Marie-François
Bonicel a effectué une conférence le
25/3/06 à l'occasion de la journée
sur l'évaluation de l'AFPS de
Lorraine. Elle a accepté, ainsi que
l'AFPS, que cette conférence soit mise sur
ce site. Je les en remercie.
L'exact pris pour
le vrai ! la plus grande
méprise
Victor Hugo
Il
me semble que dans mes
plus lointains souvenirs, je devais porter à
l'égard de l'évaluation une certaine
suspicion. Mon enfance me laisse des traces de ma
perplexité d'alors face aux images
évocatrices de la pesée des
âmes. Le jour du grand soir celles-ci
devaient être dirigées vers les lieux
adaptés : Paradis ou Enfer, sans compter ces
inquiétantes zones grises que constituaient
le Purgatoire et les Limbes. Enfant, je pressentais
déjà que ce dispositif
répondait plus au confort des parents et des
éducateurs qu'aux visées d'un Dieu,
que l'on prétendait par ailleurs
bienveillant et indulgent.
Pour
avoir commis il y a dix ans un chapitre dans un
ouvrage collectif sur l'Evaluation , livre
austère que je n'aurais jamais lu si je n'y
avais pas écris un texte d'humeur sur La
relation inspecteur/inspecté,
j'ai été imprudemment
sollicitée pour participer à cette
stimulante et pertinente journée. Mais plus
de 3000 ouvrages de langue française sont
parus entre-temps, ces 10 dernières
années sur ce thème, et je me suis
demandée ce que nous pouvions bien y
ajouter.
J'ai
eu l'inconscience d'aller dans la foulée,
naviguer sur le NET afin d'actualiser ma
réflexion sur ce thème. Entreprise
téméraire : il n'est pas un champ
de la société qui ne soit soumis
avant, pendant et après à des
instruments de mesure de plus en plus
sophistiqués. J'ai voyagé dans
des cohortes de rapports, tableaux et statistiques
qui ont sans doute mobilisé de fantastiques
moyens financiers et humains. Peut-être pour
une préparation à l'action ? ais - je
pensé .retrouvant en moi le vent
optimiste soufflant dans les années
cybernétiques qui ont marqué ma
jeunesse et dont les pionniers comme
l'américain Norbert Wiener ou le
français Louis Couffignal croyaient en "
l'art de rendre l'action efficace ", par le
contrôle de l'information .
Entre
le moment de mon accord imprudent
l'été dernier et ce jour où il
convient de mettre en forme quelques idées ,
l'actualité s'est chargée .Les
épidémies SIDA, vache folle et sang
contaminé ont été
relayées par la grippe aviaire et le
chikungunya , réactivant les vieilles peurs
moyenâgeuses. Les enquêtes
de l'INSERM sur les
petits délinquants
génétiquement programmés et
scientifiquement repérables, les
statistiques sur l'état du clergé ou
des finances de l'Eglise, la collecte des
données sur les incidents antisémites
ou la délinquance routière,
engendrent une réactivité et une
agitation chargées d'angoisse, tandis que
les projections sur l'avenir de l'eau, la couche
d'ozone ou la fonte de la banquise semblent plomber
notre avenir et en tous cas notre moral. Sans
compter les évaluations de la Cour des
Comptes toujours déprimantes pour l'image de
notre fonction publique.
En
refusant de " compter ", mais en fonctionnant
à l'intuition, j'ai le sentiment que les
évaluations pessimistes sont globalement
plus nombreuses que les optimistes, comme si
l'objectif inavoué était de tester
notre capacité à malmener
l'espérance, fut elle laïque,
chère à Umberto Eco.
Affronter
la question de l'évaluation, c'est se
risquer dans un maquis où les
idéologies bien malmenées au cours
des décennies, trouvent là l'occasion
de reconstituer des îlots d'affrontements. En
citant le poète Hugo, j'ai d'ailleurs bien
conscience d'aller me positionner moi aussi sur
l'une de ces polarités.
Dans une
époque où " la culture de
résultats " tente de
répondre aux incertitudes du futur,
la " frénésie
quantitative " parait apporter
transparence et objectivité, comme
une parade - illusoire - à
l'incertitude et à l'arbitraire. De
la psychothérapie au management,
quels chemins trouver entre l'apologie du
relatif chargé de pensée
magique et la prétention
totalitaire à tout maîtriser
qui confond allègrement les
évaluations d'objets, de processus
ou de personnes ?
