Le 18.06.2004, le Conseil
européen, réunissant
à Bruxelles les 25 chefs d'Etat ou
de gouvernement des Etats membres de
l'Union européenne, est parvenu
à un accord historique sur le
projet constitutionnel.
Signé le 29.10.2004 à
Rome, le traité constitutionnel
doit être ratifié par les
peuples (ou les parlements) des 25 Etats
membres, d'ici le 01.11.2006.
|
|
Le présent document a pour
objet de présenter, sans esprit
partisan, une synthèse du
traité constitutionnel de
façon à permettre au lecteur
de connaître les grandes lignes du
projet et de se prononcer en connaissance
de cause lors du référendum
qui se déroulera en France le 29
Mai prochain.
|
A.
POURQUOI UN TRAITE CONSTITUTIONNEL
EUROPEEN ?
L'Europe
s'est construite grâce à une
série de traités qui ont
été négociés
par les Etats :
- 1957 :
les traités de Rome qui ont
créé la Communauté
Economique Européenne (CEE) et
celle de l'énergie atomique
(EURATOM).
- 1986 : le
traité de l'Acte unique qui a
réalisé le marché
unique qui établit la
liberté de circulation des
personnes, des marchandises, des services
et des capitaux sur l'ensemble du
territoire de la CEE.
- 1992 : le
traité de Maastricht qui a
fondé l'Union
européenne.
- 1997 : le
traité d'Amsterdam qui a
instauré les coopérations
renforcées entre Etats et
renforcé le pouvoir de
décision du Parlement
européen.
- 2001 : le
traité de Nice, qui a
adopté la Charte des droits
fondamentaux, visé à adapter
le fonctionnement des institutions
européennes et fixé les
mécanismes de décision pour
l'adhésion de nouveaux Etats
membres.
Cet
empilement de traités formait un
ensemble complexe et peu lisible auquel le
traité constitutionnel substitue un
système unifié et
simplifié permettant :
- de
clarifier ce qui relève de
l'Union européenne et des Etats et
de répondre à la question "
Qui fait quoi ? "
- de renforcer la
capacité de prise de
décision des institutions dans
une union à 25 puis à 27,
tout en renforçant la
légitimité
démocratique des décisions,
en renforçant la
représentation populaire et en
favorisant la participation des
citoyens,
- d'organiser le
fonctionnement des pouvoirs de l'Union
et affirmer l'existence d'un ensemble de
valeurs communes et de droits fondamentaux
ayant force juridique.
|
B.
L'ECONOMIE GENERALE DU TRAITE
CONSTITUTIONNEL EUROPEEN
Le
traité se compose de quatre parties
:
La 1ère partie (les
articles 1.1 à 1.60) : elle
contient les dispositions qui
définissent l'Union
européenne dotée de
la personnalité juridique, ses
objectifs, ses compétences, les
moyens dont elle dispose pour
décider et ses moyens d'action
c'est-à-dire ses institutions.
La 2ème partie (les
articles 2.61 à 2.114) : elle est
consacrée à la Charte
des droits fondamentaux
proclamée lors du Conseil
européen de Nice. Ces droits sont
donc " constitutionnalisés " ce qui
leur confère une force juridique
qu'ils n'avaient pas jusque là.
Très concrètement, les juges
nationaux et européens auront
à interpréter ces droits et
à garantir que les
législations nationale et
européenne les respectent.
|
|
La 3ème partie (les
articles 3.115 à 3.436) : elle
traite des différentes
politiques dont est en charge l'Union
européenne ; reprenant un
nombre important des dispositions des
traités antérieurs, elle
traite des actions de l'Union dans tous
les domaines de sa compétence.
La 4ème partie (les
articles 4.437 à 4.448) : elle
contient les clauses
finales. L'abrogation des
traités antérieurs,
l'affirmation de la succession et de la
continuité juridique à la
suite des traités
antérieurs, le champ d'application
territoriale du traité
constitutionnel, les procédures de
révision et de ratification du
traité ; enfin la date de son
entrée en vigueur fixée au
01.11.2006.
Le traité
constitutionnel est un texte
complexe, beaucoup de ses dispositions
étant incroyablement
compliquées et nombreux les
thèmes qui sont abordés sous
des angles divers, d'où une
impression de répétition ne
facilitant pas sa lecture.
Plutôt que
de le présenter suivant l'ordre des
4 parties le composant et article par
article, nous nous efforcerons dans les
chroniques suivantes de présenter
les principales questions pouvant
être évoquées
:
|
1.
LES OBJECTIFS DE L'UNION
EUROPEENNE
(articles 1.1 à
1.10)
L'Union offre à ses
citoyens un espace de liberté, de
sécurité et de justice sur
un marché unique. Le mode de
développement économique est
clairement fondé sur la libre
concurrence mais de nouveaux objectifs
sont affirmés, notamment le plein
emploi, le progrès social, le
développement durable, le respect
de l'environnement, la cohésion
territoriale, le progrès
scientifique et technique et la
diversité culturelle et
linguistique.
Ces objectifs s'inscrivent dans
le cadre des valeurs de l'Union : la
dignité humaine, la liberté,
la démocratie,
l'égalité et l'Etat de
droit.
L'Union est dotée de la
personnalité juridique, ce qui lui
permet d'agir en son propre nom.
|
2.
