L'autorité
éducative dans la classe Douze situations
pour apprendre à l'exercer
Bruno
Robbes Editions E.S.F.
ISBN:
978-2-7101-2115-2
(2010) 23 € Tout enseignant,
tout éducateur se doit d'exercer une
autorité. Aucun d'entre eux, d'ailleurs, ne
souhaite délibérément abdiquer
son autorité! Pour autant, les injonctions
à la « restauration » de
l'autorité traditionnelle paraissent bien
dérisoires dès lors qu'elles ne
s'accompagnent ni d'une réflexion sur la
nature de cette autorité, ni d'un travail
sur les moyens de l'exercer à bon
escient. L'ouvrage de Bruno
Robbes rompt tout autant avec les lamentations
passéistes sur un âge d'or de
l'autorité qu'avec les préconisations
simplistes sur « la tenue de classe ».
L'auteur s'efforce, en revanche, de comprendre
comment une autorité peut être
véritablement éducative. Il souligne
la nécessité de dépasser
l'opposition entre contrainte et liberté
afin de construire des 1 situations
où l'élève consent à
s'impliquer dans ce qui lui est proposé pour
accéder aux savoirs qui lui permettront de
s'émanciper. Il montre aussi que cette
autorité requiert une éthique
professionnelle qui la rend, tout à la fois,
légitime et praticable. Mais
l'originalité de ce livre tient aussi dans
la manière dont il s'appuie sur des
situations concrètes qui, de la maternelle
au lycée, permettent de comprendre où
se situent les problèmes d'autorité,
comment les analyser et les surmonter. Grâce
à ces situations, où l'on
reconnaîtra le quotidien de notre
école, le lecteur pourra non seulement
identifier les enjeux de l'autorité
éducative aujourd'hui, mais aussi voir
comment on peut concrètement s'y prendre
pour y faire face. Sans dramatiser ni
s'épuiser. Et même en trouvant du
plaisir à enseigner ! Philippe
Meirieu Bruno Robbes
est maître de conférences en Sciences
de l'éducation à l'université
de Cergy-Pontoise/IUFM de Versailles et membre du
laboratoire CREF de l'université Paris-Ouest
Nanterre La Défense, dans l'équipe
« Crise, école, terrains sensibles
». Ses domaines de recherche et d'intervention
concernent les violences en milieu scolaire, la
gestion des conflits, la discipline scolaire,
l'autorité, les pédagogie. Il a
reçu le prix Louis Cros 2009 pour ses
travaux sur l'autorité éducative de
l'enseignant. Table des
matières Remerciements
Introduction
Pour en finir avec
l'autorité naturelle L'autorité
en quatre parties 1.
L'autorité dans la société
Un
détournement de sens Les débuts
d'une remise en question L'autorité
légitimée par les droits de l'homme
et le contrat Les progrès
technologiques de la révolution industrielle
modifient-ils profondément les relations
d'autorité ? ... De
l'après-guerre à aujourd'hui : crise
ou modification des relations d'autorité ?
2.
L'autorité dans l'éducation et
à l'école Conception
dévalorisée de l'enfance et
discipline scolaire Nécessité
sociale de la discipline et de l'autorité
à l'école Portrait du «
bon maître » L'autorité
traditionnelle dans la classe La remise en cause
de l'autorité traditionnelle La crise actuelle
de l'autorité L'Éducation
nationale à travers ses discours actuels sur
l'autorité 3.
L'autorité éducative, une nouvelle
conception pour la pratique L'autorité
ne se confond ni avec la discipline scolaire, ni
avec le pouvoir L'autorité
au fondement de l'humain L'autorité :
un fait social irremplaçable Trois
significations de l'autorité 4. Les
caractéristiques de l'autorité
éducative Une relation
asymétrique et symétrique Une relation
d'influence Une relation
basée sur la reconnaissance de la
légitimité du détenteur de
l'autorité statutaire 5. Quelques
précisions à propos des savoirs
d'action et du recueil de nos situations
Savoirs
théoriques, savoirs pratiques : une
distinction dépassée Comment
s'élaborent les savoirs? Schème et
habitus, ressorts de l'action Compétence,
savoir d'expérience, savoir pratique,
savoir-faire Savoirs et savoirs
d'action Présentation
des interviewés et des situations
6. Douze situations
d'enseignement vécues, racontées et
analysées 1. « Une classe
pour deux » ou comment exercer
l'autorité dans sa classe sans
altérer celle de sa
remplaçante? 2. De la mousse contre
le bruit 3. Un regard, comme
une promesse 4. Une décision
reconnue comme acceptable 5.. Mourad
ou la voix de son maître 6. Exercer
son autorité, c'est faire travailler un
élève perturbateur dans sa classe
7. Un moment
d'égarement 8. De la
menace physique à l'autorité
acceptée : un moment limite 9.
Débuter en étant un professeur
crédible ou la chronique d'une sortie
annoncée 10. Le test
du (couvre)-chef 11.
