L'école
serait vraiment agréable si tous les
élèves étaient motivés
à apprendre, s'engageaient avec cur
dans leurs apprentissages.
Cependant, la
réalité est toute
autre.
Les problèmes semblent se situer
davantage aux niveaux de ce que nous voulons
qu'ils apprennent et des moyens que nous utilisons
plutôt qu'au niveau de leur propre
désir d'apprendre.
Des recherches ont montré que les
activités, les savoirs proposés,
doivent avoir du sens et de la signification pour
les élèves, pour qu'il y ait
apprentissage. (Sousa, 2002) Tous les
élèves, des plus motivés
à ceux qui le sont moins, s'entendent pour
dire qu'au moins l'école permet d'avoir des
amis. Pourquoi ne pas voir dans cet
intérêt commun, une motivation
à exploiter?
Je vous présente brièvement
comment j'ai découvert certains avantages du
travail d'équipe. Ensuite je traiterai de la
possibilité que cette organisation offre
pour améliorer la relation
pédagogique. En multipliant les
interventions individualisées constructives,
l'engagement des élèves est
favorisé.
Le
travail d'équipe répond
à des besoins
|
Après plusieurs années
d'enseignement en adaptation scolaire et au
primaire, j'ai voulu relever le défi de
travailler avec des élèves du
préscolaire.(C'est-à-dire des
élèves d'environ 5 ans)
C'était en premier lieu pour me faciliter la
tâche que j'avais organisé mon groupe
en équipes de trois, quatre ou cinq
élèves. Comme au
préscolaire, les enfants bougent beaucoup,
l'organisation en équipes me permettait de
les connaître plus rapidement et simplifiait
la gestion de la classe.
Lorsque je suis
revenue enseignante au troisième cycle du
primaire, (Un cycle comporte deux années de
scolarité, au troisième cycle du
primaire les élèves ont dix, onze
ans) j'ai transféré cette
organisation en pédagogie de
projets.
la classe est organisée en sept
équipes, 29 élèves donnent
6 équipes de 4 et 1 équipe de 5.
J'aime beaucoup les équipes de quatre parce
qu'elles permettent des dyades.
Spontanément, ou souvent je le propose, ils
travaillent en dyade et mettent en commun par
après. Mais nous travaillons aussi en
individuel et en groupe. Souvent lors d'une
activité d'apprentissage, je vais demander,
suite à la mise en situation en groupe, de
faire un effort individuel quelques minutes,
ensuite d'en discuter dans l'équipe quelques
minutes et nous revenons en groupe pour
répondre aux questions, pour partager des
démarches différentes.
Pour constituer
les équipes
|
Je n'utilise pas toujours la même
façon de faire mais j'implique toujours les
élèves dans cette
organisation.
Voici la
façon la plus populaire.
Nous commençons par
réfléchir sur les
critères de choix des membres d'une
équipe. Ceux qui ressortent ou que
je fais ressortir sont: bien
clarifiés, en particulier que c'est
une équipe d'entraide, pour
travailler à nos apprentissages
scolaires, des membres qui nous aideront
à écouter lorsque c'est le
temps. Nous répartissons les forces
dans les équipes afin que chaque
équipe soit le plus autonome
possible, nous répartissons les
garçons et les filles; les
élèves font ressortir qu'il
est nécessaire que ce soit des
personnes avec qui l'on s'entend bien. Il
est également clarifié que
tous et chacun ont droit à une
place dans la classe.
Ensuite, tous les noms des
élèves sont dans une
boîte, un nom est pigé, cet
élève invite un autre selon
les critères établis
à faire partie de son
équipe. Une fois que nous avons
sept couples de formés, la pige se
continue mais à partir de ce moment
là, l'élève qui est
pigé regarde le début de
formation des équipes et choisit,
toujours en respectant le plus possible
les critères établis, dans
quelle équipe il veut aller. Les
élèves ont accepté
que d'une étape (projet) à
l'autre nous apprenons à travailler
avec différents
élèves.