QUI FAIT QUOI ?
(articles 1.11 à
1.18)
2.1 Trois
principes sont à la base du
dispositif
· En vertu du principe
d'attribution, l'Union agit dans
la limite des compétences qui lui
sont attribuées par la
constitution.
· En vertu du principe de
subsidiarité, l'Union
intervient dans les domaines qui ne
relèvent pas de sa
compétence exclusive seulement si
les objectifs de l'action envisagée
ne peuvent pas être atteints de
manière suffisante par les Etats
membres, mais peuvent l'être mieux,
en raison des dimensions ou des effets de
l'action envisagée, au niveau de
l'Union.
· En vertu du principe de
proportionnalité, le
contenu et la forme de l'action de l'Union
n'excèdent pas ce qui est
nécessaire pour atteindre les
objectifs de la Constitution.
Les parlements nationaux, en
vertu de la Constitution, sont les
gardiens des compétences nationales
; ils pourront désormais demander
à la Commission européenne
de retirer une proposition
législative qu'ils estimeraient
contraire au principe de
subsidiarité.
2.2 Les
compétences exclusives de
l'Union
Elles concernent l'union
douanière, les règles de la
concurrence, la politique monétaire
dans la zone euro, la politique
commerciale commune et la conservation des
ressources biologiques de la mer.
2.3 Les
compétences partagées entre
l'Union et les Etats
membres
Elles concernent notamment le
marché intérieur, la
cohésion économique, sociale
et territoriale, l'environnement, la
protection du consommateur, les
transports, l'énergie, les enjeux
communs de santé publique, de la
recherche, du développement et de
l'espace.
2.4 Les
actions d'appui
L'Union dispose d'une
compétence pour coordonner et
compléter les actions des Etats
membres dans de nombreux domaines tels la
santé, l'industrie, la culture, le
tourisme, l'éducation, la jeunesse,
le sport, la formation
professionnelle
2.5 Les
actions de coordination
L'Union coordonne les politiques
économiques et de l'emploi ainsi
que la politique étrangère
et de sécurité commune.
|
3.
UNE NOUVELLE ARCHITECTURE DES
POUVOIRS
(articles 1.19 à
1.32)
Le texte ne bouleverse pas
l'équilibre institutionnel existant
mais introduit trois innovations
importantes :
- une présidence plus stable du
Conseil européen,
- l'instauration du ministre des
affaires étrangères,
- le renforcement des rôles du
Parlement européen et de la
Commission.
3.1 Le
Parlement
européen
(article 1.20)
Il est composé au
plus de 750 membres, élus
directement par les peuples pour
5 ans, de façon
dégressive et
proportionnelle, avec un seuil
minimum par Etat (aucun d'entre
eux ne pouvant détenir
plus de 96 sièges). Le
Parlement voit ses pouvoirs
augmentés ; il est
désormais placé,
dans l'élaboration et le
vote des lois, sur un pied
d'égalité avec le
Conseil des ministres qui
représente les Etats
membres. Le Parlement conserve la
faculté de censurer la
Commission. Il élit le
médiateur européen
et décide de créer
des commissions
d'enquête.
|
|
|
3.2 Le Conseil
européen (articles 1.21
et 1.22)
Composé des Chefs d'Etat
ou de gouvernement, il donne à
l'Union les impulsions nécessaires
; il comprend en outre son
président et le président de
la Commission ; le ministre des affaires
étrangères participe
à ses travaux. Grande innovation :
est créée la fonction
permanente de président du Conseil
européen, élu pour 2,5 ans
renouvelable une fois. Ne pouvant exercer
aucun mandat national pendant la
durée de ses fonctions et ne
participant pas aux votes, il sera un vrai
président ayant un rôle
effectif d'animation et de conduite des
travaux du Conseil européen. Il est
ainsi mis fin au régime actuel de
présidence tournante de 6 mois qui
nuisait à l'efficacité de
l'Union.
|
3.3 Le Conseil des
ministres appelé le
Conseil (articles 1.23 et
1.24)
Emanation des Etats membres, il
est l'instance de décision
prépondérante en
matière de politique
étrangère et de coordination
des politiques économiques.
Composé d'un représentant
par Etat membre, sa composition varie
selon les sujets traités. Le
Conseil exerce conjointement avec le
Parlement européen les fonctions
législatives et
budgétaires.
|
3.4 La Commission
européenne
(articles 1.26 et 1.27)
Incarnant en toute
indépendance l'intérêt
commun de l'Union, elle est le
véritable moteur de la construction
de l'espace juridique européen.
Elle propose les lois et veille à
la mise en uvre des politiques
communes. Elle représente l'Union
dans les négociations
internationales (l'OMC par exemple). Elle
décide à la majorité
simple. La première commission
nommée en vertu de la Constitution
est composée d'un
représentant par pays, ce nombre
étant réduit en 2014
à un nombre de membres
correspondant aux deux tiers du nombre
d'Etats membres, soit 18 dans une Europe
à 27.
Son président est
proposé par le Conseil
européen statuant à la
majorité qualifiée au
Parlement européen qui
l'élit à la majorité
de ses membres.
