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Interview exclusive d'Alain Bouvier, membre du H.C.E.

sur la réforme des IUFM

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Jacques Nimier : Quelle question vous a été posée ?

Alain Bouvier. La loi de 2005 a décidé l'intégration des IUFM dans les Universités. D'une certaine manière on nous a demandé de trouver comment cette solution pouvait résoudre les problèmes qui se posaient vis-à-vis de la formation des maîtres. Cela avait quelque chose de surprenant de partir de la solution ! Les Universités nous ont expliqué qu'elles auraient à subir des critiques et qu'elles avaient alors besoin de savoir ce qu'on attendait d'elles exactement : il leur fallait donc un cahier des charges.

En fait, le H.C.E a été plus loin car il a estimé qu'il fallait donner aux universités les moyens d'assumer la responsabilité de la réussite de cette expérience. Nous avons procédé du point de vue de la méthode comme pour le socle commun. Nous nous sommes demandé ce qui se faisait dans les autres pays et on a auditionné les acteurs actuels, des personnes portant des critiques sur la formation ou d'autres proposant des évolutions; on a eu beaucoup de contributions écrites.

J.N : Autrement dit, une préparation importante…

A.B : Six mois, avec des séances hebdomadaires soigneusement préparées par les chargés de mission. Cela nous a amenés à distinguer quelques principes sur lesquels nous étions d'accord et les conditions de la réussite.

J.N : Vous auriez pu partir des problèmes, plutôt que de principes ?

A.B : Dès qu'on aborde les problèmes de la formation des maîtres, on est amené à parler de tout le système éducatif : les rapports entre maternelle, école primaire, enseignement secondaire et enseignement supérieur; les aspects disciplinaires et non disciplinaires; les rapports entre l'école, la société et l'économie, la demande sociale, le politique…Il n'y a pas une question sur la formation qui ne renvoie pas à toute l'Education Nationale. Il fallait qu'on arrive à se limiter, à se borner.

J.N : Donne-nous un exemple ?

A.B : Le problème de la différentiation et du positionnement du concours et de la certification ; cette question est légitime ; mais il faudrait plusieurs mois pour bien la poser dans le nouveau contexte universitaire. Ce sujet n'a pas bougé depuis le rapport Bancel de 1989.

J.N : La mise en place du LMD (licence, master, doctorat) dans les Universités ne modifiera-t-il pas ces questions ?

A.B : Sûrement ; le LMD ne fait que se mettre en place, il modifiera la perception de certains aspects.

J.N : A mon avis, votre document modifie profondément l'identité professionnelle du métier d'enseignant. Comment vois-tu cela ?

A.B : Le seul document qui faisait référence aux compétences des enseignants est le rapport Bancel en 89. Nous réaffirmons cela. L'enseignement est un métier. Il faut donc s'y préparer.

Mais c'est un métier de haute qualification (comme celui d'ingénieur ou de médecin). Cela a pour conséquence, comme en médecine, que la formation continue devrait être obligatoire.

J.N : Comment définirais-tu cette évolution du métier d'enseignant ?

A.B : La variété des situations dans ce métier est très grande et elle s'accroît. On ne peut donc pas se préparer à l'exercer dans certains lieux ou territoires en s'y préparant dans d'autres très différents. Il y a non seulement les quartiers difficiles mais même les quartiers intermédiaires des grandes villes ; ils ne sont pas déclarés comme difficiles mais la solidarité y existe peu, l'aide des familles est minimum ; les enseignants déclarent avoir beaucoup de peine. De même les zones rurales isolées ont leur spécificité et leurs difficultés. Il est donc préférable que les futurs enseignants se préparent là où ils exerceront en tout début de carrière.

J.N : Avez-vous parlé des formateurs qui seront chargés de la formation des maîtres ?

A.B : Sur ce sujet, le registre des critiques était important. Certaines pistes évoquées allaient dans le sens de deux secteurs séparés (Université et terrain), les formateurs de terrain n'ayant aucun contact avec l'Université. Le HCE a écarté cette hypothèse qui semblait aller à l'encontre de " faire confiance à l'université ".

Nous avons constaté que dans tous les pays où la formation des maîtres était confiée à l'Université, cette dernière choisissait ses formateurs, même ceux du terrain. Ils avaient donc tous une attache avec l'Université (parfois ils avaient même des mi-temps à l'Université)

J.N : Autrement dit ce n'est plus au Recteur ou à des Inspecteurs de choisir les formateurs de terrain ?

