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Mathématique et affectivité

Jacques Nimier

Collection Laurence Pernoux. Editions Stock (1976) ISBN: 2-234-00534-5

(épuisé) On retrouve une grande partie de ce livre dans: Camille a la haine et …Léo adore les maths L’imaginaire dans l’enseignement

Dernière de couverture

             La réussite en mathématique est une des exigences scolaires de notre époque: il faut étre bon en mathématique pour faire un B.E.P.; il faut étre bon en mathématique pour «faire » des sciences économiques; il faut étre bon en mathématique pour « faire médecine »... Et cependant certains sont « nuls en maths », alors que d'autres réussissent. Jusqu'á présent, on n'a trouvé á ces échecs —ou á ces réussites — que deux causes: il n'est pas intelligent, il ne fait rien, ou, au contraire, il comprend vite, il travaille beaucoup.

             Un professeur de mathématique, Jacques Nimier, s'est rendu compte que dans de nombreux cas, ni le manque d'intelligence, ni la paresse ne pouvaient expliquer l'échec. II a voulu alter plus loin, et chercher les autres causes possibles. Pour trouver, il a entrepris une vaste enquéte auprés des lycéens: 734 questionnaires ont été analysés par ordinateur, 60 entretiens d'une heure ont été enregistrés au magnétophone.

             En dépouillant ce matériel considérable, Jacques Nimier est arrivé á une conclusion essentielle : á l'origine des échecs — et des réussites — il y a trés souvent des causes inconscientes ou affectives. Pour certains éléves, les maths signifient paix, ordre, refuge, ils se trouvent á l'aise en face d'elles, et «réussissent ; pour d'autres, les mathématiques représentent un danger, une confusion, une fatalité, et la haine qui peut s'ensuivre est á l'origine des échecs.

             Cette explication est importante, elle permettra aux parents et aux éducateurs de comprendre enfin certains échecs, de modifier leur attitude, et de sortir de situations jugées jusque lá sans issue.

             Cette explication a un autre intérét: elle peut amener á modifier I'enseignement des mathématiques et la formation des maitres tant discutée aujourd'hui.

             Tout conduisait Jacques Nimier á écrire ce livre : il est non seulement professeur de mathématique mais aussi animateur á I'Institut de Recherche sur I'Enseignement des Mathématiques (I.R.E.M.) de Reims et docteur en psychologie. En plus, il a effectué une psychanalyse, et il anime des psychodrames.

Table des matières 
AVANT-PROPOS

INTRODUCTION

LES DIFFÉRENTS THÈMES

LES MATHÉMATIQUES ET L'ORDRE

La contrainte exercée par les mathématiques où à leur propos - Ces mathématiques si bien ordonnées- Cet ordre parfois bienfaisant pour l'esprit. Conclusion,

LES MATHÉMATIQUES COMME OBJET DANGEREUX

Les risques- Les dangers - L'inquiétude qui s'ensuit- Sentiment de manque - Sentiment d'une différence - Sentiment de fatalité. Conclusion

DÉFENSES CONTRE LE SENTIMENT DE DANGER

Mise à distance du danger - Maîtrise du danger - Comment combler le manque ? - Créer - Ouvrir des portes - Imaginer un monde magique - Conséquences : sécurité ou insécurité - Conclusion.

VALEURS ATTRIBUÉES AUX MATHÉMATIQUES

Base des autres disciplines - Discipline sans importance ou aberrante - mais grandiose. Discipline utile ou inutile, ne permettant pas de parvenir à la célébrité - Conclusion

ATTITUDES VIS-À-VIS DES MATHÉMATIQUES

Amour et haine des mathématiques - La recherche en mathématiques

TEXTE ET ANALYSE D'UN ENTRETIEN

ENTRETIEN AVEC UN GARÇON

Son désir de prendre ou de reprendre quelque chose - Les mathématiques ne lui donnent rien - Le refus de donner. - Ses lacunes - Il ne voit rien - Il est bouché - Il est marqué - Pour lui, les mathématiques sont un trou noir - Son inquiétude - Changement provisoire - Conclusion

CONCLUSIONS: L'ENSEIGNEMENT DES MATHÉMATIQUES

La classe - Le travail indépendant - La représentation en mathématiques - L'échec - L'erreur - Les mathématiques modernes - Les sections - Les horaires. - Le bac - La sécurité

LA FORMATION DES PROFESSEURS

La recherche pédagogique - Les formateurs - Quelle formation?

LA PLACE DE LA PSYCHOLOGIE DANS L'ENSEIGNEMENT

Actuellement. - La fonction d'écoute - L'orientation - Les professeurs dits « chahutés » - Les conseils de classe.

ANNEXES MÉTHODOLOGIE ET ÉCHANTILLON

Les entretiens. - Répartition par classe - Le questionnaire - étude du choix des verbes - étude du choix des adjectifs - études des différences avec les autres disciplines.

QUESTIONNAIRE-BIBLIOGRAPHIE

Un passage

<<Introduction

             J'enseigne depuis plusieurs années dans des classes dites littéraires et dans des classes dites scientifiques, d'un lycée et j'ai toujours été frappé par la différence d'ambiance qui y règne.

             On ne peut pas caractériser cette différence d'atmosphère par une différence de qualité de travail. Certaines classes littéraires, contrairement à ce qu'on pourrait croire, travaillent dans une ambiance très studieuse, presque trop parfois. De plus, d'une section à l'autre, les « demandes » des élèves sont assez différentes ; j'ai souvent remarqué l'agressivité des filles de série scientifique à mon égard, une demande affective très forte des filles des séries littéraires, des états de prostration ou de révolte chez des garçons de série littéraire, le travail « sérieux », accompagné de peu de demandes, des garçons de série scientifique. Mais, naturellement, dans tout cela, quelle est exactement ma part ?

             D'autre part, j'entends souvent dire : « Il y a ceux qui sont doués, et ceux qui ne le sont pas », autrement dit, ceux qui ont la bosse et ceux qui ne l'ont pas ; ou bien : « Ils n'ont pas eu les conditions sociales nécessaires à leur réussite en maths », ou : « C'est la faute de certains professeurs, qui ne savent pas enseigner », ou : « La faute aux mathématiques modernes. » Ces appréciations ne m'ont jamais satisfait, d'autant plus que des questions se posaient à moi sous la forme d'échecs nombreux et inexplicables : comment comprendre que des élèves de première ou de terminale, ayant traversé toute la succession de barrages qu'ils ont rencontrée depuis leur sixième : orientation de fin de cinquième, orientation de fin de troisième, orientation de fin de seconde..., « la crème des crèmes, quoi ! », ne réussissent toujours pas en mathématiques ? Que des élèves ayant de bons résultats dans d'autres disciplines puissent encore écrire : « Si 2 x = 0, alors x = — 2 », et cela de façon courante ? Tout professeur de mathématiques du second cycle en a fait l'expérience. Les accusations de paresse, de manque de connaissance, d'inattention ne m'ont jamais paru convaincantes.

             Une autre série de faits étonne encore celui qui veut bien avoir l'oreille un peu attentive : les lapsus des élèves, tels que : « je vais lever l'interdiction » pour « lever l'indétermination », « c'est une injonction » pour « c'est une injection », « une application compliquée » pour une « application composée ».

             Que dois-je dire à mes enfants lorsque, de retour du lycée avec une bonne note en mathématiques, ils m'affirment : « Les copains m'ont dit : " C'est pas étonnant, avec ton père qui est prof de maths. " » Cela serait-il héréditaire ? Ou même contagieux ? « Un tel est bon en maths ! C'est normal : il habite dans le même immeuble que le prof ! »

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