Les responsabilités
incombant à la Commission sont
structurées et réparties
entre ses membres par son président
(article 1.27). Cette répartition
peut être modifiée en cours
de mandat par le président. Les
membres de la Commission exercent les
fonctions qui leur sont dévolues
par le Président sous son
autorité (article 3.35).
|
3.5 Le ministre des
affaires
étrangères
(article 1.28)
Nommé par le Conseil
européen statuant à la
majorité qualifiée avec
l'accord du président de la
Commission, il préside le conseil
des ministres des affaires
étrangères et veille
à la cohérence de l'action
extérieure de l'Union. La
création de ce poste est l'une des
principales innovations du texte
constitutionnel et rend vide de sens
l'interrogation de Henry Kissinger : "
L'Union européenne, quel
numéro de téléphone ?
"
|
en
anglais
|
|
3.6 La Cour de
justice de l'Union européenne
(articles 1.59 et 3.353 à
3.381)
Composée d'un juge par
Etat membre, ses membres étant
nommés pour 6 ans renouvelables
d'un commun accord par les gouvernements
de l'Union, la Cour de justice,
assistée d'avocats
généraux, est chargée
d'assurer le respect du droit de l'Union,
quelles que soient les parties aux
litiges. Elle exerce le contrôle de
légalité des lois et
règlements de l'Union. Elle
s'assure de l'interprétation
uniforme du droit de l'Union sur tout son
territoire.
|
3.7 La Banque
Centrale Européenne
(articles 1.30 - 3.382 et 3.383)
Indépendante dans
l'exercice de ses pouvoirs, elle a pour
objectif essentiel la stabilité des
prix au sein de l'Union. Le Conseil des
gouverneurs se compose des membres du
directoire et des gouverneurs des banques
centrales des Etats membres. Le directoire
formé du président, du vice
président et de 4 autres membres
est nommé par le Conseil
européen statuant à la
majorité qualifiée pour un
mandat de 5 ans.
|
3.8 La Cour
des comptes (articles
1.31 - 3.384 et
3.385)Composée d'un
ressortissant de chaque Etat
membre, indépendante, la
Cour assure le contrôle des
comptes de l'Union. Ses membres
sont nommés pour 6 ans par
le Conseil.
|
3.9 Les organes
consultatifs de l'Union
(articles 1.32)
Le Comité des
régions et le Conseil
économique et social,
exerçant leurs activités en
toute indépendance, sont
nommés pour 5 ans par le Conseil
européen et assistent avec voix
consultative le Parlement, le Conseil et
la Commission.
|
|
3.10 Dispositions
communes et
particulières
Les articles 1.33 à 1.43
définissent les actes des
institutions de l'Union et expriment les
principes de défense mutuelle et de
solidarité entre les Etats, face
aux agressions armées sur leur
territoire, au terrorisme, aux
catastrophes naturelles.
Les articles 1.45 à 1.52
établissent la vie
démocratique de l'Union ; est
instauré le médiateur
européen qui est habilité
à recevoir les plaintes de tout
citoyen de l'Union. Il y est
affirmé le principe du respect des
églises et des associations
religieuses.
Les articles 1.53 à 1.56
traitent des finances de l'Union
instaurant un cadre financier
pluriannuel.
Les articles 1.57 à 1.60
traitent des rapports de l'Union avec les
pays voisins, des procédures
d'adhésion de l'Union et du retrait
de l'Union.
|
4.
LES DROITS DES CITOYENS
4.1 La
citoyenneté européenne et
les symboles de l'Union
(articles 1.8 à 1.10)
Tout citoyen ayant la
nationalité d'un Etat membre est
citoyen de l'Union. Le drapeau de l'Union
représente un cercle de 12
étoiles or sur fond bleu, son hymne
est tiré de " l'ode à la
joie " de la 9ème symphonie de
Beethoven.
|
|
4.2 La Charte des
droits fondamentaux de
l'Union
Adoptée à Nice en
2000, la Charte est désormais
intégrée à la
Constitution dont elle forme la seconde
partie (articles 2.61 à 2.114).
Sont reconnus droits constitutionnels de
chaque citoyen de l'Union : la
liberté de travailler, la non
discrimination pour quelle que cause que
ce soit, l'égalité entre
hommes et femmes, le droit à
l'information et à la consultation
des travailleurs au sein de l'entreprise,
le droit à la négociation et
à l'action collective, le droit
à protection en cas de licenciement
injustifié, le droit à la
sécurité et à l'aide
sociale.
|
4.3 Les nouvelles
dispositions sociales
L' article 1.3 fixe à
l'Union, dans le cadre de
l'économie sociale de
marché, les objectifs suivants : le
plein emploi, la lutte contre l'exclusion
sociale, le développement durable,
la justice sociale, la protection des
droits de l'enfant, la solidarité
entre les générations,
l'application de ces principes
étant soumise au contrôle du
juge.
L'article 3.117 édicte "
la clause sociale " qui dispose que " pour
la définition et la mise en
uvre de ses politiques, l'Union
prend en compte les exigences liées
à la promotion d'un niveau d'emploi
élevé, à la garantie
d'une protection sociale adéquate,
à la lutte contre l'exclusion
sociale ainsi qu'un haut niveau
d'éducation, de formation et de
protection de la santé humaine ".
