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Quelques extraits de textes littéraires

sur le thème de l'imaginaire"

Choix des textes par Anne-Marie Geoffrion-Pfeil 

 

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a) L'imaginaire personnel ( Nerval )

Fantaisie

Il est un air pour qui je donnerais

Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber,

Un air très vieux, languissant et funèbre,

Qui pour moi seul a des charmes secrets.

 

Or, chaque fois que je viens à l'entendre,

De deux cents ans mon âme rajeunit :

C'est sous Louis treize… Et je crois voir s'étendre

Un coteau vert que le couchant jaunit,

 

Puis un château de brique à coins de pierre,

Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,

Ceint de grands parcs, avec une rivière

Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs ;

 

Puis une dame, à sa haute fenêtre,

Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens…

Que, dans une autre existence peut-être,

J'ai déjà vue ! - et dont je me souviens !

Gérard de NERVAL

b) La transformation de la réalité par l'imaginaire personnel ( Vallès )

             Le narrateur, un jeune collégien du XIXème siècle, est puni. Il est enfermé dans une salle d'étude vide. Pour s'occuper, il explore les lieux.

 <<Il m'a mis aux arrêts, - il m'a enfermé lui-même dans une étude vide, a tourné la clef, et me voilà seul entre les murailles sales, devant une carte de géographie qui a la jaunisse, et un grand tableau noir où il y a des ronds blancs et la binette du censeur.

             Je vais d'un pupitre à l'autre : ils sont vides - on doit nettoyer la place, et les élèves ont déménagé.

             Rien, une règle, des plumes rouillées, un bout de ficelle, un petit jeu de dames, le cadavre d'un lézard, une agate perdue.

             Dans une fente, un livre : j'en vois le dos, je m'écorche les ongles à essayer de le retirer. Enfin, avec l'aide de la règle, en cassant un pupitre, j'y arrive : je tiens le volume et je regarde le titre :

ROBINSON CRUSOE

             Il est nuit.

             Je m'en aperçois tout d'un coup. Combien y a-t-il de temps que je suis dans ce livre ? - quelle heure est-il ?

             Je ne sais pas, mais voyons si je puis lire encore ! je frotte mes yeux, je tends mon regard, les lettres s'effacent, les lignes se mêlent, je saisis encore le coin d'un mot, puis, plus rien.

             J'ai le cou brisé, la nuque qui me fait mal, la poitrine creuse : je suis resté penché sur les chapitres sans lever la tête, sans entendre rien, dévoré par la curiosité, collé aux flancs de Robinson, pris d'une émotion immense, remué jusqu'au fond de la cervelle et jusqu'au fond du cœur : et en ce moment où la lune montre là-bas un bout de corne, je fais passer dans le ciel tous les oiseaux de l'île, et je vois se profiler la tête longue d'un peuplier, comme le mât du navire de Crusoé !! je peuple l'espace vide de mes pensées, tout comme il peuplait l'horizon de ses craintes : debout contre cette fenêtre, je rêve à l'éternelle solitude et je me demande où je ferai pousser du pain…

             La faim me vient : j'ai très faim.

             Vais-je être réduit à manger ces rats que j'entends dans la cale de l'étude ? Comment faire du feu ? J'ai soif aussi. Pas de bananes ! Ah ! lui, il avait des limons frais ! Justement j'adore la limonade !

             Clic, clac ! on farfouille dans la serrure.

             Est-ce Vendredi ? Sont-ce des sauvages ?

             C'est le petit pion qui s'est souvenu, en se levant, qu'il m'avait oublié, et qui vient voir si j'ai été dévoré par les rats, ou si c'est moi qui les ai mangés.>>

( L'Enfant ) 1878 (sujet bac pro juin 2001 Antilles et sujet de brevet )Jules VALLES

 

c) la transformation de la réalité par l'imaginaire collectif ( Alexie)

Une drogue nommée tradition

<<Ils ont tous disparu, ma tribu a disparu. Les couvertures qu'ils nous ont données, infectées de variole, nous ont tués. Je suis le dernier, le tout dernier, et je suis malade moi aussi. Si malade. Brûlant. Brûlant de fièvre.

           Il faut que j'enlève mes vêtements, que je sente l'air frais, que j'asperge d'eau ma peau nue. Et que je danse. Je vais danser la danse des Esprits. Je vais les faire revenir. Vous entendez les tambours ? Moi, je les entends, et c'est mon grand-père et ma grand-mère qui chantent. Vous les entendez ?

