Avantages de
cette méthode
Elle permet de former les élèves
à des compétences très utiles
pour la suite de leur formation et dans leur vie:
-
être capable de travailler en
équipe,
- être capable
d'expliquer à un autre quelque
chose qu'on a compris soi-même;
- être capable
d'apprendre en se servant d'un livre (et
maintenant d'un cours sur
Internet)
Elle facilite aussi un travail plus
individualisé du côté de
l'élève et du côté de
l'enseignant.
Enfin elle permet de faire
travailler les élèves plus qu'ils ne
le font habituellement et paradoxalement de donner
moins de travail à l'enseignant !
Qu'est-ce qu'une
classe inversée?
Habituellement l'enseignant doit préparer
"son" cours chez lui ainsi que quelques exercices
d'application; puis vient la présentation de
ce cours que les élèves prennent en
note (plus ou moins bien !); c'est ensuite le temps
des exercices d'application au tableau. Parfois,
l'enseignant donne des exercices à faire
à la maison; ils seront ou non
corrigés en classe le lendemain.
Dans une classe inversée, on inverse: le
temps à la maison est consacré
à apprendre le cours sur un livre ou sur
Internet, et le temps en classe est celui des
exercices et explications de
l'enseignant.
Un descriptif
possible du déroulement (comme je l'ai
pratiqué)
A
début de l'heure (ou des deux
heures en Terminale) je commençais
par la présentation d'un chapitre
du livre que les élèves
auraient à étudier chez
eux; je signalais les paragraphes
importants et à travailler, ceux
à simplement lire et ceux qu'on
pouvait sauter. (Je pense qu'on pourrait
faire la même chose avec Internet en
donnant en particulier les adresses du
site et des pages à consulter ou
comme à " Singapour, où
chaque élève dispose d'un
ordinateur à l'école, de
tablettes mais aussi de caméras
vidéo. Les leçons de cet
enseignant singapourien sont ainsi
transférées sur un site
Internet: «Mes élèves
les utilisent par le biais de leur
téléphone ou de leur console
de jeu, pendant les temps de
transport», explique-t-il."
Le
Figaro 2/9/13);
ceci durait environ 5 à 10 minutes
au plus (les élèves prenant
des notes)
Puis j'indiquais sur le livre les
exercices ou travaux qu'il pourrait
être intéressant de faire
(actuellement, selon les
possibilités de
l'établissement certains
élèves pourraient, je pense,
se servir d'Internet) et je demandais
alors aux élèves de
travailler ces exercices en
groupe.
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Pour cela la classe était répartie en
groupes de 3 ou 4 élèves (deux tables
inversées et l'une contre l'autre) les
élèves se faisant face.
Dans un premier temps les
élèves se mettaient à
travailler en groupe; ils partageaient les
difficultés rencontrées dans
l'étude du chapitre chez eux; certains
expliquaient à ceux qui n'avaient pas
compris ; si tout le groupe butait sur une
même difficulté il pouvait m'appeler.
J'allais dans ce groupe expliquer ce point.
Dans un deuxième temps les
élèves d'un même groupe
choisissaient un exercice dans leur livre, sur des
feuilles d'exercices distribuées ou dans
d'autres livres (bibliothèque en classe
constituée des spécimens
reçus), puis le travaillaient, en
général en deux périodes, une
phase individuelle suivie d'une mise en commun dans
le groupe ou certains élèves
expliquaient à d'autres ce qu'ils avaient
fait ou trouvé. Ils avaient la
possibilité (en levant la main !) de
m'appeler pour les dépanner.
Je pouvais donc durant l'heure de cours, soit
répondre aux demandes des groupes qui
m'appellaient ou travailler avec un
élève qui avait des
difficultés importantes.
Il arrivait qu'en circulant au milieu des groupes
je constatais que beaucoup d'élèves
avaient une même difficulté. Alors je
demandais à la classe de faire silence
quelques instants et j'exposais cette
difficulté et en proposais une solution au
tableau pour tous et les groupes reprenaient
ensuite leur travail.
Évaluation
du travail des élèves
C'est à chaque enseignant
d'inventer sa façon
d'évaluer. Pour mon compte et
à cette époque je pratiquais
le devoir sur table une fois par quinzaine
en première et une fois par semaine
en terminale scientifique. Ce devoir
était fait une fois sur deux en
groupe (tous les élèves du
groupe avaient la même note) et
l'autre fois individuellement. Ce qui me
donnait une double vision du niveau du
groupe et de celui de chaque
élève (et un nombre moins
grand de copies à corriger ! !
!)
Les
précautions à prendre
vis-à-vis des élèves,
des parents, de
l'administration
Quand on se lance dans cette
méthode il faut s'attendre à
bien des "résistances !