Cette clause s'applique à
l'ensemble des politiques de l'Union et
permet au juge d'annuler tout acte de
l'Union ne prenant pas en compte la
dimension sociale. L'article 1.48 fixe le
principe de la reconnaissance et de la
promotion du rôle des partenaires
sociaux et crée un sommet social
tripartite pour la croissance et l'emploi
dans le but de contribuer au dialogue
social.
|
4.4 Le droit
d'initiative populaire
L'article 1.47 alinéa 4
dispose que des citoyens de l'Union, au
nombre d'1 million au moins,
ressortissants d'un nombre significatif
d'Etats membres, peuvent prendre
l'initiative d'inviter la Commission dans
le cadre de ses attributions, à
soumettre une proposition
appropriée sur des questions pour
lesquelles ces citoyens considèrent
qu'un acte juridique de l'Union est
nécessaire aux fins de
l'application de la
Constitution.
|
4.5 La transparence
des travaux des institutions de
l'Union
L'article 1.50 alinéas 2
et 3 édicte que le Parlement
européen siège en public
ainsi que le Conseil lorsqu'il
délibère sur un projet
d'acte législatif.
4.6 La
reconnaissance de la société
civile
L'article 1.52 dispose que s'agissant
des églises et des organisations
non confessionnelles, l'Union
reconnaît leur identité et
leur contribution spécifiques et
maintient un dialogue ouvert, transparent
et régulier avec elles.
|
5.
LES POLITIQUES DE L'UNION. LA MISE EN
UVRE DE SES ACTIONS
Pour l'essentiel, ces
thèmes sont l'objet de la
3ème partie du texte
constitutionnel qui comprend les articles
3.115 à 3.436. Le lecteur observera
que, conformément à sa
nature, le texte constitutionnel ne trace
que de grandes orientations auxquelles les
politiques de l'Union et les Etats membres
devront se conformer.
5.1 Les
dispositions d'application
générale
(articles 3.115 à 3.129)
La constitution édicte des
principes généraux
concernant l'égalité des
hommes et des femmes, la promotion d'un
haut niveau d'emploi, la lutte contre les
discriminations, la protection de
l'environnement, la protection du
consommateur, l'exigence du bien
être des animaux et la bonne gestion
des services publics. En ce qui concerne
ces derniers, L'article 3. 122 stipule
que, eu égard à la place
qu'ils occupent et au rôle qu'ils
jouent dans la promotion de la
cohésion sociale et territoriale,
l'Union et les Etats membres veillent
à ce que ces services publics
fonctionnent dans des conditions qui leur
permettent d'accomplir leur mission.
|
5.2 Les dispositions
relatives au marché
intérieur
(articles 3.130 à 3.176)
La Constitution édicte les
principes de totale liberté et
libre concurrence pour toutes les
activités économiques et
financières, la libre circulation
des travailleurs, la liberté
d'établissement des hommes et des
activités, la reconnaissance
mutuelle des diplômes, la
suppression progressive des limites
à l'exercice des professions
médicales et paramédicales,
sous réserve de la coordination des
conditions d'exercice, l'interdiction des
aides publiques qui fausseraient la
concurrence, l'interdiction des mesures
fiscales faussant la concurrence entre les
produits et les services. A noter que
l'article 3.166 dispose que les
entreprises chargées de la gestion
de services d'intérêt
général sont soumises aux
règles de concurrence dans la
mesure où l'application de ces
dispositions ne fait pas échec
à l'accomplissement en droit ou en
fait de la mission particulière qui
leur a été impartie.
|
5.3 Les dispositions
relatives à la politique
économique et
monétaire (articles
3.177 à 3.202)
La Constitution fixe une
politique économique fondée
sur l'étroite coordination des
politiques économiques des Etats
membres et le principe d'une
économie de marché ouverte
où la concurrence est libre. Les
Etats membres considèrent leurs
politiques économiques comme une
question d'intérêt commun et
les coordonnent au sein du Conseil et du
Comité économique et
financier créé par l'article
3.192. La Constitution prévoit des
régimes dérogatoires pour
certains Etats, notamment dans des
situations de crise. Les Etats s'engagent
à éviter des déficits
publics et un endettement excessifs en
regard de leur PIB.
En matière
monétaire, l'objectif principal du
système européen des banques
centrales est de maintenir la
stabilité des prix mais il doit
également apporter son soutien aux
politiques économiques
générales de l'Union pour
contribuer à la réalisation
des objectifs de celle-ci ; il agit sous
la direction de la Banque Centrale
Européenne.
|
|
5.4 Les politiques
dans d'autres domaines
(articles 3.203 à 3.329)
5.4.1 Dans le domaine de
l'emploi (articles 3.203 à
3.209)
La Constitution fixe comme objectif
à l'Union un haut niveau de
l'emploi et la promotion d'une main
d'uvre qualifiée susceptible
de s'adapter et de réagir
rapidement à l'évolution de
l'économie. La promotion de
l'emploi est une question
d'intérêt commun. Le texte
constitutionnel instaure un Comité
de l'emploi afin de faciliter la
coordination des politiques des Etats
membres en matières d'emploi et de
marché du travail.
