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L'école et la rue: fabriques de délinquance

Benjamin Moignard

Editions P.U.F. (Le Monde) ISBN: 978-2-13-056507-9 (2008) 26 €

Dernière de couverture

 Partage du savoir Le Monde

L'école ne fait pas que subir la pression de son environnement : elle participe aussi de manière insidieuse à la construction de la délinquance juvénile. Benjamin Moignard a pu l'observer en France, dans un quartier de la périphérie parisienne, où il a suivi et interrogé, des mois durant, des adolescents membres de plusieurs bandes locales, dans la rue et dans leur collège. Il a pu l'observer aussi au Brésil, où il a travaillé avec un gang d'adolescents appartenant à une faction locale de trafiquants de drogue d'une importante favela de la ville de Rio de Janeiro, en les accompagnant, là aussi, dans l'école et dans la rue.

A travers une passionnante enquête de terrain, évitant tout sensationnalisme ou misérabilisme, l'auteur dépeint les modalités de construction des pratiques sociales des adolescents dans ces deux espaces. La comparaison internationale est ici l'occasion de faire de l'altérité un opérateur de connaissance, en interrogeant les liens d'évidence entre difficultés socio-économiques et violence à l'école, activité délinquante et scolarisation, déviance et adhésion aux normes dominantes.

Une ouverture précieuse pour les acteurs de l'école et des quartiers.

Docteur en sciences de l'éducation, chercheur à l'Observatoire international et à l'Observatoire européen de la violence scolaire, Benjamin Moignard enseigne en tant qu'ATER à l'Université de Lille 3. Il est également membre de l'équipe ERCEF de l'Université Bordeaux 2.

Préface de Georges Felouzis - Postface de Bernard Charlot

Table des matières

REMERCIEMENTS, IX

PRÉFACE de Georges Felouzis, xI

INTRODUCTION, 1

Des collèges de quartiers populaires cernés de l'extérieur ?,

De la France au Brésil : la construction d'une démarche comparative, 4

 

CHAPITRE 1

Des terrains d'enquêtes aux enquêtes de terrains :

construction méthodologique et enjeux épistémologiques

Du quartier français à la favela brésilienne : un tour d'horizon des terrains d'enquêtes, Le quartier des Pivoines : un quartier populaire ségrégué,

La Roca : une favela carioca,

La construction de la posture de recherche sur le terrain : définir la place du chercheur,

Gérer la proximité : la construction d'un nouveau statut aux Pivoines,

Favelas cariocas et ONG : construction de l'accès au terrain au Brésil,

La magie comme mode d'accès privilégié au terrain,

La conduite de la recherche : de l'école à la favela,

Le maintien sur le terrain : difficultés méthodologiques et précisions éthiques,

De la limite de la proximité comme mode d'accès aux activités délinquantes, 28 La magie comme mode d'accès au terrain : parasitage et effets pervers,

De la gestion du « risque » en observation directe : assurer son maintien sur le terrain

CHAPITRE 2

Du groupe de copains à la bande :

éléments de sociabilité et formes de socialisation chez les adolescents de quartier populaire

Un fond commun : éléments de sociabilité et culture de rue,

Défendre son honneur, assurer sa réputation : un enjeu central de la sociabilité adolescente,

Habitus agonistique et socialisation adolescente,

De la loi du plus fort comme forme de structuration de la hiérarchie de dominance entre les adolescents,

Le quartier comme territoire : la construction du sentiment d'appartenance,

Des bandes aux gangs : la constitution de groupes de pairs exclusifs orientés vers les activités délinquantes,

Les bandes en France : sociabilités partagées et construction identitaire, 52 De quelles bandes parle-t-on ? Premières esquisses,

De la relation dans et autour de la bande,

De l'ethnicité dans les bandes d'adolescents,

Les gangs au Brésil : le poids du trafic de drogue,

Le trafic comme alternative ?,

Pouvoir de proximité et proximité du pouvoir,

De l'oppression paternaliste comme moyen de la domination : la place des gangs dans la comunidade,

CHAPITRE 3

La conduite des activités déviantes et délinquantes dans et autour de l'école : des espaces de structuration multiples

Les activités déviantes et délinquantes comme élément de socialisation juvénile en milieu populaire ?,

Le trafic de drogue : de l'activité exclusive au Brésil à l'initiation délinquante en France,

Trafic de drogue au Brésil: une activité exclusive dans la rue,

Trafic de drogue en France : le début de la fin pour la bande ?,

Une pratique quotidienne de la « débrouille »,

Racket et agression : la force du groupe,

Violence à l'école et délinquance : une comparaison France-Brésil,

Un collège du quartier : un exemple brésilien,

De quelle école parle-t-on ? Coup de projecteur sur le système éducatif brésilien contemporain,

Un collège protecteur qui ne subit pas la violence scolaire,

Un collège investi par la communauté,

Le collège comme outil de l'oppression paternaliste,

Un collège dans le quartier : un exemple français,

Du collège sanctuarisé au collège barricadé : un exemple de l'isolationnisme scolaire français,

CHAPITRE 4

L'école comme fabrique délinquante ?