L'évaluation,
quelque soit le champ où elle se met en
place, se déploie, nous allons le voir
à travers quelques exemples, sur les trois
registres des enjeux, des moyens et des
résultats, logiquement en interaction
dynamique. Les enjeux mêmes chargés
d'interrogation éthique, ne peuvent
être en effet détachés du poids
de l'action et de l'expérience. Ces trois
registres qui sont des constructions sociales,
révèlent en " creux "
l'imaginaire
sur lequel repose la société qui les
élabore et les différents courants
qui la traversent, notamment
socio-économiques.
Voyages
kaléidoscopiques dans les évaluations
ordinaires
"Les grilles
font toujours des prisonniers, que ce soit dans les
prisons ou dans les idées" !
Henri Laborit,
biologiste
Dans
cette forêt, j'ai choisi de façon
très sélective et subjective,
quelques champs d'observation qui ont plus
particulièrement émergé ces
derniers temps dans l'actualité ou dans mon
environnement personnel en lien avec ce
thème.
La
qualité, une fin ou un moyen
?
Après
un détachement dans le cadre d'une
mobilité professionnelle, j'ai
réinvesti un poste innovant en formation
continue dans ma structure universitaire. Las ! La
qualification du service en normes de
qualité ISOO 9001 intervenue entre temps,
m'a plongée dans un maquis de tableaux,
normes, indicateurs qui pétrifient mes
initiatives. Avec la mauvaise foi qui me
caractérise dans ces moments là, ces
mesures me semblent devoir autopsier par avance les
projets rêvés. L'audit régulier
sur mes pratiques réactive mes
culpabilités d'enfant : " quoi, avec qui,
combien de fois, par pensées, par action et
par omission ".
Des
tableaux de satisfaction des clients - les
étudiants- produisent des résultats,
censés signifier la qualité de ma
prestation. Avec une précision de 9 chiffres
après la virgule. Alors qu'un
délicieux courrier d'une ancienne
étudiante me disait " je ne sais plus ce
que vous nous avez enseigné mais vous
m'avez appris à vivre. " Mon ego vibre
plus volontiers, je l'avoue, à la seconde
formulation qu'aux 9 chiffres après la
virgule qui me donnent le vertige. Ces deux
extrêmes étant évidemment sans
signification réelle de toutes
façons.
Il
n'est pas question ici d'entrer dans le
foisonnement des évaluations
utilisées dans les entreprises pour
apprécier la production, les
résultats, les stocks, les accidents ou le
respect de la sécurité,
légitimes et constituant de précieux
outils de pilotage. Simplement, dans mes
activités de consultante, coach et
formatrice en entreprise, j'ai été
amenée autour de la conduite du changement,
à observer les dérives des
systèmes d'évaluation des personnes
où les individus, y compris dans de grands
groupes internationaux où charte
éthique, respect des personnes et
obligations de résultats paraissent
cohabiter en bonne intelligence.
Il y a en effet
une perversité dans le triptyque
séduisant " autonomie ", "
responsabilisation ", "
évaluation ",car les
outils d'évaluation, et notamment
d'autoévaluation, engendrent un
stress permanent par
l'intériorisation des contraintes.
C'est à un véritable
double-bind que sont soumises les
personnes, notamment les plus
vulnérables, placées en
situations de responsabilité
plutôt que de soumission, mais "
devant se conformer aux normes strictes
de performances. "
La santé
entre risques et résultats
En
ces temps de suspicion, il n'est pas un poulet ou
un agneau qui ne soit sommé de fournir son
arbre généalogique et ses armoiries
avant d'être immolé : la
tracabilité et ses principes de
précaution associés se
déploient là entre évaluation
de la psychose sociale et celle des risques
sanitaires réels, mais plus probablement
plus encore vers une évaluation des
risques politiques, en France, à
échéance 2007 !
Les
circonstances de la vie m'ont amenée
à fréquenter assidûment ces
dernières années, cliniques et
hôpitaux à la fois comme patiente et
comme professionnelle de la formation et du
coaching. Fréquemment, des classifications
des cliniques et hôpitaux, sont
proposées, élaborées en
fonction de performances supposées.
Supposées, car il y a plus de chance de
trépasser dans un service de cardiologie
lourde que dans celui qui enchaîne des actes
très nombreux et sans risques vitaux
d'opération du canal carpien.