|
5.4.2 Dans le domaine de la
politique sociale (articles 3.209
à 3.219)
La Constitution fixe comme objectif
à l'Union l'amélioration des
conditions de vie et de travail permettant
leur égalisation dans le
progrès, une protection sociale
adéquate, le dialogue social, le
développement des ressources
humaines, permettant un niveau d'emploi
élevé et durable et la lutte
contre les exclusions. La Commission,
avant de présenter des
propositions, consulte les partenaires
sociaux.
|
5.4.3 Dans le domaine de la
cohésion économique, sociale
et territoriale (articles 3.220
à 3.224)
L'Union vise à réduire
l'écart entre les niveaux de
développement des
différentes régions et le
retard des régions les moins
favorisées. L'Union soutient cette
réalisation par l'action qu'elle
mène au travers des fonds à
finalité structurelle.
|
5.4.4 Dans les domaines de
l'agriculture et de la pêche
(articles 3.225 à 3.232)
Compte tenu du caractère
particulier de l'activité agricole
(et de la pêche), l'Union
définit et met en uvre une
politique commune de l'agriculture et de
la pêche qui a notamment pour but
d'assurer un niveau de vie
équitable à la population
agricole, de garantir la
sécurité des
approvisionnements et d'assurer des prix
raisonnables pour les livraisons aux
consommateurs. Pour le reste, les
règles du marché
intérieur s'étendent
à l'agriculture et au commerce des
produits agricoles.
|
|
5.4.5 Dans le domaine de
l'environnement (articles 3.233 et
3.234)
L'Union entend préserver,
protéger et améliorer la
qualité de l'environnement, en vue
d'assurer la protection de la santé
des personnes et préconise
l'utilisation prudente et rationnelle des
ressources naturelles.
5.4.6 Dans le domaine de la
protection des consommateurs (article
3.235)
L'Union contribue à la
protection de la santé, de la
sécurité et des
intérêts économiques
des consommateurs et à la promotion
de leur droit à l'information,
à l'éducation et à
s'organiser en vue de préserver
leurs intérêts.
|
5.4.7 Dans le domaine des
transports (articles 3.236 à
3.247)
L'Union vise à une politique
commune des transports ; ses règles
s'appliquent aux transports internationaux
exécutés au départ ou
à destination d'un Etat membre et
aux conditions d'admission des
transporteurs non résidents aux
transports dans un Etat membre. Elle
favorise l'établissement et le
développement de réseaux
transeuropéens.
|
5.4.8 Dans les domaines de la
recherche, du développement
technologique et de l'espace (article
3.248 à 3.255)
L'Union vise à renforcer ses
bases scientifiques et technologiques, par
la réalisation d'un espace
européen de la recherche dans
lequel les chercheurs, les connaissances
scientifiques et les technologies
circulent librement de façon
à favoriser sa
compétitivité, y compris
celle de ses entreprises, notamment les
petites et moyennes. Il s'agit d'organiser
une forte coopération entre les
entreprises, les centres de recherche et
les universités et une vaste
coordination des efforts qui doit
s'inscrire dans le cadre d'un programme
pluriannuel.
|
|
5.4.9 Dans le domaine de
l'énergie (article 3.256)
L'Union vise à assurer la
sécurité de son
approvisionnement
énergétique et à
promouvoir l'efficacité
énergétique et les
économies d'énergie ainsi
que le développement des
énergies nouvelles et
renouvelables.
|
5.4.10 En matière de
liberté, de sécurité
et de justice (articles 3.257 à
3.277)
Constituant un espace de
liberté, de sécurité
et de justice, l'Union assure l'absence de
contrôles des personnes aux
frontières intérieures et
développe une politique commune en
matière d'asile, d'immigration et
de contrôle des frontières
extérieures qui est fondée
sur la solidarité entre Etats
membres et qui est équitable
à l'égard des ressortissants
des pays tiers. L'Union, au-delà
d'une politique commune pour le
contrôle à ses
frontières, entend
développer une coopération
judiciaire, tant au pénal qu'au
civil ainsi qu'une coopération des
services de police entre les Etats
membres.
|
5.4.11 Autres actions de
coopération, de coordination et
d'appui (articles 3.278 à
3.291)
|
|
|
L'Union vise à promouvoir la
protection de la santé publique,
à développer l'industrie,
à l'épanouissement des
cultures, à encourager le
développement du tourisme, à
renforcer les actions en faveur de
l'éducation, de la jeunesse, du
sport et de la formation professionnelle
et encourage la coopération des
Etats membres en matière de
protection civile et de capacité
administrative.
|
5.4.12 Dans le domaine des relations
extérieures (articles 3.292
à 3.330)
Le traité constitutionnel fixe
à l'Union des objectifs ambitieux
et notamment :
- sauvegarder ses valeurs, ses
intérêts fondamentaux, sa
sécurité, son
indépendance et son
intégrité,
- consolider et soutenir la
démocratie, l'Etat de droit, les
droits de l'homme et les principes du
droit international,
- préserver la paix,
prévenir les conflits et renforcer
la sécurité
internationale,
- soutenir le développement
durable,
- encourager l'intégration de
tous les pays dans l'économie
mondiale,
- promouvoir un système
international fondé sur une
coopération multilatérale
renforcée et une bonne gouvernance
mondiale.