A.B : Ce problème n'a pas été abordé en ces termes. Bien sûr, dès lors que la formation est du ressort des Universités qui sont autonomes, le Recteur n'a plus la même place. Une nouvelle sera à construire. On a préconisé :

- la possibilité de convention entre l'Université et le Recteur. Qui dit convention dit négociation et modalités de suivi.

- que chaque année le Recteur réunisse les présidents des Universités (celle qui a l'IUFM et les autres) de façon que personne ne soit exclu de la formation car le risque serait d'appauvrir cette formation en n'utilisant pas les diverses ressources des différentes Universités.

J.N : Vous n'avez pas abordé le problème du statut possible des formateurs autres qu'universitaires. Son absence est un point dont ils souffrent pourtant ?

A.B : Nous n'avons pas abordé les questions administratives. La formation des formateurs n'est pas satisfaisante actuellement, mais les formateurs peuvent, comme les enseignants, s'inscrire dans des Masters de " formation de formateurs d'adultes ".

J.N : On aurait pu se poser la même question pour les formateurs que pour les enseignants : quelles compétences doivent-ils avoir ?

A.B : Oui ; mais je pense qu'avec le temps les Universités ne feront pas les mêmes choix et les différences de formation d'une Université à l'autre iront en augmentant.

J.N : J'ai été surpris que vous ne citiez pas dans la liste des compétences de l'enseignant " la compétence relationnelle " Le métier d'enseignant n'est pas avant tout un métier technique, il est un métier relationnel. Vous le dites dans le texte :

" - Une formation à la communication, avec des simulations de situations professionnelles, est essentielle : l'enseignement est aussi un métier de relation. Les stagiaires doivent être suffisamment préparés à savoir conduire un entretien (avec les parents notamment), à résoudre un conflit. (P8) " Mais vous ne le citez pas comme compétence ; ce mot était-il tabou ?

A.B : C'est vrai. On n'a pas mis de terme commun à une série d'expressions que l'on utilise (gérer la classe, travailler en équipe…) On n'a pas eu de débat spécifique et approfondi sur cette question ; on a assimilé cet aspect à la communication.

J.N : Vous modifiez peu les concours de recrutement ; on peut dire que vous les centrez encore plus sur le disciplinaire (demande de suppression de la didactique et des questions administratives). N'y a-t-il pas une contradiction entre le fait d'introduire la notion de compétence au niveau du métier et de centrer le concours exclusivement sur le disciplinaire. Faire un profil de compétences pour l'enseignant n'exigeait-il pas un concours différent ?

A.B : Nous avons été sensibles à un problème bien connu : le nombre des étudiants lauréats des concours et qui n'ont pas fait une première année d'IUFM est élevé ; ces étudiants sont donc désavantagés. On aurait voulu une autre épreuve qui ne les pénalise pas. De plus la loi n'a pas modifié la position des concours ; on n'a donc pas voulu, pour les raisons déjà évoquées, intervenir sur les concours. Ceci étant dit je pense qu'il y a confusion entre un certificat de fin d'études supérieures dont la validation est de droit de la responsabilité de l'université et un concours de recrutement à un métier, qui relève, lui, comme dans toute organisation, de l'employeur.

Cela dit si j'étais encore Directeur d'IUFM, je me sentirais à l'aise avec ce texte. On a été un peu plus loin que le rapport Bancel ; dans 6 ou 8 ans d'autres franchiront une autre étape.

J.N : A ton avis quelle est l'avancée la plus importante ?

A.B : Le fait que le système social et politique définisse le métier d'enseignant en terme de compétences professionnelles. C'est un message qui est envoyé directement aux enseignants :

<<Votre métier est important car vous avez à assurer un large spectre d'actions ; vous n'avez pas à faire un " geste professionnel " et un seul. Il faut donc se préparer à maîtriser toutes les compétences indispensables. Il n'y a pas de hiérarchie entre elles. Pas de compensation possible. Comme pour le " socle commun ", l'évaluation est essentielle.>>

<<A mourir de rire, cette interwiew ! A l’avenir choisissez mieux vos >>

 

 

Voir le texte du H.C.E. sur la réforme des IUFM:

Texte du H.C.E.

Voir mes commentaires:

Commentaires du texte du H.C.E.

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<<<<A mourir de rire, cette interwiew ! A l’avenir choisissez mieux vos >>

<<C'est un grand plaisir pour moi de retrouver Monsieur Alain Bouvier à l'occasion de cet interview. Cela ravive le souvenir d'un recteur attentif au pilotage d'un système de formation et je ne peux que le féliciter de son action en la matière.>>

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