Une
évaluation des mêmes structures a
privilégié la présentation
chiffrée des mesures mises en place pour
lutter contre les maladies nosocomiales. Mais
cette dernière n'indique pas si elles sont
appliquées et encore moins si elles sont
efficaces. Il sera intéressant
l'année suivante de comparer ces trois
classements pour que le client n'ait pas à
choisir entre la mort sous un bistouri distrait ou
par un staphylocoque non
maîtrisé.
La
charte du patient hospitalisé lui donne
accès dans la plupart des services à
la garantie d'un traitement anti-douleur qui suit
généralement une
auto-évaluation, appréciée de
un à dix sur une échelle
théoriquement objective. C'est un grand
progrès mais nous savons combien cette
tentative peut être engloutie dans le
sentiment très subjectif d'envahissement par
la souffrance, notamment quand l'analgésique
proposé est donné
mécaniquement sans accompagnement
humain.
Enfin,
de savantes statistiques on été
établies pour calculer les DMS du secteur
hospitalier : " La durée moyenne de
séjour est obtenue en divisant le nombre de
jours passés à l'hôpital
(depuis la date d'admission dans un
établissement de soins hospitaliers) par le
nombre de sorties (décès compris)
pendant l'année ". L'analyse
économique, légitime par ailleurs,
est elle pertinente si après avoir
opéré ce calcul par catégorie
de pathologies, on opère une moyenne qui
globalise les interventions de la cataracte
à la journée et les morts rapides ?
Comme le faisait remarquer le commentateur, un
établissement efficace est celui qui
privilégie les cataractes, les canaux
carpiens et les morts rapides.
La
société en chiffres
Une
volumineuse étude devait estimer le taux de
mortalité survenue dans l'année
suivant la sortie de la prison de Fresnes : "
cet indicateur, avec le taux de
récidives, apparaît comme le plus
caractéristique du niveau d'autonomie
sanitaire et sociale des ex-détenus "
dit le rapport. de 2003. Quel usage fera t'on de ce
rapport ? Servira t'il à montrer que
finalement, on meurt plus dehors que dedans et donc
que les longues peines sont
préférables pour la
sécurité des
incarcérés? Ou bien, que l'on peut
survivre avec de la bonne volonté aux
conditions de vie des prisons inhumaines
?
Qu'évalue
le guide Michelin en distribuant ses
étoiles, portant au pinacle certains chefs,
en poussant d'autres au bord du gouffre ? Le chef
de chez Lucas -Carton a récemment voulu
éteindre ses étoiles pour être
libre de cuisiner des sardines. Il en a
profité pour diminuer ses prix et remplir
ses tables midi et soir, mais en est il moins
talentueux ?
L'éducation
dans l'ère du " benchmarking
"
Nous
ne sommes pas encore en France dans une culture de
l'évaluation dans le secteur
éducatif,contrairement
à d'autres pays européens comme
l'Espagne ou la Grande-Bretagne, le Canada, Les
Etats-Unis ou la Nouvelle-Zélande où
ces modèles de marché se sont
étendus largement au système
éducatif ; ; la recherche des bonnes
pratiques, le " benchmarking ", sont monnaie
courante. Les écoles y sont notées ;
cotées comme sur une place qui pourrait
s'apparenter à une place boursière.
Ces notes conditionnent à leur tour la
manière dont les sponsors vont participer au
financement des établissements. Pour les
apprenants (à l'école ou en formation
continue), la notation est permanente : chaque
acquis cognitif est mesuré, chaque
performance consignée. Les enseignants sont
eux aussi, évalués par les
élèves ou les étudiants et la
hiérarchie.
En
France l'exemple est venu des grandes écoles
et tente de s'installer avec beaucoup de
résistance dans l'ensemble du
système. Je ne m'étendrai pas sur ce
thème présenté par d'autres
dans ce colloque.
L'incommensurable
revendiqué
"
Misérable est l'amour qui se laisserait
mesurer " écrivait Shakespeare Le
sentiment amoureux échapperait il à
la malédiction de l'évaluation ? Ce
n'est pas si sûr si l'on en juge les
rapports chiffrés sur les pratiques
sexuelles ou sur la durée de vie des couples
qui mettent en perspective les statistiques et les
programmes immobiliers adaptés aux
célibataires redevenus et aux familles
recomposées susceptibles de se
reloger.