Le Conseil européen
définit les orientations
générales de la politique
étrangère et de
sécurité commune mise en
uvre par le Conseil et le ministre
des affaires étrangères de
l'Union. Il est ainsi mis fin à une
situation où l'Union n'était
pas un acteur significatif de la vie
internationale.
L'Union entend mener une
politique commerciale commune,
coopérer avec les pays tiers,
contribuer à l'aide humanitaire et
à l'aide au développement,
et conclure des accords
internationaux.
|
6.
COMMENT SE PRENNENT LES DECISIONS
?
S'agissant du Conseil
européen et du Conseil, la
Constitution fait du vote à la
majorité qualifiée la
règle et du vote à
l'unanimité l'exception. Il s'agit
là d'une des grandes innovations du
texte constitutionnel favorisant la prise
de décisions.
6.1 Le vote
à l'unanimité
Le Conseil européen se
prononce par consensus sauf dans les cas
où la Constitution en dispose
autrement (article 1.21). Il se prononce
à l'unanimité pour la
sélection des membres de la
Commission.
En matière de politique
étrangère et de
sécurité commune, le Conseil
européen et le Conseil se
prononcent à l'unanimité. Il
en est de même pour les
matières telles que la
fiscalité, la protection sociale et
la citoyenneté ; toutefois, le
Conseil européen peut
décider à l'unanimité
que le Conseil puisse statuer à la
majorité qualifiée dans des
cas où la Constitution stipule un
vote à l'unanimité.
|
6.2 Le vote à
la majorité qualifiée
(article 1.25)
Dans tous les cas où la
Constitution ne rend pas le vote à
l'unanimité obligatoire, les
décisions du Conseil
européen et du Conseil sont prises
à la majorité
qualifiée.
La majorité
qualifiée (article 1.25) se
définit comme étant
égale à au moins 55 % des
membres du Conseil et représentant
des Etats membres réunissant au
moins 65 % de la population de l'Union.
Une minorité de blocage doit
inclure au moins quatre membres du
Conseil, faute de quoi la majorité
qualifiée est réputée
acquise.
Par dérogation, lorsque le
Conseil ne statue pas sur proposition de
la Commission ou du ministre des affaires
étrangères de l'Union, la
majorité qualifiée se
définit comme étant
égale à au moins 72 % des
membres du Conseil, représentant
des Etats membres réunissant au
moins 65 % de la population de l'Union
(article 1.25 alinéa 2).
|
6.3 Le
parlement européen statue à
la majorité des suffrages
exprimés
Il ne peut adopter une motion de
censure à l'encontre de la
Commission qu'à une majorité
des 2 tiers et à la majorité
des membres qui le composent. Dans ce cas,
les membres de la Commission doivent
démissionner collectivement et le
ministre des affaires
étrangères de l'Union doit
démissionner des fonctions qu'il
exerce au sein de la Commission.
|
6.4 Les actes
juridiques de l'Union (article
1.33)
Les institutions, pour exercer
les compétences de l'Union,
utilisent 5 instruments :
- la loi européenne est un
acte législatif de portée
générale. Elle est
obligatoire dans tous ses
éléments et directement
applicable par tout Etat membre,
- la loi cadre européenne est un
acte législatif qui lie tout Etat
membre destinataire quant au
résultat à atteindre, tout
en laissant aux instances nationales la
compétence quant au choix de la
forme et des moyens,
- le règlement européen
est un acte législatif de
portée générale pour
la mise en uvre des actes
législatifs,
- la décision européenne
est un acte non législatif
obligatoire dans tous ses
éléments pour ses seuls
destinataires,
- les recommandations et avis n'ont pas
d'effet contraignant.
|
6.5 Les
coopérations
renforcées (article
1.44)
Elles visent à favoriser
la réalisation des objectifs de
l'Union, à préserver ses
intérêts et à
renforcer son processus
d'intégration. Elles sont ouvertes
à tout moment, à tous les
Etats membres conformément à
l'article 3.418.
La décision
européenne autorisant une
coopération renforcée est
adoptée par le Conseil lorsqu'il
établit que les objectifs
recherchés ne peuvent être
atteints dans un délai raisonnable
par l'Union dans son ensemble et à
condition qu'au moins 1 tiers des Etats
membres y participent.
|
6.6 Le budget et la
procédure
budgétaire (articles
1.53 et 3.402 à 3.414)
Le budget de l'Union est
proposé par la Commission au
Conseil. Il doit être
présenté en
équilibre. Le Parlement peut
proposer des amendements au projet
présenté par la Commission,
à condition qu'ils soient
adoptés à la majorité
de ses membres (article 3.404). Un
comité de conciliation,
réunissant les membres du Conseil
et autant de membres représentant
le Parlement, élabore un projet
tenant compte de ces amendements ; ce
projet doit être approuvé
à la majorité
qualifiée du Conseil et à la
majorité des membres
représentant le Parlement. Le
Parlement peut passer outre à un
rejet du projet par le Conseil en statuant
à la majorité de ses membres
et des trois cinquièmes des
suffrages exprimés.
|
7.
COMMENT REVISER LA CONSTITUTION
?
