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Où en est l'école d'aujourd'hui ?  

Jacques Salomé 

             Les difficultés relationnelles entre parents et enseignants, entre enfants et enseignants, les violences qui surgissent en permanence dans l'univers scolaires, ont fait l'objet de beaucoup de commentaires, d'explicitations et de recherches pour trouver des solutions. Je crois cependant qu'il serait possible de pouvoir faire avancer ces questionnements avec une écoute différente et de proposer ainsi une autre dynamique dans les échanges.

 

Mise en cause ou propositions?

             Ce qui est le plus fréquemment abordé, c'est l'énoncé d'un problème ou d'une situation gênante et la mise en avant d'une explication ou la recherche des causes. Avec ce que j'appelle une attitude de mise en cause, de plainte ou de dénonciation. Ce qui a été moins abordé c'est la recherche et la mise en place de propositions concrètes pour tenter de résoudre les problèmes en amont et non dans l'après coup ou en aval.

Ce que je propose serait :

             d'une part, d'énoncer, en début d'année scolaire, une charte de vie relationnelle aux parents et aux élèves qui indiquerait, en quelques points, quelles sont les règles d'hygiène relationnelle qui seraient mises ne pratique dans cette classe,

 

·             et d'autre part de poser les bases d'un enseignement de la communication à l'école, comme une matière à part entière. Et je sais qu'il y a un intérêt réel, (je reçois actuellement quelques 100 lettres par jour de parents et d'enseignants qui souhaiteraient s'engager dans cette voie et voudraient une formation de base correspondante). Je sais aussi qu'il y a bien sûr des résistances (car toute formation aux relations suppose une remise en cause personnelle et institutionnelle des uns et des autres).

 

Ce qui me fait proposer cela

             Je suis un ex enfant, issu de l'Ecole républicaine et laïque, celle de Jules Ferry qui transmettait des savoirs et des savoirs faire. J'ai à l'égard de cette école beaucoup de reconnaissance, (même si j'ai été, durant des années, un cancre, un rêveur). Cette Ecole, nous a permis, à mon frère et moi de " sortir " d'un milieu pauvre, acculturé (ma mère faisait des ménages et savait à peine lire son nom) pour devenir des enseignants ( j'ai été chargé de cours durant 12 ans à l'université de Lille III et mon frère est resté prof de math jusqu'à la retraite )

 

L'école doit changer

             Aujourd'hui, chacun le reconnaît et l'espère, l'école doit changer. Cela veut dire, transmettre au delà du savoir et du savoir faire, un savoir être, un savoir devenir et un savoir créer en acceptant que ces trois dernières démarches, puissent passer par un enseignement de la communication, considéré comme une matière à part entière.

             J'ai eu cinq enfants, devenus parents à leur tour et quand je vois ce qui attend mes 8 petits enfants, je suis inquiet. L'école est devenue aujourd'hui inadaptée pour répondre aux besoins relationnels des enfants et certains lieux scolaires sont devenus toxiques (dans le sens où ils ne sont plus protégés contre les violences qui environnent les enfants, des lieux où peuvent se développer aussi des auto-violences que certains enfants sont devenus habiles à secréter et à répandre, que ce soit dans la cours de récréation, dans les intercours ou en classe.

             Il ne s'agit pas faire le procès des théories pédagogiques qui peuvent cohabiter ou s'affronter, elles sont parfois stimulantes et d'autres fois elles peuvent s'inscrire à contre temps. Mon propos se situe en amont.

 

Comment intégrer des enfants qui n'ont pas les bases d'une socialisation élémentaire,

             Comment permettre à des enfants qui arrivent dans le cursus scolaire, avec un seuil de frustration très bas face aux contraintes inévitables d'une réalité qu'ils vont vivre comme agressante. Frustrations qui leur paraissent insupportables et auxquelles ils répondent par de la violence.

             Comment intégrer des enfants qui n'ont pas les bases d'une socialisation élémentaire, qui ont du mal à se situer en termes d'échanges et de partages autour des 4 ancrages de base : DEMANDER- DONNER- RECEVOIR -REFUSER. ?

             Comment les aider à entrer dans un processus d'apprentissage relationnel, leur permettant de vivre à la fois des gratifications (qui répondent à leurs besoins, mais pas toujours à leurs désirs) et de se confronter à des frustrations, à des contraintes et des limites ?

             De leur rappeler que quelque soit le savoir détenu par l'enseignant et la qualité de ce savoir, quelque soit sa richesse personnelle, tout cela passe par une relation. Faut il rappeler qu'une relation, c'est un pont, une passerelle, un canal dans lequel va circuler (dans les deux sens) des messages. Que si la relation n'est pas entretenue, vivifiée par des communications de qualité, les messages n'arrivent pas.

 

Etre à l'écoute des besoins relationnels des enfants.

