiques en est un exemple, la réduction à une méthode unique de lecture en est un autre; le panégirique des neurosciences, comme seules sciences, faite par le Ministre couronne le tout!); la condition humaine est au contraire de trouver des compromis entre les principes: Autonomie mais aussi solidarité, liberté mais aussi responsabilité, cerveau mais aussi culture. Et dans chaque situation particulière la solution n'est pas évidente. 

             Qui n'était pour le principe de la liberté d'expression dans le cas des dessins de Mahomet? Mais il y avait aussi le principe du respect des autres opinions et de la responsabilité des effets produits; soit la différence entre l'éthique de la conviction et l'éthique de la responsabilité; d'où une situation complexe.

             Qui n'était pour la laïcité dans les établissements, mais la liberté de porter ou non le voile existait également. La solution trouvée paraît satisfaisante à première vue mais certains effets (la naissance d'un deuxième lycée musulman à Lyon, par ex...) ne vont-ils pas à la longue montrer que la situation était peut-être plus complexe qu'il n'y paraissait?

             Dans une situation donnée il y a toujours plusieurs principes sur lesquels s'appuyer mais nous avons à les hiérarchiser, les concilier et trouver une réponse concrète. Or la tentation, souvent, est de se battre pour un seul principe, au risque d'oublier les autres. Nous avons tellement de plaisir à nous battre, à polémiquer sur des principes, des idées (et j'en sais personnellement quelque chose!) alors que dans d'autres pays on préfère souvent s'atteler ensemble à la recherche d'une solution à chaque problème concret. La culture de la négociation ne paraît pas le fort des français, l'école pourrait être un lieu où l'apprendre!

             Ce goût pour les principes nous amène souvent à construire des grilles, des procédures qui sont bien souvent autant de moyens d'échapper à la rencontre avec l'autre et à la recherche d'une solution commune. Par exemple, comparer une moyenne à 10 pour orienter un élève plutot que de trouver dans le temps, par des échanges avec les parents et l'élève, une proposition pour son avenir; faire un barème précis et quasi obsessionnel pour échapper à toute contestation lors d'un entretien avec l'élève ou un parent.

             Un autre exemple: dans le procès d'Outreau, c'est le juge des libertés qui assure ne pas avoir le droit de poser de nouvelles questions aux inculpés présents devant lui pour ne s'en tenir (à cause de la procédure) qu'aux seuls papiers en sa possession! N'est-ce pas l'exemple ultime d'une organisation légalisée afin qu'il n'y ait pas de "rencontre" des personnes.

             Derrière ces questions se trouve souvent la non prise en compte du "facteur humain" dans les décisions mais également dans le "choix des personnes", comme l'écrit Laurent Greilsamer dans Le Monde du 14/2/06 <<La question pourrait se résumer simplement : sur quels critères sélectionne-t-on les juges ? La meilleure réponse serait la suivante : sur le bon sens, la capacité d'écoute, l'équilibre personnel, l'expérience. Malheureusement, aucun de ces critères n'est réellement retenu. Pour entrer à l'Ecole nationale de la magistrature (ENM), il faut ingurgiter du droit et encore du droit. Le tout arrosé de "culture générale". La sélection est à ce prix. >> (voir plus bas le lien)

             Et comme il le dit également, ce n'est pas un cas isolé <<La médecine offre même un cas de plus grande ampleur>> et enfin en ce qui nous concerne plus particulièrement: <<L'Université continue de former de brillants professeurs, capésiens et agrégés, et de les envoyer enseigner à des classes nerveuses et indisciplinées. S'est-on soucié d'évaluer leur capacité à parler en public, leur autorité naturelle au début de leurs études? Non. S'est-on employé à leur apprendre à gérer un groupe, une crise ? Non plus. A ce stade, il ne s'agit plus d'inconscience, mais de bêtise.>>.

             Sait-on que certains Polytechniciens font actuellement un stage de 7 à 8 mois parfois dans les ZEP et que ce stage est jugé sur "l'ardeur au travail, l'esprit d'équipe, le sens des responsabiltés, la pratique de l'autorité". (Le Monde 23/2/06). Ce qui est bon pour de futurs ingénieurs ne serait-il pas utile pour de futurs enseignants?

             Bien sûr nous avons besoin de sécurité dans ce monde incertain où tout parait nous échapper . Mais ce monde évolue diablement vite.

 

             Ne serait-il pas urgent de sortir de nos querelles franco-françaises pour regarder un peu autour de nous ce que font les autres et nous atteler à régler par la négociation les problèmes concrets qui se posent à nous, en attachant une importance primordiale aux facteurs humains?

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<<Voici un billet d’humeur fort intéressant tant sont larges les axes de réflexion et les thèmes traités. Il y a beaucoup d’éléments très pertinents dans chacun des cas cités mais je n’ai pas assez de place pour compléter certains propos que j’approuve car ils s’appuient sur des critères de bon sens. Sortir des querelles franco-françaises suppose d’une part d’accepter de regarder avec bienveillance ce qu’il se passe ailleurs sans complexe de supériorité et d’autre part de renoncer à ce que notre système de références soit fondé sur un idéal de rivalité permanente et sur l’utilitarisme. L’être chosifié, numéroté, anonymisé, réduit à un bras utile n’est pas la preuve du respect de l’une de nos valeurs fondamentales: l’égalité. Ceux qui prétendent être notre élite oublient trop souvent leurs propres origines et le bienfait de la modestie. Ce sont eux qui ont pensé depuis fort longtemps ce système inégalitaire et inadapté aux évolutions de notre temps. Tout le monde sait que régler des problèmes concrets par la négociation est une nécessité et un principe de vie civilisé mais, ceux qui ont le pouvoir ou les moyens d’agir, préfèrent pour des raisons personnelles ou pour des raisons de profits, des intérêts qui divergent de cette évidence. Il se trouve qu’aujourd’hui, les forces vives ne suivent plus simplement un chef, elles s’engagent personnellement dans les tissus associatifs et professionnels situés à plusieurs échelles, elles ne sont plus menées avec une baguette. D’où ce paradoxe entre notre prétendue élite qui entend décider à notre place et les forces vives qui ne se laissent pas dicter des règles idiotes adossées à un nom pour laisser une trace dans l’histoire. Par ailleurs, à une époque où le facteur humain bien qu’indispensable soit le parent pauvre de nos grands actionnaires, il est bon de lire qu’il est en effet d’une importance primordiale. Ce monde post-industriel ne comprend plus l’époque, ses décideurs admettent l’esclavage de la main-d’oeuvre restante ou bien la robotisation pour réduire le poids des salaires. Ce système sans âme, contre-productif, spéculatif et irresponsable se propulse tout seul contre un mur énorme. Il est bon de rêver à d’autres possibles, de constater que tout le monde ne rame pas sur le même bateau et voudrait vivre autrement. Mais voilà peut-on guérir de la sottise? >>

<<Je suis Marocaine, je m'appelle Soumia, je suis récemment inscrite en DOCTORAT à l'école Mohammadia d'Ingénieurs «EMI». J'ai lu un petit peu ce que vous avez écrit dans le domaine du facteur humain et j'ai beaucoup apprécier ce que vous avez écrit et ça m'intéresse beaucoup de savoir plus, tant que mon sujet de DSA s'intitule : Contribution à l'amélioration continue de la sécurité industrielle compte tenue des progrès techniques et scientifiques. Et je vais étudier le facteur humain comme étant le principale facteur de risque.>>

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