7.1 La
procédure de révision
ordinaire (articles 4.443)
Le gouvernement de tout Etat
membre, le Parlement européen ou la
Commission peut soumettre au Conseil des
projets de révision. Si le Conseil
européen, après consultation
du Parlement et de la Commission, adopte
à la majorité simple une
décision favorable à
l'examen des modifications
proposées, le Président du
Conseil européen convoque une
Convention composée de
représentants des parlements
nationaux, des Chefs d'Etat ou de
gouvernement des Etats membres, du
Parlement européen et de la
Commission et chargée d'examiner
les projets de révision et
d'adopter par consensus une recommandation
à une conférence des
représentants des gouvernements des
Etats membres.
7.2 La
procédure de révision
simplifiée concernant
les politiques et actions internes
à l'Union (article 4.445)
Cette procédure est
identique à la
précédente sous
réserve qu'il n'est pas
nécessaire de réunir une
convention comme ci-dessus.
|
7.3 La
procédure de révision
simplifiée (article
4.444)
Elle prévoit, dans les cas
où le Conseil statue à
l'unanimité, que le Conseil
européen, statuant à
l'unanimité, après
approbation du Parlement européen,
décide que le Conseil se prononce
à la majorité de ses
membres. Cette disposition dite " de
passerelle " permet d'étendre le
champ d'application du vote à la
majorité qualifiée dans des
domaines régis par la règle
de l'unanimité. La ratification par
les Etats membres n'est pas requise mais
l'opposition d'un seul parlement national
suffit pour empêcher l'entrée
en vigueur de la révision.
Il est à noter que les
coopérations renforcées
permettront aux Etats le souhaitant
d'aller au-delà des règles
constitutionnelles sans engager de
processus de révision.
|
8.
UN ETAT MEMBRE PEUT-IL SE RETIRER DE
L'UNION ?
L'article 1.59 stipule : " Tout
Etat membre peut, conformément
à ses règles
constitutionnelles se retirer de l'Union
". Dans cette hypothèse, l'Union
négocie et conclut avec cet Etat un
accord régissant les
modalités de son retrait. Cet
accord est conclu au nom de l'Union par le
Conseil statuant à la
majorité qualifiée
après approbation du Parlement
européen.
|
9.
QUAND LA CONSTITUTION ENTRERA-T-ELLE EN
VIGUEUR ?
Le 01.11.2006 au plus tôt
(article 4.447), si et seulement si tous
les Etats de l'Union ont ratifié le
traité constitutionnel ; deux de
ses dispositions entreront toutefois plus
tardivement en vigueur :
- 2009 pour la définition
de la majorité
qualifiée,
- 2014 pour la composition
réduite de la Commission
européenne.
|
10.
QUE SE PASSERA-T-IL SI LE TRAITE
CONSTITUTIONNEL N'EST PAS RATIFIE PAR TOUS
LES ETATS MEMBRES ?
Comme indiqué ci-dessus,
l'entrée en vigueur de la
Constitution est soumise à sa
ratification unanime par les 25 Etats
membres ; il suffit qu'un seul pays la
rejette pour empêcher son
entrée en vigueur. Ce propos doit
cependant être nuancé : une
déclaration annexée à
la Constitution paraît envisager
l'éventualité d'un " oui "
partiel puisqu'elle prévoit
qu'à l'issue d'un délai de 2
ans, si un cinquième des Etats
n'ont pas ratifié le traité
constitutionnel, les quatre autres
cinquièmes l'ayant ratifié,
le Conseil européen se saisira de
la question. La question se posant alors
au Conseil européen, ne sera-t-elle
pas d'envisager l'entrée en vigueur
de la Constitution pour la grande
majorité des Etats s'y étant
ralliés ? Serait alors
constitué un " Groupe pionnier "
cohabitant avec les Etats qui se seraient
exclus de l'espace constitutionnel.
|
11.
POURRA-T-ON REVISER FACILEMENT LA
CONSTITUTION EUROPEENNE ?
L'unanimité reste
la règle pour réviser la
Constitution, ce qui rend difficile une
modification dans le cadre élargi.
Toutefois, des procédures plus
simples dans certains domaines (la
disposition dite " passerelle " de
l'article 4.444) et surtout l'existence
des " coopérations
renforcées " permettront d'aller de
l'avant sans qu'il soit nécessaire
de réviser la Constitution. Mais
l'essentiel est de constater que le
Traité constitutionnel n'est que la
résultante d'un long processus qui,
allant des traités de Rome en 1957
aux traités de Maastricht et
d'Amsterdam en passant par l'Acte unique
de 1986, a nécessité de
grands efforts de la part des pays
européens et de leurs
gouvernements. Ce que les peuples de
l'Europe ont réussi à
entreprendre, ils pourront le poursuivre.
Il faut donc accepter que la Constitution
européenne soit imparfaite et
qu'elle soit vouée à
évoluer.
|
12.
LES ASPECTS RELIGIEUX
La question s'est posée de
savoir si le traité constitutionnel
devait mentionner l'héritage
religieux et plus
précisément chrétien
de l'Europe. La controverse fut vive,
dès l'élaboration en 2000,
de la Charte des droits fondamentaux de
l'Union ; se sont affrontés les
partisans d'une laïcité
rigoureuse et ceux que choque l'absence de
référence au christianisme
qui constitue une part importante de
l'histoire européenne. La Charte a
opté pour l'absence de toute
référence précise "
consciente de son patrimoine spirituel et
moral, l'Union se fonde sur les valeurs
indivisibles et universelles de
dignité humaine, de liberté,
d'égalité et de
solidarité
"
La controverse est revenue lors
des discussions sur le projet
constitutionnel, les mêmes clivages
s'étant reconstitués.
