« N. Vous
avez dit tout à l'heure que c'était
la logique qui vous intéressait dans les
mathématiques ?
E. Enfin, la
logique..., un déroulement suivi, c'est
ça que...
N. Pourquoi
cela vous plaît-il ?
E. Je trouve
que c'est plus..., enfin, quand on veut
résoudre quelque chose dans la vie, on le
fait progressivement sans s'arrêter, d'un
seul coup, sans repartir à autre chose ;
enfin, je le pense. Alors, pour les maths, c'est
pareil. Je pense que quand on a à
résoudre quelque chose, on le fait
progressivement et sans sauter..., sauter comme
ça d'une question à une autre ou...
qui sont totale-ment différentes, quoi !
Tandis que, quand c'est un enchaînement...,
je trouve que c'est plus normal.
N. Plus normal
?
E. Oui, c'est
plus normal, c'est... Quand on
réfléchit,
généralement, c'est pareil. C'est une
réflexion qui part d'un point et qui, petit
à petit, va au bout de la réflexion.
Je crois que pour les maths c'est pareil ; à
chaque fois qu'on a quelque chose à faire,
c'est comme ça. On part de
l'hypothèse et on va jusqu'à la
conclusion, progressivement.
N. Vous avez
l'impression que ça vous sert à avoir
une réflexion normale d'une certaine
façon...
E. -- Oui, je pense !
Oui, ça aide justement à ne pas avoir
ce qu'on appelle une tête en l'air, qui saute
d'une question à une autre comme ça ;
je pense que ça nous donne un air plus
réfléchi.
N.
Oui...
E. Plus
réfléchi ; comme on en voit certains
qui parlent d'une chose puis aussitôt d'une
autre, sans avoir terminé le premier point.
Je pense que c'est tout de même un peu mieux,
non seulement pour nous-même, mais aussi pour
les autres surtout. ... C'est, je ne sais pas...,
l'esprit et la pensée qui..., enfin..., un
jour, j'aurai les idées assez claires, gaies
et tout... Et le lendemain, j'aurai des
idées noires. Et, juste-ment, il y a un
contraste qui se fait en moi-même. C'est que
généralement, quand il fait beau,
qu'il y a du soleil, c'est là que je suis le
plus noir, tandis que quand il y a un temps gris ou
qu'il pleut, je me sens à l'aise dans ce
temps-là, beaucoup plus que quand il fait
beau. Oui, je préfère un temps
pluvieux. Je pense que ça correspond
beaucoup plus à moi-même qu'un temps
clair, ensoleillé et tout.
N. Comment
expliquez-vous cela ?
E. Ben !...
(Rires.)... je sais pas !... je sais pas du tout ;
c'est peut-être en moi, enfin, c'est...
J'aurai certaine-ment du mal à changer,
mais... avec les maths anciennes, autrefois, je
crois que j'avais trouvé un peu de
stabilité quand même, c'était
beaucoup moins fort que maintenant. (Maintenant,
cette élève fait des
mathématiques modernes.) Alors, je ne sais
pas si... ça doit venir du
tempérament de..., enfin beaucoup de faits
qui font que je suis comme ça. Mais, je sais
pas..., c'est comme si c'était..., c'est
intérieur, et puis je ne peux pas changer.
J'ai du mal. Et même quand... il y a des fois
que j'ai des idées noires, j'essaie de me
raisonner, de me dire que ça sert à
rien, mais c'est plus fort que moi, je ne peux pas.
C'est comme si c'était une force
intérieure, même extérieure,
qui agirait sur moi et qui me rendrait comme
ça.
N. Oui...
Qu'est-ce que c'est que cette force ?
E. Je sais pas.
C'est peut-être pas une force... C'est
peut-être la pensée, la
pensée..., enfin la réflexion qui
domine tout, je sais pas. Je ne peux suivre que mes
idées et rien d'autre. J'essaie de me
raisonner, mais... ça ne va pas ! Toujours
des pensées qui reviennent au premier plan.
Alors, ça y fait beaucoup. Même dans
le travail ! Des jours où... Des jours
où vraiment je..., j'ai vraiment des
mauvaises idées, des idées noires.
J'ai beaucoup plus de mal à travailler, bien
que j'essaie de « m'attacher » le plus
possible pour essayer d'oublier mes pensées.
Mais j'ai beaucoup de mal à
tenir.
N. Qu'est-ce
que vous appelez des idées noires
?
E. Je sais
pas..., je sais pas... que, enfin ! que la vie est
drôle ! enfin, que c'est pas toujours
plaisant, enfin, des choses comme ça,
alors... j'essaie en me mettant au travail, en
essayant de travailler, d'oublier toutes ces
idées noires. C'est souvent difficile,
ça revient toujours ; mais des fois,
.ça peut durer plusieurs jours de suite, des
fois huit jours de suite, comme ça ;
ça peut durer. Alors, après, c'est le
contraire. Enfin, c'est la pleine forme, si on peut
dire. C'est justement, c'est une instabilité
comme ça. Et puis alors, je crois que
ça joue aussi sur la santé, parce que
je n'ai pas tellement une bonne santé. Alors
je crois que ça joue aussi sur la... avec la
santé. Alors, c'est pas facile non plus tous
les jours... Enfin, je crois que tout se tient.
Justement, je sais pas, enfin, j'ai du mal j'ai un
petit frère et j'ai énormément
de mal à m'accorder avec lui parce que
justement, lui, c'est rare quand il..., il est
toujours plein de..., il est tout le temps en
mouvement et puis vraiment il prend la vie comme
elle vient, si on peut dire. Alors j'ai..., je
crois que c'est ça qui fait aussi que je
peux pas m'accorder avec lui. On a... On peut avoir
des différences de caractère. Et on a
du mal à s'accorder tous les deux... Autant
je suis renfermée, autant lui, il est
expressif (sic). »
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