             Quelque soit l'approche pédagogique (qui est un outil) il convient aujourd'hui, pour un enseignant de se recentrer, d'être à l'écoute des besoins relationnels des enfants. Besoins qui sont le plus souvent ignorés ou maltraités dans leur milieu. La plupart des enfants (quelque soit le milieu d'origine) sont élevés dans l'ordre du désir (tout, tout de suite, sans contrepartie) ce qui en fait à la fois de redoutables consommateurs et aussi l'équivalent de terroristes relationnels qui ne supportent plus la moindre contrainte, qui refusent, transgressent et combattent les exigences élémentaires d'une vie en commun. Des enfants qui ont un savoir que j'appelle informel (découvert de façon parcellaire et chaotique à la télé, dans la rue, dans les BD), savoir qui entre en concurrence avec le savoir (formel ) des enseignants.

 

L'incroyable contamination des conditionnements consuméristes, qui pèsent sur les enfants et leur imaginaire.

             Il est fréquent de faire référence pour situer l'origine de ces nouveaux comportements au laxisme de l'après guerre, dans la difficulté des parents qui avaient vécus les privations de la guerre, à faire vivre à leurs enfants des contraintes, des frustrations et des interdits. Ou encore aux errances de l'après 1968. Mais il y aussi l'incroyable contamination des conditionnements consuméristes, qui pèsent sur les enfants et leur imaginaire. Les multinationales développent des actions publicitaires, très efficaces en direction des enfants. La publicité qu'ils proposent, impose un conditionnement très serré, favorise une récupération des valeurs, et transforme les enfants en prescripteur de biens. Les enfants du désir, comme je les ai nommés plus haut, sont dans l'immédiateté, le plaisir de l'instant, la fuite du réel. Ils sont les grands utilisateurs des outils de la communication et confondent mise en commun et transmission d'une information.

On favorise la communication avec le lointain au détriment de la communication avec le prochain.

             Ce qui suscite une sorte d'hémorragie vers les univers virtuels (télévision, jeux vidéos etc..). Mais l'impact de la violence à la télévision sur les enfants diminue considérablement, quand il possible d'échanger avec eux (et c'est notre rôle) sur ce qu'ils voient. J'ai eu cinq enfants, ils savaient tous que le sang qui apparaissait sur l'écran, était du Ketchup, que les cascadeurs étaient très habiles, que la lame du couteau rentrait dans le manche, que le mort allait se relever pour aller boire un coup avec celui qu'il l'avait tué, ils ne confondaient pas les bons et les méchants, bref, ils dissociaient la fiction de la réalité. Aujourd'hui il y a une collusion permanente entre réalité et fiction, entre ce qui est dedans et ce qui est dehors, les bons ne se distinguent plus des méchants.

            Il y a aussi une rupture avec la convivialité (l'anonymat et l'individualisme ont remplacé l'entraide). Je n'aurais jamais pu rencontrer Monsieur Dutroux, quand j'allais à l'école tout seul depuis la maternelle, l'ensemble du quartier, connaissait mon nom, veillait sur moi !

             Il y aussi le manque de repères pour les parents qui n'ont plus de modèle (surtout pas comme ma mère, surtout pas comme mon père), qui ont oublié ce positionnement relationnel face à leurs enfants : " Je ne suis pas là pour répondre et satisfaire tes désirs, je suis là pour répondre et satisfaire tes besoins et cela jusqu'à un certain âge, car ensuite, ce sera à toi de prendre en charge la satisfaction de tes besoins et peut être de tes désirs! ".

             C'est ce qui explique aujourd'hui l'apparition d'une nouvelle tranche sociologique entre l'adolescence et l'âge adulte que j'appelle les ADULTLOSCENTS, qui restent chez papa, maman, comme des parasites jusqu' à 26-28 ans et parfois plus.

 

Et face à tout cela, il y a des enseignants qui se sentent démunis.

             Des enseignants sont confrontés à la difficulté de transmettre un enseignement uniformisé, formaté, à des populations d'enfants non homogènes. On a sacrifié l'équité à l'égalité. Les inégalités existent encore et partout. Ma grand mère disait nous sommes tous égaux, mais il y en a qui sont plus égaux que d'autres. Les ressources personnelles, l'histoire de chaque enfant, ses expériences de vie, sa disponibilité à participer, à intégrer des savoirs sont aujourd'hui réparties sur un éventail de possibles très large. Les problématiques des parents retentissent plus directement sur les enfants qu'autrefois. En effet dans la famille dite élargie, il avait, dans le passé, pour un enfant la possibilité de se dire, d'être entendu par un grand père, un oncle, une tante, le chien de la ferme à qui il pouvait se confier. Aujourd'hui dans la famille dite nucléaire ou reconstituée, il est plus difficile semble - t - il de trouver un interlocuteur, avec qui parler :" je voudrais te dire maman, mais tu es tellement prise dans tes conflits avec papa que je n'ose même pas te dire ce qui va mal chez moi… ".

             Serait-il possible de dire en conclusion, que l'école doit devenir un lieu d'apprentissage de la communication, une oasis relationnelle où pourrait s'apprendre et se transmettre les bases pour des relations vivantes et en santé.

 

Réaction
<<Tous ce qu’il est écrit est magnifique et riche d’informations.>>

 

Livres ressources de Jacques Salomé

· Minuscules aperçus sur la difficulté d'enseigner - Albin Michel

· Papa maman écoutez moi vraiment Albin Michel

- Pour ne plus vivre sur la planète taire. Albin Michel.  

 

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