Finalement les discussions se sont
terminées avec une formulation
aussi neutre que possible qui a
été insérée
dans le préambule de la
Constitution : " s'inspirant des
héritages culturels, religieux et
humanistes de l'Europe à partir
desquels se sont développées
les valeurs universelles qui constituent
les droits inviolables de la personne
humaine, ainsi que la liberté, la
démocratie, l'égalité
et l'Etat de droit
".
L'élément
chrétien n'apparaît pas en
tant que tel mais il est
suggéré comme l'un des
héritages religieux de l'Europe. Au
Conseil européen des 18 et
19.06.2004, seule la Pologne s'est battue
pour la référence
chrétienne et s'est finalement
résignée à ce qu'elle
ne soit pas mentionnée.
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13.
QUELQUES OBSERVATIONS RELATIVES AUX
QUESTIONS ACTUELLEMENT DEBATTUES EN
FRANCE
13.1 Le texte
proposé est-il un traité ou
une constitution ?
La dénomination officielle
de " traité instituant une
Constitution pour l'Europe "
reflète la nature juridique hybride
de ce texte : plus qu'un traité,
moins qu'une Constitution parce que
l'Union n'est pas un Etat
fédéral. La
citoyenneté européenne
s'ajoute mais ne se substitue pas aux
citoyennetés nationales.
13.2 La Constitution
européenne crée-t-elle un
Etat fédéral
?
Non, pour plusieurs raisons : la
Constitution permet à tout Etat de
se retirer de l'Union, ce que les
Constitutions fédérales
interdisent ; il n'existe pas de
nationalité européenne.
L'Union demeure une association d'Etats
mais elle organise un espace public
commun.
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13.3 La Constitution
européenne est-elle de droite ou de
gauche, est-elle libérale ou
sociale ?
Ni l'un, ni l'autre. Une
Constitution est un contenant et non un
contenu. Ce sont les dirigeants politiques
qui influent sur le contenu des politiques
et non les institutions. La
difficulté vient de ce qu'il existe
une très profonde division sur le "
contenu social " de l'Union. A un
extrême, le Royaume-Uni est
très hostile à tout ce qui
évoque " l'interventionnisme
continental " et pour leur part les pays
de l'Est européen sont
soupçonneux car pour eux social
veut dire socialisme, voire collectivisme
; à l'autre extrême, certains
courants de gauche n'envisagent qu'une
Europe à caractère social
préservant les " acquis sociaux "
de l'Ouest et voulant leur extension
généralisée à
l'ensemble de l'Union, sans tenir compte
des écarts de niveau de vie.
En fait, le lecteur aura compris
que le traité constitutionnel
résulte d'abord d'un compromis
entre de nombreuses parties prenantes,
très diverses par leur taille, leur
niveau de développement
économique, leurs traditions, leurs
expériences historiques. Le
traité constitutionnel est
nécessairement un document
expérimental appelé à
évoluer. Une raison
élémentaire impose ce
caractère évolutif : l'Union
elle-même est un chantier
initié depuis plus de 50 ans et qui
n'est pas arrivé à son
terme.
|
13.4 Le texte
proposé menace-t-il nos services
publics ?
Non, au contraire, car pour la
première fois dans l'Union, le
texte constitutionnel reconnaît la
légitimité des services
publics, et notamment leur rôle dans
la cohésion sociale et territoriale
(Article 3.166) et que l'application des
règles de concurrence ne saurait
faire échec à
l'accomplissement en droit et en fait de
la mission particulière qui leur a
été impartie.
|
13.5 Les protocoles
et annexes joints au traité
constitutionnel en modifient-ils le
contenu ?
En aucun cas ; en effet les 36
protocoles et les 2 annexes joints au
traité visent seulement à
préciser le statut de certaines
institutions de l'Union sans modifier leur
rôle, à prévoir des
délais de mise en uvre de
certaines dispositions du traité
constitutionnel pour chacun des pays
compte tenu des dates auxquelles ils
avaient adhéré aux
traités antérieurs et
à préciser les conditions
d'application du traité
constitutionnel sur certains territoires
(les DOM-TOM français par exemple)
; il en est de même pour les dix
nouveaux pays qui doivent
bénéficier de conditions
transitoires pour certaines de leurs
activités particulièrement
exposées à la concurrence
des 15.
|
S'inspirant d'une prudence
légitime, le traité
constitutionnel s'inscrit dans la
continuité des traités
précédents ; il respecte la
double nature de l'Union, à la fois
association d'Etats et ébauche de
fédération. Le monde
n'appartient plus à l'Europe dont
elle n'est que l'un des
éléments parmi les
puissances établies et celles qui
émergent dans le cadre de la
mondialisation. Face aux enjeux et aux
défis auxquels elle est
confrontée, l'Europe n'a, en cette
aube du XXIème siècle
d'autre alternative que de poursuivre et
d'approfondir sa construction pour le bien
de ses peuples et un équilibre
mondial plus satisfaisant
qu'aujourd'hui.
François BONICEL
Le 17 février 2005.
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