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Pour favoriser la qualité du travail
d'équipe, les élèves sont
avertis que je vais intervenir s'ils perdent leur
temps ou s'ils parlent trop fort. J'ai des cartons
rouge, jaune et vert pour indiquer un premier
avertissement, un deuxième et au
troisième, ils devront
réfléchir ou travailler
individuellement à la prochaine
période de temps d'équipe. C'est
efficace!
Dès le
début de l'année, je
présente différents
rôles dans
l'équipe:
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l'animateur
qui
s'assure que chacun a compris la tâche et y
travaille, le gardien
du temps, le responsable du
matériel, le gardien de la parole
et de l'écoute et celui qui
encourage.
Des rôles sont parfois
regroupés. Mais les commentaires des
élèves sont partagés sur
l'importance de ces rôles et j'ai tendance
à être souple. Cependant lorsque je
vois qu'une équipe a de la
difficulté, revenir sur la clarification des
rôles est l'un des moyens utilisés
pour mieux s'organiser.
Pour les projets
d'équipe,
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Je dirais qu'une moyenne de 40 minutes par
jour sont accordés à leur projet.
Cependant, il peut il y avoir un laps de temps plus
ou moins long qui sépare la fin d'un projet
et le début d'un autre. Il arrive aussi que
des projets s'ajoutent à la vie de la
classe, donc des projets différents peuvent
se chevaucher, nous ralentissons l'évolution
de certains dans ces cas-là.
Chaque élève aura
été impliqué dans la formation
des quatre équipes auxquelles il aura
participé au cours d'une année
scolaire. Notre année scolaire (200 jours
d'école) est en effet répartie en
quatre étapes. Pour certaines commissions
scolaires il y a trois étapes.
Une équipe différente par
étape, mais c'est surtout lorsque la
présentation des projets est
réalisée ainsi que leur
évaluation que se déclenche la
formation des équipes suivantes.
Les élèves auront ainsi
appris à travailler ensemble, à
s'entraider et à réaliser des projets
d'équipe.
Les thèmes, les projets choisis par
les élèves nécessitent une
intégration des matières. Un
équilibre est recherché aux niveaux
du travail individuel, du travail d'équipes
et de groupe.
Nous débutons par un
remue-méninges, toutes les idées sont
acceptées, notées au tableau (avec le
numéro de l'élève qui l'a
proposée à côté)
Ensuite, les élèves, les yeux
fermés, votent pour tous les sujets qui les
intéressent. À la fin de cette
opération, il ressortira trois ou quatre
thèmes plus populaires. Le proposeur de
cette idée invite deux ou trois
élèves à faire équipe
avec lui ou elle pour trouver des arguments
à la question: Pourquoi devrions-nous
choisir ce thème? Je laisse du temps
à ces équipes de se préparer
et aux autres également de se faire une
idée.
Ensuite, ces petites équipes
prononcent leurs discours argumentatif.
Je demande ensuite à chacun
d'effectuer son choix individuellement,
également de penser à son
deuxième choix. Je désigne trois ou
quatre endroits dans la classe associés aux
différents thèmes proposés et
à mon signal chacun se dirige vers son
propre choix.
Après, les élèves du
groupe le moins nombreux
réfléchissent à leur
deuxième choix et à mon signal vont
retrouver les élèves qui avaient
choisi leur deuxième choix, jusqu'au moment
ou tout le groupe est autour du même
thème.
- Carte exploratoire en groupe où des
liens sont effectués avec leurs
connaissances antérieures
- Recherche
d'informations sur Internet, à la
bibliothèque de l'école ou
municipale, auprès de
personnes-ressources (individuel ou en
équipe de deux)
- Prise de notes
individuelle (chaque membre de l'équipe
doit apporter de l'eau au moulin)
- Partage des
informations trouvées dans
l'équipe pour effectuer le choix d'un
sous-thème
-
Deuxième mouvement de recherche
d'informations
-
Sélection des informations en
équipe
- Parfois des
activités spéciales viennent
enrichir leur projet: enquête, graphiques,
saynète, entrevue, construction...