Apprendre ou éduquer ? Des postures variées pour gérer la confrontation des normes scolaires et des normes juvéniles,

Quelles missions pour le collège ? Débats internes et inscriptions nationales en France,

Des projets pour le collège, un collège sans projet,

Des postures enseignantes variées et contradictoires,

La scolarisation à tout prix : un exemple brésilien,

La ségrégation interne comme politique d'établissement : le collège comme espace de structuration des bandes de jeunes,

Des bandes dans le collège ? Le poids de la construction des « classes périphériques » dans la structuration des bandes,

Expérience collégienne et tri scolaire,

Le redoublement comme indicateur de l'échec scolaire des membres de la bande,

Ethnicisation des rapports scolaires et appartenance à la bande,

Organiser la répression,

S'attaquer aux « noyaux durs » : une solution ?,

La construction d'une logique répressive,

De l'exclusion comme solution éducative ?,

De la distinction dans la gestion de la discipline : le « sale boulot » de la « brigade »,

De l'affectif comme moyen pour assurer l'ordre scolaire : un exemple brésilien,

CONCLUSION, - POSTFACE de Bernard Charlot, BIBLIOGRAPHIE, ANNEXES, Annexe 1 / Une mise en perspective du type de données recueillies, Annexe 2 / Tableau récapitulatif des enquêtes de terrain et des données recueillies, Annexe 3 / Glossaire et traduction des termes portugais utilisés,

Un passage

<<APPRENDRE OU ÉDUQUER ? DES POSTURES VARIÉES POUR GÉRER LA CONFRONTATION DES NORMES SCOLAIRES ET DES NORMES JUVÉNILES

Moi je ne sais pas si c'est encore possible d'être enseignant aujourd'hui. Enfin, enseignant comme je l'entends. On a trop de choses à gérer. On nous demande tout et n'importe quoi. Aujourd'hui, un prof il doit être prof bien sûr, mais aussi éducateur, animateur, psychologue, assistante sociale, et je passe sur toutes les dimensions politiques qui font qu'on doit aussi apprendre à naviguer en eaux troubles pour avoir des moyens. Nous encore, avec la réputation qu'on se tient, on n'est pas mal lotis. Mais y 'a un problème de fond sur ce que c'est que d'être enseignant aujourd'hui, enfin, je veux dire enseignant ici, dans ce genre de quartier et avec ce style de public.

M. R., professeur de mathématiques

Que peut-on attendre de l'école ? Dans une société qui est en passe de faire de la ségrégation un mode de gestion sociale qui ne se dit pas mais qui se vit pourtant, comment l'école est-elle en mesure d'assurer « son » rôle aujourd'hui ? Le collège en particulier devient le théâtre de la confrontation entre des systèmes normatifs parfois contradictoires ou opposés qui induisent une évolution dans les logiques et les stratégies d'acteurs qui subissent, quelle que soit leur place, les conséquences de ces oppositions. Il serait trop simple de renvoyer le malaise enseignant — ou tout au moins d'une partie d'entre eux — à une question d'inadaptation « petite-bourgeoise », ou de nier les problèmes de fond qui traversent les quartiers et les collèges en particulier, qu'un certain nombre d'acteurs de l'école tentent encore d'investir. La fonction première de l'école, à savoir la transmission d'un « savoir scolaire », doit-elle être aujourd'hui remise en cause ? Quelle place laisser aux apprentissages quand les cadres de la forme scolaire semblent de plus en plus difficiles à définir et à consacrer ? La mission de l'école n'est-elle pas plutôt d'éduquer que d'enseigner ? Les programmes scolaires ne doivent-ils pas être repensés pour coller aux capacités des élèves ? Autant de questions qui viennent compléter les injonctions paradoxales déjà nombreuses auxquelles l'école doit aujourd'hui faire face. De la France au Brésil, des stratégies particulières s'élaborent à partir de logiques d'acteurs et de politiques d'établissements qui prennent corps dans des histoires scolaires distinctes, révélant de profondes différences dans le sens qu'attribuent les membres de la communauté éducative à leur mission.>> p.132

Commentaire

Une recherche intéressante qui permet aux enseignants d'élargir leur horizon quotidien et mettre du sens sur leurs choix pédagogiques

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