Savoir(s) (pour) composer 12.
L'autorité entre fermeté et lien
7. Clarifier le
concept et les représentations de
l'autorité «Qu'est-ce que
l'autorité pour moi? » «L'autorité,
je croyais que... »/ «L'autorité,
j'ai découvert que... » Q-sort sur la
notion d'autorité Des fiches de
synthèse 8. Exercer une
autorité éducative au quotidien
Le « jeu de
cartes » Des situations
brèves ou plus développées
La
déconstruction de situations Une approche de
l'exercice de la relation d'autorité par le
théâtre-forum Conclusion
En finir avec
l'autorité naturelle et approfondir la
formation Exercer une
autorité éducative : un enjeu pour la
fonction sociale d'éducation Glossaire
des principaux qualificatifs de
l'autorité Annexe :
à propos de l'entretien d'explicitation ..
. Index des
auteurs cités Bibliographie
Un passage <<L'autorité
statutaire de l'enseignant ne peut plus se fonder
exclusivement sur le savoir transmis Parce que la
production scientifique est devenue un enjeu
économique majeur, le savoir occupe
aujourd'hui une place déterminante dans nos
sociétés, mais la
légitimité de ses
énoncés n'en est pas moins
questionnée de toute part. Une telle
modification du rapport social au savoir a bien
évidemment des répercussions dans
l'institution scolaire. D'une part, nous admettons
que la vérité des savoirs disponibles
est relative. Ce qui s'enseigne à
l'école est une sélection de savoirs
produits selon des méthodologies
scientifiques au cours des siècles
jusqu'à aujourd'hui, en l'état actuel
de nos connaissances. D'autre part, la transmission
des savoirs n'est plus l'apanage exclusif de
l'école: le développement exponentiel
des nouvelles technologies de l'information et de
la communication permet à la plupart des
élèves d'accéder à des
savoirs bien plus diversifiés et
vérifiables que les savoirs du professeur.
C'est donc à ce double titre que
l'autorité du savoir transmis par
l'enseignant est ébranlée. Par
conséquent, son autorité statutaire
ne peut plus se fonder exclusivement sur lui, ce
qui provoque une mutation profonde de l'exercice du
métier et conduit à se demander sur
quoi l'enseignant peut aujourd'hui fonder son
autorité statutaire. Dans ce contexte,
beaucoup considèrent encore et toujours que
l'autorité de l'enseignant se fonde
exclusivement et a priori sur le savoir qu'il
possède, comme si le savoir en soi,
rationnel et désincarné, était
une condition suffisante pour assurer une
réception efficiente et permettre
l'apprentissage. Cette position s'accompagne d'une
critique du « pédagogisme ». Nous
considérons qu'une telle sacralisation du
savoir comme autorité transcendante et
universelle, de l'autorité de la parole du
maître parce qu'il parle vrai et donne
à penser le vrai43, pourrait signer à
terme la fin du professeur. Il serait
remplacé au mieux par l'Internet, un bon
manuel ou un support documentaire de
qualité, au pire par des enseignements
dispensés par des communautés
affiliées à une religion ou à
une secte, situant les convictions ou les croyances
qu'elles transmettent sur le même plan et en
concurrence directe avec les savoirs issus de
productions scientifiques enseignées
à l'école. Certains collèges
ou lycées sont d'ores et déjà
confrontés à des problèmes de
ce type: refus d'élèves parfois
soutenus par leurs familles d'assister à
certains cours au nom de convictions ou de
croyances religieuses, remise en question de tel
contenu de savoir enseigné justifié
par l'appartenance à une communauté
et revendiqué comme tel, autocensure chez
des professeurs de certains contenus de programmes
scolaires dont la transmission pose
problème. C'est pour cela que Philippe
Meirieu (2003) attire notre attention sur la
nécessité que le professeur permette
à ses élèves de distinguer la
vérité du savoir
(spécifié par les conditions de sa
production), de l'opinion, de la conviction ou de
la croyance. Ainsi, prendre au
sérieux le fait que le savoir fonde
l'autorité statutaire de l'enseignant, c'est
considérer que la plus-value professorale
réside non pas dans la détention d'un
savoir en tant que tel, mais dans la mise en place
de modalités appropriées
d'accès au savoir qui légitiment son
autorité et par là même le
savoir, le statut d'élève posant de
fait la présence d'un écart avec les
objets de savoirs. En conséquence,
l'enseignant ne peut plus se définir
exclusivement comme le détenteur d'un
savoir. Il est bien davantage celui qui crée
les conditions effectives didactiques et
pédagogiques permettant à
l'élève d'être engagé
dans l'activité d'apprentissage et non plus
soumis à un savoir qui ferait
autorité, du fait exclusif que l'enseignant
qui détient l'autorité statutaire
l'énonce.>> p.47 Commentaire Un livre de réflexion
sur un sujet difficile. Un livre pratique par
ses analyses de cas concrets.