C'est eux qui auront choisi de s'investir
davantage, mais tous doivent
s'impliquer.
- Partage des
tâches. Réalisaton
- Choix du moyen
de communication de nos apprentissages (en
équipe)
-
Préparation de la
présentation
-
Présentation
-
Évaluation
Des
précisions pour
l'évaluation
|
Préalablement, j'aurai demandé
aux élèves individuellement de
choisir de travailler un point particulier lors de
leur présentation. Tous les
élèves n'ont pas les mêmes
habiletés à
améliorer.
Lors de la présentation d'une
équipe, les autres écoutent,
participent s'ils sont sollicités. À
la fin de celle-ci des élèves peuvent
poser des questions.
Ensuite, il y a discussion dans les autres
équipes pour confectionner une sandwich
d'entraide, c'est-à-dire, qu'ils
reconnaîtront un point fort, un point
à améliorer et un autre point fort.
Je demande aux équipes d'en identifier
plusieurs afin de ne pas répéter
toujours les mêmes points.
Puis après je prends la parole pour
attirer l'attention sur des éléments
particuliers.
Deux ou trois jours plus tard, chaque membre
de l'équipe sera invité à
s'autoévaluer sur son implication
dans toutes les étapes du projet. Ensuite il
y a une co-évaluation par les pairs.
Les membres de l'équipe sont-ils d'accord
avec mon autoévaluation.
Il
s'agit bien entendu d'une cogestion où
l'enseignant(e) amène les
élèves à focaliser sur des
savoirs.
Chaque membre de l'équipe doit faire
la preuve de son implication dans chacune des
étapes des projets : l'anticipation, la
planification, la réalisation et la
présentation de leur projet d'équipe.
Sous ma supervision, une autoévaluation
associée à une co-évaluation
par les pairs vient réguler leur implication
et favorise l'intégration de leurs
apprentissages.
Il est nécessaire de varier les
activités. Certaines activités sont
présentées oralement mais les
élèves vont retrouver un rappel des
consignes sur papier. Je demeure responsable
d'effectuer des liens avec le programme.
D'autres activités sont plus souples,
particulièrement dans les projets, elles
font davantage appel à leur propre sens de
l'organisation même si une démarche
est explicitée. Ils ont une feuille de route
sur laquelle ils laissent des traces de ce qu'ils
font à chaque fois qu'ils travaillent
à leur projet.
Il est reconnu que plusieurs
facteurs interagissent au niveau de la
motivation des élèves. Je
vise particulièrement à
développer
l'autodétermination de mes
élèves à travers
leurs projets, leurs
apprentissages.
L'autodétermination des
élèves, le besoin de
choisir, que Deci et Ryan (1985) associent
au sentiment de compétence,
favorise l'engagement des
élèves dans leurs
apprentissages, dans le
développement de leurs
compétences.
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Le
travail d'équipe permet davantage
d'interventions
individualisées
|
Par
surcroît, cette organisation m'a permis de
multiplier les interventions
individualisées dans un contexte de
rencontre d'équipe.
Deux semaines suffisent pour avoir
rencontré toutes les équipes en
effectuant une rencontre d'équipe au
quotidien. Je ne réalise pas plus d'une
rencontre du "prof" (30 minutes en intervention)
par jour et certaines semaines il est arrivé
qu'il n'y en a pas eu. Mais lorsque je commence une
série de rencontres pour les sept
équipes, j'essaie le plus possible que ce
soit consécutif.