Mais
l'amour en chiffres, cela ne date pas d'aujourd'hui
puisque le rapport Kinsey date des années
1947. En examinant comme il le faisait pour les
hannetons et avec un regard dépourvu de tout
jugement de valeur les différents modes de
sexualité, il constitue la première
description de la vie sexuelle des
Américains. Cette recherche d' Alfred Kinsey
- un exploit compte tenu de l'activité
principale de ce chercheur en zoologie- a
modestement aidé au progrès du
dialogue et de l'information sur la
sexualité mais fut surtout perçu
comme une " véritable bombe atomique
sociale ". Il a en effet amené à
une déculpabilisation collective et
individuelle : " les autres font comme moi "
!
Mais
il a ouvert malgré lui une autre ère
à la perspective sexuelle qui coincïde
à cette période avec une baisse de
l'influence religieuse et une augmentation de la
place du progrès de la science
médicale dans la société
américaine.
Il ne s'agit plus
dans la sexualité d'opposer le
permis à l'interdit, le moral
à l'immoral mais le
dysfonctionnement au bon fonctionnement
organique. Les moralistes d'hier et
les confesseurs codifiant les
pénitences associées aux
errances de la chair, ont
été remplacés par les
hommes en blanc qui avec leurs instruments
de mesure définissent
désormais tristement la bonne
santé sexuelle.
L'incommensurable
débattu ?
Les
mois passés, l'actualité a
été marquée par les
débats violents autour de la loi Accoyer
avec l'évaluation des psychothérapies
et la réglementation de la profession. Mais
de quoi parles t'on ? D'évaluer des
psychothérapeutes, des effets
thérapeutiques ou des psychothérapies
elles-mêmes ? Dans les familles
psychanalytiques, certains courants ont
rappelé que la psychanalyse n'avait pas pour
but de guérir et qu'il n' y avait donc pas
lieu d'en évaluer les effets.
" La notion
d'évaluation des psychothérapies
telle qu'elle nous est concoctée par voie
législative, procède plus, à
l'évidence, d'une idéologie
réductionniste, objectivante, voire
eugénique et, en tous cas, économique
de type néo-libérale articulée
à la loi du marché, que d'un trop
simplement généreux souci de
sécurité sanitaire anti-sectaire
" affirme Paul Lacaze, psychiatre et psychanalyste.
Pour
le psychanalyste Juan David Nasio, la
guérison est un idéal qui oriente,
non une idée fixe mais il se risque
cependant à proposer trois critères
de guérison en écho à sa
définition: " Guérir, c'est porter
un regard neuf sur soi-même.
"
: supprimer ou diminuer les symptômes qui ont
amené à consulter, si possible,
déraciner la maladie qui a conduit à
ces symptômes, obtenir qu'à la fin de
son analyse, le patient se vive
différemment.
Et lui aussi bien
éloigné d'une médicalisation
de l'existence, le psychanalyste André Green
déclare pourtant : " oui, il faut
évaluer la psychanalyse comme traitement
" .
Nous avons vu
comment ce projet avait provoqué
violences, clivages, jeux d'alliances aux
antipodes du lien social, plus proches du
débat pour l'avoir que pour
l'être, naviguant entre l'apologie
du relatif chargé de pensée
magique et la prétention
totalitaire à tout
maîtriser.
L'incommensurable
détourné
Exotique
à souhait, le BNB ou Bonheur national brut,
m'a tout d'abord réjoui par sa formulation
iconoclaste. Comment cet indice nourri de
réflexion sur la notion de qualité de
vie avait il pu germer dans l'esprit de quelques
" pelleteux de nuage " comme on dit au
Canada , pour s'opposer au PIB, indicateur
traditionnel qui constitue l'indice du
progrès d'une nation ? Né au Bothan,
dans ce petit royaume de L'Himalaya coincé
entre Chine et Inde, ce concept visait à
réhabiliter d'autres critères de
qualité de vie que la seule richesse
matérielle. En 2005, une conférence
internationale sur le bonheur " Repenser le
développement ", en Nouvelle-Ecosse a
défini 22 critères qui constituent un
indice de progrès véritable (par ex.
le bénévolat, les émissions de
gaz à effet de serre, l'accès
à l'éducation etc.)
Mais
si ces critères constituent
évidemment des indices de bien-être
complémentaires du PIB d'une nation, en
faire un indice du Bonheur, c'est entrer là
aussi dans une quantification
illusoire.
Martin Heidegger, grand
questeur du vrai derrière l'exact, voit
pourtant dans ce danger même la source de
l'espoir en citant son poète
préféré :
Mais là
où il y a danger, là aussi
croît ce qui sauve.
(Hölderlin)
Une
évaluation créatrice de liens
?
