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DU SITE
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L'individu
hypermoderne
Sous la direction
de
Nicole
Aubert
Editions
Erès. (2004)
ISBN:
2-7492-0312-0 (25 €)
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Dernière de
couverture
Nous assistons
à l'émergence d'un individu nouveau,
dont les manières d'être, de faire, de
ressentir, diffèrent profondément de
celles de ses prédécesseurs. La
mondialisation de l'économie, la
flexibilité
généralisée, conjuguées
à un bouleversement des technologies de la
communication, au triomphe de la logique marchande
et à l'éclatement de toutes les
limites ayant jusque-là structuré la
construction des identités individuelles, se
répercutent directement sur ce que nous
sommes, ce que nous vivons, ce dont nous souffrons.
L'Individu < hypermodeme », issu de ces
bouleversements, présente
des facettes
contradictoires centré sur la satisfaction
immédiate de ses désirs et
intolérant à la frustration, il
poursuit cependant, dans de nouvelles formes de
dépassement de soi, une quête
d'Absolu, toujours d'actualité.
Débordé de sollicitations,
sommé d'être toujours plus performant,
talonné par l'urgence, développant
des comportements compulsifs visant à gorger
chaque instant d'un maximum d'intensité, il
peut aussi tomber dans un « excès
d'inexistence », lorsque la
société lui retire les supports
indispensables pour être un individu au sens
plein du terme. Ce sont ce portrait contradictoire
que ce livre tente de tracer et les implications de
ces mutations qu'Il vise à
analyser.
Dirigé
par Nicole Aubert, sociologue et psychologue,
professeur à l'Ecole supérieure de
commerce de Paris (ESCP-EAP), ce livre
intègre les contributions de
différents spécialistes en sciences
humaines et sociales : sociologues, philosophes,
psychiatres, psychanalystes, psychologues,
historiens, économistes, parmi lesquels,
notamment : François Ascher, PaulLaurent
Assoun, Jacqueline Barus-Michel, Robert Castel,
Jean Cournut, Bernard Cova, Eugène Enriquez,
Marcel Gauchet, Vincent de Gaulejac, Claudine
Haroche, Francis Jauréguiberry, Michel
Maffesoli, Ezio Manzini, Max Pages, Jacques
Rhéaume, Bernard Stiegler, Elisabeth
Tissier-Desbordes.
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Table des
matières
INTRODUCTION:
LES MÉTAMORPHOSES DE L'INDIVIDU
Nicole
Aubert
1. QUI EST
L'INDIVIDU HYPERMODERNE ?
Un individu
paradoxal Nicole Aubert
Manières
d'être, manières de sentir de
l'individu hypermoderne Claudine Haroche
Lidéal type
de l'individu hypermoderne l'individu pervers ?
Eugène Enriquez
2. l'INDIVIDU
DANS LEXCÈS ET LES PATHOLOGIES DE
L'HYPERMODERNITÉ
Les
défoncés Jean Cournut
Lintensité
de soi Nicole Aubert
L'hyperactivité
au travail : entre narcissisme et identité
Jacques Rhéaume
Jouissance du
malaise L'hypermoderne à l'épreuve de
la psychanalyse Paul-Laurent Assoun
3. LINDIVIDU
« PAR DÉFAUT » ET LES
CONTRADICTIONS DE
L'HYPERMODERNITÉ
La face
cachée de l'individu hypermoderne l'individu
par défaut Robert Castel
Le sujet
manqué Lindividu face aux contradictions de
l'hypermodernité Vincent de
Gaulejac
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4. LES NOUVEAUX
MODES D'EXPRESSION DE LA QUÊTE
IDENTITAIRE.
De
l'identité aux identifications Michel
Maffesoli.
Hypermodernité
et manipulation de soi Francis
Jauréguiberry
5. LE
CONSOMMATEUR HYPERMODERNE
Le corps
hypermoderne Élisabeth Tissier-Desbordes
Lhyperconsommateur,
entre immersion et sécession Bernard Cova,
avec Véronique Cova
Au-delà de
l'hyperconsommation Scénarios pour des
formes de vie fluides et durables Ezio Manzini avec
François Jégou
6. LA
SOCIÉTÉ HYPERMODERNE
Massification,
régression, violence dans la
société contemporaine Max Pages
Lhypermodernité,
dépassement ou perversion de la
modernité ? Jacqueline
Barus-Michel
La
fourmilière L'époque
hyperindustrielle de la perte d'individuation
Bernard Stiegler
Le futur au
quotidien. De la fin des routines à
l'individualisation des espaces-temps quotidiens
François Ascher
CONCLUSION: VERS
UNE MUTATION ANTHROPOLOGIQUE ?
