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Quel genre de femme ou d'homme êtes-vous ?

(À propos d'une polémique)  

Didier Martz

 

          Je n'entrerai pas ici sur le fond théorique et idéologique du débat qui tourne autour de la notion de genre. Les arguments ont été largement déployés ici et là et il ne me semble pas utile d'y revenir. Qu'il y ait une nature humaine, une nature féminine et une nature masculine me semble évident. Comme chez les animaux, il y a des femelles et des mâles dont la tâche principale est de reproduire leur espèce. Soit. Lorsqu'on a dit ça on n'a rien dit ou presque. Mais, comme disait mon acolyte de comptoir : " on n'est pas des bœufs ", encore que, entre le " bœuf " et le " beauf ", il y a l'espace de quelques voyelles. Mais laissons cela.

 

           Nous ne sommes pas en effet des bœufs. Même si l'on veut bien accorder au bœuf d'avoir appris à se mettre devant la charrue qui lui a permis de se sortir de la stricte animalité, il ne s'agit que d'un apprentissage. Certes, cela ne l'a pas promu, comme son compère le cheval, au rang de meilleur ami de l'homme mais au moins l'autorise à se distinguer de l'araignée qui, infatigablement, depuis des milliers d'années tisse la même toile. Sauf que son apprentissage - celui du bœuf - n'aura duré qu'un temps et il est probable qu'il en reste là pour l'éternité. D'ailleurs,le problème est réglé puisqu'il n'y a plus de charrues qui comme chacun sait ont été détrônées par le tracteur lequel s'est " mis avant les bœufs. "

           Si nous ne sommes pas des bœufs, des araignées ou des fourmis, il faut bien nous accorder, comme l'avait pointé Rousseau, la perfectibilité. Je ne parle pas ici de perfectibilité morale parce que dans ce domaine, on se prend à rêver d'être des animaux : faire le mal leur est étranger. Non, la perfectibilité dont parle Rousseau est celle que nous gagnons par l'éducation.

           Et il faut bien, si nous voulons nous distinguer des animaux, postuler que nous disposons d'une forme de liberté qui nous permet, notamment grâce à l'éducation de faire des écarts. Certes, écarts quelques fois et peut être assez souvent, dommageables à l'espèce humaine mais au bout du compte ils sont la manifestation de cette liberté qui nous fait prendre nos distances par rapport aux " programmes de la nature ". Le termite programmé pour aller se jeter dans la gueule des voraces fourmis rouges pour retarder leur repas n'a pas le choix et ne fait pas preuve de courage. Il ne peut pas décider d'y aller ou de ne pas y aller, d'aller boire un verre ou de combattre.

           L'homme ou la femme, oui. Ils peuvent choisir et souvent en fonction de l'éducation qu'ils auront reçue. Comme ils peuvent décider d'avoir ou de ne pas avoir des enfants même si leur " nature " les a programmés pour.

 

           Comme le dit Sartre dans L'existentialisme est un humanisme, si l'homme est libre alors il n'y a pas de nature humaine, il n'y a pas d'essence de l'homme qui précéderait son existence.

           Cela signifie, dit Sartre
" que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme […] s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. Nous voulons dire, poursuit Sartre, que l'homme existe d'abord, c'est-à-dire que l'homme est d'abord ce qui se projette vers un avenir, et ce qui est conscient de se projeter dans l'avenir. L'homme est d'abord un projet qui se vit subjectivement, au lieu d'être une mousse, une pourriture ou un choufleur; rien n'existe préalablement à ce projet; rien n'est au ciel intelligible, et l'homme sera d'abord ce qu'il aura projeté d'être."

          Il y a une essence du bœuf, du termite ou de tous les animaux de la terre qui précède leur existence, une sorte de programme naturel qu'ils " doivent respecter ". Devoir d'ailleurs n'a pas de sens. Et si l'on casse trois pattes à un canard, ce n'est plus un canard. Il ne correspond plus à son essence, il n'est plus rien. L'homme ou la femme avec deux pattes en moins est toujours un homme parce qu'il est toujours en mesure de dépasser sa condition. Il peut toujours s'évader de ses déterminismes.

 

           Bien sûr nous naissons homme, femme, pauvre, riche et ce n'est pas toujours facile de devenir, d'être le sujet de sa propre existence comme le propose Sartre. Il est d'ailleurs plus commode parfois - ou souvent - de s'en remettre à une sorte de fatalité : " je suis né ainsi ", "je ne suis pas doué pour faire cela ", " mon environnement social m'a conditionné à être ceci", etc. Évidemment, je gagne en innocence mais qu'est-ce que je perds en puissance d'action et en possibilité d'être.

 

           L'éducation surtout lorsqu'elle est nationale et républicaine tente d'atténuer, de gommer les déterminismes sociaux ou biologiques. En droit, elle est le lieu et le moment où il est offert aux petits d'hommes la possibilité de devenir les sujets de leur existence. Pour se faire, elle leur met en main les éléments, tous les éléments qui leur permettront de choisir, de décider, de se faire une idée et, sinon d'êtres libres, d'avoir des préférences, d'opter.

 

           Aussi, les tentatives qui visent à ôter aux individus cette possibilité portent atteinte à leur devenir et poussent à en faire des " mousses " ou des " choux-fleurs ". Ce qui est toujours tentant pour obtenir facilement des consentements.

 2 octobre 2011

 

Voir aussi sur ce site:

La problématique du genre : L'Homme est il un animal comme les autres ? par Marie-Françoise Bonicel 

Mâle/femelle - masculin/féminin - homme/femme? par J.N

Cerveau féminin / Cerveau masculin par Serge Ginger

Voir aussi l'article " Le genre des députés " sur le blog " les ficelles d'Hélène "

lesficellesdellenne.over-blog.com/

 

Le blog de Didier Martz

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