             Je fais un pas de danse et ma sœur se lève des cendres. Je fais un autre pas et un bison tombe du ciel qui s'écrase sur une cabane en rondins au Nebraska. A chaque pas, un Indien se lève. A chaque autre pas un bison tombe.

             Et je grandis moi aussi. Mes pustules se cicatrisent, mes muscles s'étirent, grossissent. Ma tribu danse derrière moi. Au début, ses membres ne sont pas plus grands que des enfants. Puis ils grandissent à leur tour, deviennent plus grands que moi, plus grands que les arbres qui nous entourent. Les bisons se joignent à nous et leurs sabots font trembler le sol, font tomber tous les Blancs de leur lit, font s'écraser leur vaisselle par terre.

             Nous dansons en cercles de plus en plus larges et nous arrivons sur la plage où nous regardons tous les bateaux repartir pour l'Europe. Les mains blanches s'agitent pour dire au revoir et nous continuons à danser jusqu'à ce que les bateaux disparaissent à l'horizon, jusqu'à ce que nous soyons si grands et si forts que le soleil en devient presque jaloux. Voilà comment nous dansons.>>

Sherman ALEXIE ( Phoenix, Arizona Editions Albin Michel 1993 )

Imagine la réserve

<<Imagine que Crazy Horse ait inventé la bombe atomique en 1876 et l'ait lâchée sur Washington. Les Indiens des villes seraient-ils encore écroulés dans leur une-pièce au sein de la réserve de la télévision par câble ? Imagine qu'une miche de pain puisse nourrir la tribu entière. Tu ne savais pas que Jésus-Christ était un Indien Spokane ? Imagine que Christophe Colomb débarquant en 1492 ait été noyé dans l'océan par une tribu ou une autre. Lester FallsApart faucherait-il dans le magasin 7-Eleven ?( … )

             Survie = Colère x Imagination. L'imagination est la seule arme qui existe sur la réserve.

             La réserve ne chante plus mais les chants planent toujours dans l'air. Chaque molécule attend un battement de tambour, chaque élément rêve de paroles. Aujourd'hui je marche entre l'eau, entre deux atomes d'hydrogène et un atome d'oxygène, et l'énergie libérée s 'appelle Pardon.( … )

             Il y a tant de possibilités dans la réserve 7-Eleven, tant de méthodes de survie. Imagine que chaque Peau-Rouge de la réserve soit le nouveau guitariste solo des Rolling Stones et fasse la couverture d'un magazine de rock. Imagine qu'on vende deux pardons pour le prix d'un. Imagine que chaque Indien soit un jeu vidéo avec des nattes. Tu crois que le rire peut nous sauver ? Tout ce que je sais, c'est que je compte les coyotes pour m'endormir. Tu l'ignorais ? L'imagination est la politique des rêves. L'imagination transforme tous les mots en fusées de feu d'artifice. Imagine, Adrian, que chaque jour soit la fête de l'Indépendance et nous évite de voyager sur la rivière changée, nous évite de faire en stop la longue route qui nous ramène chez nous. Imagine une évasion. Imagine que ton ombre sur le mur soit une porte parfaite. Imagine un chant plus fort que la pénicilline. Imagine l'eau d'une source qui ressoude les os brisés. Imagine un tambour qui s'enroule autour de ton cœur. Imagine une histoire qui mette du bois dans la cheminée.>>

Sherman ALEXIE ( Phoenix, Arizona Editions Albin Michel 1993 )

d) le mythe (Tournier )

<<Qu'est-ce qu'un mythe ? A cette question immense, je serais tenté de donner une série de réponses dont la première, la plus simple, est celle-ci : le mythe est une histoire fondamentale.

             Le mythe, c'est tout d'abord un édifice à plusieurs étages qui reproduisent tous le même schéma, mais à des niveaux d'abstraction croissante. Soit par exemple, le fameux mythe de la caverne de Platon. ( … )(cliquer sur la photo)

             Un mythe est une histoire que tout le monde connaît déjà. Quand j'écrivais Les Météores je répondais à ceux qui m'interrogeaient sur le sujet de mon prochain roman : c'est l'aventure de deux frères jumeaux parfaitement ressemblants. Aussitôt le visage de mon interlocuteur s'éclairait. Des frères jumeaux ? Justement, il en connaissait ! Deux frères-pareils. Quand l'un des deux s'enrhumait à Londres, l'autre éternuait à Rome.