Marcel Gauchet
(entretien avec Nicole Aubert et Claudine
Haroche)
BIBLIOGRAPHIE
LES
AUTEUR
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Un passage
<<Le grand
pervers est celui qui crée des
organisations, des normes, des rituels, des
procédures, ayant pour fonction de mettre
à bas ceux que le tout-venant accepte. Ses
désirs, immenses, doivent être
renouvelés constamment car il ne
connaît pas la satiété. Il
n'est donc pas seulement contre les lois
particulières, il défie la loi
fondamentale qui structure toute
société (celle qui énonce la
différence des sexes et la différence
des générations - le principe
généalogique étudié par
Pierre Legendre et la prohibition de l'inceste), et
celle qui énonce que le lien social et
l'existence de
l l'autre ne
doivent pas être mis en question, même
si elle n'offre i pas toujours le même visage
dans toute société. Se voulant Dieu,
il ne peut se vouloir qu'auto-engendré et
refuse toute filiation. Il vise donc à la
destruction de tout ce qui peut être
considéré comme sacré. Bien
plus, il se nourrit quotidiennement de
sacrilèges et de blasphèmes. Ce
faisant, il prend un risque majeur.
Déchaîner des éléments
qui, un jour peut-être, se retourneront
contre lui. Et s'il a des compères, il n'a
pas d'amis. Ses acolytes pourront, sans vergogne,
l'utiliser contre sa volonté s'il manifeste
le moindre moment de faiblesse. La
société qu'il a créée
n'est en rien une société, elle n'est
qu'un agrégat de désirs individuels
qui peuvent entrer en antagonisme et
dégénérer en violence
pure.
Le pervers «
quelconque » n'est pas mû par de telles
ambitions. Le goût dë
lâTiaüteur n'est pas son apanage. Il ne
veut rien transgresser. La loi structurante de la
société, il peut s'en
accom
moder ou en faire
fi, sans trop se poser de questions. Pour lui, rien
n'est sacré sauf sa jouissance
immédiate. Il est donc non pas contre la
loi, mais contre les lois particulières qui
le brident. Il veut du plaisir tout de suite, il
vit dans l'éphémère et il ne
veut pas contribuer à la création
d'un contre-monde. Il veut devenir riche sans
travailler, éliminer les autres en risquant
le minimum, avoir des filles faciles ou les
torturer et les tuer pour exprimer sa puissance ou
son dégoût, se complaire aux drogues
dures car elles lui permettent de ne pas ressentir
son impuissance, fuir dans un monde irréel,
ou encore calmer sa propre angoisse existentielle.
S'il veut jouir à tout prix, c'est pour
être semblable à ce qui lui semble
être le modèle social dominant. Il est
incapable de la hauteur sublimation alors que le
grand pervers peut parfois sublimer dans des
tâches réputées impossibles.
Aussi notre société de la vitesse, de
l'urgence, qui privilégie l'instant
présent, qui n'offre plus guère de
valeurs communes mais des séries de valeurs
différentes
suivant les groupes
auxquels on appartient, qui encourage la
compétition, la rivalité et donc le
plaisir égoïste, est-elle plus
favorable à la multiplication de «
pervers quelconques » que de grands pervers.
Un chef harcèlera ses subordonnés et
les mettra en état de stress pour se sentir
important et non pas parce qu'il nourrit de grands
desseins. Un mari battra sa femme, un père
ses enfants parce que cela est facile. Le «
pervers quelconque » n'est qu'un petit homme
caricature du grand. Il ne vit que dans
l'apparence, dans l'intensité, mais il ne
crée rien ; il ne fait que détruire
ou s'autodétruire. Naturellement, comme pour
le grand pervers, l'autre doit être un simple
instrument de sa jouissance, mais il lui est
surtout indifférent. Être un «
pervers quelconque » est à la
portée de n'importe qui, dans une
société en proie au
délitement. Il vise à être
conforme, non à être exceptionnel.
C'est sans doute pourquoi cette « ethnie
construite » tend à se
développer.>> p.46
<<Le grand
pervers, dont le prototype dans notre
contemporanéité est le technocrate ou
le stratège subtil, se mettra alors à
croire plus à ses calculs, à ses
équations, à ses modèles,
qu'à ce qu'il voit. Le monde devient
abstrait. Il n'est plus qu'une forêt de
concepts, de paradigmes, de formules, de machines
sophistiquées. La victoire de la
rationalité instrumentale, les
progrès des technosciences ne peuvent que le
bercer dans cette illusion. Quant au « pervers
quelconque », il tâchera de faire de son
petit monde un monde qui lui convient, avec ses
loisirs, ses drogues, ses jeux, ses sports et ses
extases. Il vivra journée après
journée, dans l'obsession de la
plénitude : rire le plus souvent, se
divertir constamment (et d'autant plus que les
autres en feront les frais), subir le moins de
souffrance et obtenir le plus de plaisir possible,
puisque le lendemain peut être
catastrophique. En définitive, en vivant
dans l'instant, il croit assurer sa survie, sa
puissance. Il ne se rend pas compte qu'en niant la
réalité, il est en train de se nier
lui-même. Le « pervers quelconque »
est traversé par la pulsion de mort, et
cette pulsion a quelque chance, en fin de compte,
de lui enlever la vie.>> p.48
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Commentaire
Un livre qui
permet de prendre de la distance par rapport
à notre époque. Il fait aussi
comprendre certaines des difficultés
actuelles de l'école. Voir:
L'
enseignant hypermoderne ?
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