Il y a aussi des consignes lorsque je
suis en rencontre d'équipe. Les autres
équipes doivent travailler de façon
autonome, les élèves se consultent
les uns les autres. En principe, ils ont le droit
de me déranger seulement s'il y a urgence
(je garde tout de même un oeil et une oreille
au groupe). Je les encourage à noter leur
nom au tableau si certaines questions restent en
suspens. Si un élève nuit vraiment au
bon fonctionnement de l'équipe, que
malgré leurs essais de régler le
problème, ils n'y arrivent pas, il est
recommandé de m'en informer. Mais mon
intervention sera très courte (une
conséquence peut être
ultérieure), puisque je donne
priorité à l'équipe que je
rencontre.
Une recherche
action sur ce qui caractérise les
interventions individualisées en classe a
mis en évidence les avantages de prendre le
temps de s'asseoir à tour de rôle avec
chacune des équipes.
Une trentaine de minutes avec une
équipe permet d'établir un meilleur
contact psychologique avec chacun des
élèves pour médiatiser des
savoirs. Les effets de ces rencontres peuvent
s'étaler plus ou moins longtemps et j'ai pu
constater qu'elles ont eu un effet
bénéfique sur l'enseignement en
groupe.
Le contact psychologique est associé
au besoin fondamental de chacun d'entre nous
d'estime forte de la part de personnes de notre
entourage importantes à nos yeux.
(André, cité par Delonnoy,
2000)
Si les enseignants demeurent constamment
devant tout le groupe, ils négocient avec la
personne groupe et non les
individus.
Il est facile de s'imaginer devant le groupe
que notre leçon a été bien
comprise parce que trois ou quatre
élèves ont posé quelques
questions judicieuses. Mais allez voir de plus
près
La rencontre d'équipe
permet une meilleure écoute, un
partage plus équitable de la
parole, elle permet de créer des
liens entre les personnes, du sens entre
les intérêts des
élèves et les notions du
programme. Elle nous donne la
possibilité de ne pas étaler
les difficultés des
élèves devant tout le monde
sans les ignorer, elle nous donne
l'opportunité d'intervenir plus
justement.
De plus, la rencontre
d'équipe permet une cueillette
d'informations pertinentes dans le
contexte d'une évaluation
formative. C'est également la
rencontre d'équipe qui m'a permis
de découvrir que même si
certains problèmes perdurent, de
petites modifications altéraient le
caractère persistant de certaines
difficultés.
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Harmoniser
l'affectif et le
cognitif
|
"
des années de recherches
multidisciplinaires sur le développement des
enfants montrent que ceux-ci ont un besoin
fondamental de liens personnels profonds avec les
adultes (les parents surtout) desquels ils "
dépendent " dans leur vécu
quotidien
" Petrella (2000) Il est
nécessaire de reconnaître l'importance
que les enseignants ont auprès de leurs
élèves.
Aimer
fait apprendre!
Il s'agit d'harmoniser l'affectif et le
cognitif dans un contexte sécurisant
où les règles de fonctionnement sont
bien établies.
Reconnaître
le besoin d'autodétermination des
élèves dans des activités
stimulantes apporte de la vie dans la
classe.
Quoi de plus essentiel dans notre
société que d'apprendre à
être et à agir avec les
autres?
Un enseignant qui prête attention
à la qualité de la relation
pédagogique qu'il établit ne peut que
favoriser la communication indispensable à
la médiation des apprentissages. Il importe
de prêter attention à l'estime de soi
des élèves, de croire en leurs
capacités d'apprendre tout en identifiant
des stratégies efficaces pour les soutenir
dans leur recherche de solutions face aux
problèmes qu'ils rencontrent à
travers leurs projets, à travers leurs
apprentissages lorsqu'ils travaillent
individuellement, en équipes ou en
groupe.
Ce fut une belle
surprise pour moi de m'apercevoir que j'avais ainsi
facilité la socialisation de mes
élèves
puisqu'ils
fonctionnaient la plupart du temps dans leur
équipe. Ils n'avaient pas besoin d'apprendre
à être en relation avec une vingtaine
d'autres enfants simultanément, mais surtout
avec trois ou quatre. J'ai pu observer, dans ce
contexte qu'il se créait des liens entre les
enfants d'une même équipe.
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