             Combien de fois n'ai-je pas entendu ce genre d'anecdote ! Il était bien inutile que j'entre dans les détails de mon projet. On les connaissait déjà, on me les récitait à l'avance. Je me félicitais : c'était la preuve que mon sujet était de nature mythologique. André Gide a dit qu'il n'écrivait pas pour être lu mais pour être relu. Il voulait dire par là qu'il entendait être lu au moins deux fois. J'écris moi aussi pour être relu, mais, moins exigeant que Gide, je ne demande qu'une seule lecture. Mes livres doivent être reconnus " relus " dès la première lecture. >>

Michel TOURNIER Le Vent Paraclet ( Editions Gallimard 1977 ) ( cité dans la Nouvelle Revue Pédagogique, n°5 janvier 2004, " Littérature et mythologies ", Editions Nathan n°564 )

Le mythe de la caverne-->

e) l'ambiance de classe ( Pennac )
f) pour finir par un clin d'oeil humoristique
( Crastaing est le prof de français du narrateur ; Pope et Moune sont les surnoms de ses parents ; Tatiana est la mère de Kamo, son meilleur ami. )

Page 18 :

Rédaction pour le lundi 16.

             Sujet : Vous vous réveillez un matin, et vous constatez que vous êtes transformé en adulte. Affolé, vous vous précipitez dans la chambre de vos parents : ils sont redevenus des enfants. Racontez la suite.

" Je dis bien : racontez la suite ! " avait précisé Crastaing. Puis il avait lâché une de ces phrases dont il avait le secret : " Et n'oubliez pas, l'imagination, ce n'est pas le n'importe quoi ! "

 

Pages 83-84 ( les dernières pages du livre ) :

             Oui, ce matin-là, Crastaing, notre prof de français, nous lut à voix haute une histoire extraordinaire, une histoire de famille, pleine d'adultes-enfants et d'enfants-adultes, de tartines volantes, de bosses, d'inondations, de maladies effrayantes, de convalescences délicieuses, et dont les personnages s'appelaient Pope, Moune, Tatiana… une histoire de famille avec des hauts et des bas, des naissances et des morts, dont les racines plongeaient profond dans l'Histoire avec un grand H, celle qui fait les guerres et les révolutions, celle qui éparpille les familles, creuse les fossés de l'oubli mais qui finit malgré tout par accoucher de la paix et devient alors l'histoire des retrouvailles et des rencontres, l'histoire des bonheurs qu'on croit éternels…l'histoire du mariage de Pope et de Moune… de nos vacances dans le Vercors, l'histoire qui fuit les livres d'Histoire pour se reposer un peu dans les albums de famille… la seule histoire dont lui, Crastaing, eût jamais rêvé…

             Sa voix était toujours un peu métallique, mais elle s'était assouplie, elle épousait toutes les péripéties de son récit, ce n'était plus seulement une voix pour faire peur, mais pour faire rire aussi, et pleurer, et rêver, et penser… une voix vivante, riche de la vie qu'il avait jetée sur ces pages… Il lisait, il lisait comme on raconte. A la fin de l'heure il lisait encore. Personne n'entendit sonner la récré.

Kamo et moi ( Editions Folio Junior, 1992 ) Daniel PENNAC
 

 les représentations sociales ( Flaubert ) 

Dictionnaire des idées reçues

ENFANTS : Affecter pour eux une tendresse lyrique, quand il y a du monde.

IMAGINATION : Toujours vive. S'en défier. Quand on n'en a pas, la dénigrer chez les autres. Pour écrire des romans, il suffit d'avoir de l'imagination.

LANGUES VIVANTES : Les malheurs de la France viennent de ce qu'on n'en sait pas assez.

LITTERATURE : Occupation des oisifs.

LIVRE : Quel qu'il soit, toujours trop long.

MATHEMATIQUES : Dessèchent le cœur.

MUSIQUE : Fait penser à un tas de choses. Adoucit les mœurs. Ex. : la Marseillaise.

PHILOSOPHIE : Toujours en ricaner.

PROFESSEUR : Toujours savant.

Gustave FLAUBERT

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