Il
nous faut donc veiller sur ce qui sauve .Quels
contours donner à l'évaluation pour
qu'elle soit créatrice de liens et contribue
à l'élaboration d'un monde commun
?
Si
quantifier et mesurer sont des actions
légitimes dans un fonctionnement
démocratique, protégeant de
l'arbitraire et des apprentis sorciers, il
importe de distinguer le mesurable comme
les objets extérieurs- fussent-ils
humains (combien de morts, de
réussites au bac, de nouveaux kms
de désert)- et le quantifiable. Ce
qui est exprimé par des mots comme
l'intelligence, les effets de la
psychothérapie ou le stress va
pouvoir être, en effet, traduit en
nombre grâce
à des
conventions
(des échelles par exemple).
Conventions
dont nous savons bien qu'elles sont
elles-mêmes le produit d'une
société, un acte de pouvoir,
une décision relative. Cela suppose
donc une lucidité sans faille sur
l'implication de celui qui établit
les objectifs, les indices, les
interprétations et sur les fins de
cette quantification.
Ce
que dessine André de Peretti à propos
de l'enseignement, ouvre des pistes et
éclaire l'horizon, dans une vision
globale et complexe chère à
Edgar
Morin :
" Évaluer revient
[ ] à donner du désir et
du sens à ce que l'on fait, dans la triple
acception du terme, tel que l'employait Paul
Claudel : en confirmant la direction dans laquelle
on va, le ressenti de ce qui se passe au cours des
actions entreprises, et enfin la signification,
laquelle entretient forcément une relation
aux valeurs. "
Cette
réflexion a coïncidé par les
hasards de la vie, avec la lecture de l'ouvrage de
notre ex -ministre mais toujours philosophe, Luc
Ferry " Qu'est ce qu'une vie réussie ? "
où l'auteur nous rappelle que si la question
est au centre des interrogations humaines depuis la
naissance de la philosophie, la façon d'y
répondre dépend de la vision du monde
où elle s'inscrit.
"L'homme habite
en poète sur cette terre" disait
Hölderlin
Cette
fièvre des comptes m'amène finalement
à une interrogation : " qu'est ce qui
ne n'est pas évalué ? ". Sans
doute l'essentiel : notre degré d'angoisse
devant l'incertitude, et notre désir
associé de toute-maîtrise, individuel
et collectif.
Il
importe que tout à notre
désir de
vérité
embusqué derrière
l'exact, nous ne laissions pas
nos cotes et nos comptes
rétrécir notre
vision du monde mais que, au
contraire, une meilleure
appréhension du
réel nous permette de
l'amplifier. C'est à cette
condition que " l'architecte et
le saltimbanque " pourront
cohabiter en nous dans une
tension féconde et un
ajustement
créatif.
Afin
de nous réconcilier avec la vie, si
besoin en était, permettez moi de
ponctuer ce thème par une
réflexion autour de ce qui se plie
le moins à l'évaluation.
Pour cela, il me plait de réunir
à leurs risques et périls le
couple Kinsey lui-même et St.
Augustin. Les premiers, après la
publication de leurs volumineux rapports
chiffrés et étayés,
n'ont pas hésité à
déclarer : " notre amour, la
seule chose qui ne s'évalue pas
". Voilà qui est plutôt
rassurant et
réconfortant.
Le second affirmait
que " La mesure de l'amour, c'est
d'aimer sans mesure " .
Commentaire
<<merci de
nous rapeller que la compétence ne se mesure
pas seulement avec des grilles et des
contrôles mais dans la possibilité de
donner du sens aussi.>>
<<Comme tu es
heureusement présente dans nos horizons ces
derniers temps de printemps. Merci de nous ramener
à la poésie de lamour, à
la chaleur des rencontres et à la
nécessité du lien.>>
Péan
<<Texte
remarquable ! Je co-prépare un atelier
rencontres CRAP sur le thème
>>
<<Agréable
lecture, pleine d'intérêt pour moi qui
prépare un stage sur l'évaluation
dans le Secondaire (Histoire-géo). Petite
remarque adjacente : Heidegger, "grand questeur du
vrai" ? Je ne sais pas, mais petit nazi, oui ! Bien
cordialement.>>
<<Le
dossier sur la haine est extrêmement
intéressant. J'aime beaucoup votre site.
Benjamin, Dunkerque.>> 5/06
<< Merci
Marie-Françoise de la lucidité de ton
regard qui me réconforte. A bientôt
>>Péan