- des élèves qui se rendent
vite compte que cette méthode est
bien plus exigeante et leur demande bien
plus de travail
- des parents qui désirent souvent
que leur enfant apprennent comme de leur
temps et de l'administration qui ne veut
pas d'histoire !
Il sera donc nécessaire d'expliquer
longuement à tous pourquoi on fait
cela et les avantages qui en
résultent.
Il est plus prudent de commencer doucement
en choisissant une classe avec laquelle on
se sent à l'aise, et avec une
leçon facile à apprendre et
seulement pour une heure ou deux puis
recommencer plus tard en ajustant en
fonction des difficultés
rencontrées.
Les
difficultés et avantages pour
l'enseignant
Les avantages
sont évidents:
Pas de cours à préparer.
moins de copies à
corriger.
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Rapport d'inspection
(1979) de
l'I.G. Sausser
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Les
difficultés sont moins
évidentes:
Il y a une jonglerie de l'esprit à laquelle
il faut s'habituer car le passage de groupe en
groupe m'obligeait à suivre les
raisonnements d'élèves
confrontés à des exercices
différents, que je n'avais pas faits
à l'avance; Il faut comprendre rapidement de
quel type d'exercice il s'agit, où est la
difficulté et pouvoir donner une piste de
recherche valable en répondant à des
questions très variées.
Enfin cela demande d'avoir une image de soi
suffisamment solide pour pouvoir dire parfois
à des élèves <<
Écoutez là je ne vois pas comment
faire, je vais chercher; passez à un autre
exercice et quand j'aurai trouvé on le
reprendra ensemble>>
Paradoxalement il faut aussi être capable de
ne rien faire ! ! C'est ainsi que je passais
certaines heures assis à mon bureau sans
rien faire (avec le plaisir de voir ma classe
travailler seule ! ...et la jalousie de
collègues qui me voyaient au passage !)
Évidemment à d'autres heures
j'étais épuisé car je courais
de groupe en groupe avec cette gymnastique de
l'esprit indispensable pour s'adapter rapidement
à des exercices différents et
à des questions variées. !
Témoignage
d'un ancien élève
retrouvé sur
Facebook
<<Mai 68 venait de passer par
là, avec une année de
seconde passablement tronquée et je
rentrais en classe de 1ère C.
Nouveaux professeurs, nouveaux camarades,
et, encore plus surprenant, un agencement
de la salle de maths complètement
inédit pour nous à
lépoque : une demi-douzaine
de carrés avec 5 ou 6 chaises
autour
Notre professeur, Jacques
Nimier, nous expliqua alors que nous
allions travailler par groupes, et que ce
seraient les meilleurs
élèves qui expliqueraient
à ceux qui avaient le plus de
difficultés.
Notre table regroupait 3 des meilleurs
éléments de la classe et 3
élèves moins performants. Je
dois à la vérité de
dire que je ne me souviens parfaitement
que de mes deux camarades les plus
brillants
Mais ce qui ma le
plus marqué est à la fois le
plaisir que nous avions à expliquer
aux autres les exercices quils ne
parvenaient pas à faire et
lattention extrême quils
nous portaient. Le prof déambulait
dans la classe pour simplement surveiller
si tout se passait bien et donner quelques
pistes. Contrairement à ce
quon aurait pu craindre, je ne me
souviens pas de brouhaha particulier, nous
parlions bas et écrivions
beaucoup
Ma seule frustration
(mineure) était de rarement passer
au tableau !
Mes souvenirs sont plus flous quant aux
devoirs en classe, pour lesquels nous
rendions copie unique, mais certainement
ce nétait pas seulement les 3
plus forts qui rédigeaient. Nous
discutions notre démarche ensemble
et ensuite la rédaction allait de
soi.
Lexpérience continua en
terminale, et pour autant quil
men souvienne les résultats
de la classe au bac furent excellents, en
particulier en maths. Cétait
la seule matière dans laquelle nous
pratiquions cette nouvelle technique. Je
la pratiquais par la suite un peu en
classe préparatoire, y compris pour
les devoirs « à la maison
» qui se faisaient en fait par petits
groupes réunis dans la classe le
mercredi après-midi.
Je ne sais pas si
lexpérience fut aussi
enrichissante pour les
élèves qui avaient le moins
de facilité, mais pour les
meilleurs ce fut une expérience
inoubliable qui en tous cas ma
préparé à aborder des
situations de la vie professionnelle
où il faut expliquer certains
points complexes à des
non-spécialistes ou à de
jeunes collègues moins
expérimentés.>>
Philippe Charpentier qui a fait
polytechnique puis a travaillé au
Commissariat à l'Énergie
Atomique
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